Bien choisir son argumentation pour remettre en cause une démission

Le salarié qui souhaite contester sa démission équivoque peut utiliser deux voies de contestation.

– soit contester son consentement pour obtenir une annulation de la rupture du contrat de travail

soit demander que la rupture soit requalifiée en une prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur

Attention : La Cour de Cassation estime que les deux moyens sont contradictoires et ne peuvent être soutenus l’un après l’autre.

( Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 7 mars 2012 N° de pourvoi: 09-73050 Publié au bulletin Cassation partielle ;confirmation de Cour de cassation chambre sociale 17 mars 2010 N° de pourvoi: 09-40465 Publié au bulletin

Cela signifie que le salarié qui demande l’annulation de sa démission parce qu’il n’avait pas conscience de l’étendue de la portée de son acte ( vice du consentement) ne peut pas dans un second temps demander au Juge de requalifier la démission en prise d’acte de la rupture.

C’est donc le principe de l’estoppel *appliqué au droit social .

contact: carole.vercheyre-grard@avocat-conseil.fr – 83 avenue FOCH 75116 Paris – tél 0144051996

(* principe de l’estoppel une partie ne peut se prévaloir d’une position contraire à celle qu’elle a prise antérieurement lorsque ce changement se produit au détriment d’un tiers :Cour de cassation Assemblée plénière Audience publique du vendredi 27 février 2009 N° de pourvoi: 07-19841 Publié au bulletin Cassation

 

De la portée d’une demande de résiliation judiciaire présentée par le salarié après un licenciement

Le salarié ne peut prétendre solliciter la résiliation judiciaire de son contrat si son employeur a procédé à son licenciement.

En effet, la Cour de Cassation estime que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail engagée par le salarié postérieurement à l’envoi de la lettre de licenciement, date de la rupture du contrat de travail, est nécessairement sans objet.

Cependant cette procédure, si elle a été engagée, n’est pas dépourvue de tout intérêt car elle peut permettre au juge de retenir que le licenciement est infondé.

La Cour de cassation, chambre sociale, mercredi 7 mars 2012 N° de pourvoi: 10-17090expose en effet que le juge doit toutefois, pour apprécier le bien fondé du licenciement,prendre en considération les griefs qui étaient invoqués par le salarié dans sa demande de résiliation dès lors qu’ils sont de nature à avoir une influence sur cette appréciation.

Salariés expatriés : Obligation de l’employeur de les informer de l’étendue de leur protection sociale

  • (mis à jour le 20/03/12)

Les salariés expatriés ont un régime particulier de protection sociale.

En effet, lorsqu’ils travaillent à l’étranger, ils ne dépendent plus du régime général de la Sécurité Sociale.

Ils ont cependant le droit d’adhérer au Régime d’assurance volontaire qui est géré par la Caisse des Français à l’étranger.

Il s’agit de cotisations volontaires à la Sécurité Sociale, ce qui leur permet de bénéficier d’une couverture similaire à celle offerte aux salariés travaillant sur le territoire français.

La Cour de Cassation par arrêt du 25 janvier 2012 – n°11-11374 rappelle qu’il appartient à l’employeur d’informer le salarié expatrié de l’étendue de sa protection sociale pendant la durée de son expatriation.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a condamné l’employeur qui n’avait pas informé son salarié expatrié de sa possibilité de cotiser à la Caisse des Français à l’étranger.

Dès lors, l’absence d’information par l’employeur a causé un préjudice au salarié en lui faisant perdre la chance de bénéficier d’une pension retraite.

Il convient également de noter que la Cour de Cassation considère que la mention des cotisations en retraite figurant sur les bulletins de paie ne peut en aucun cas assurer une information suffisante du salarié sur l’étendue de sa protection sociale.

 

De l’application du principe du contradictoire devant l’Inspection du Travail

  • (mis à jour le 20/03/12)

Un employeur ne peut licencier un salarié protégé sans demander au préalable l’autorisation à l’Inspection du Travail.

L’Inspecteur du Travail doit alors procéder à une enquête afin de déterminer s’il peut autoriser ou non le licenciement du salarié.

Pour réaliser cette enquête, il s’appuie sur les pièces que lui transmet l’employeur.

La jurisprudence du Conseil d’Etat rappelée par un arrêt du 22 février 2012, n°34-6307 (arrêt Gabriel), rappelle que le salarié a le droit d’avoir une communication de l’ensemble des pièces transmises par l’employeur à l’appui de sa demande, afin de lui permettre de présenter utilement sa défense.

Il convient de noter que cette communication est obligatoire même si le salarié connaît lesdits documents.

L’ensemble des preuves et témoignages apportés par l’employeur doit être transmis au salarié avant toute décision de l’Inspection du Travail et permettre au salarié de présenter utilement sa défense.

Il faut noter que ces règles doivent être respectées scrupuleusement, à défaut, l’absence de caractère contradictoire de l’enquête permettra une annulation de la décision de l’Inspection du Travail. 

Licenciement Economique : les propositions de reclassement ne peuvent se limiter aux souhaits préalables du salarié

  • (mis à jour le 20/03/12)

En droit, la procédure de licenciement économique emporte application des règles de reclassement et ce, quel que soit l’effectif de l’entreprise et le nombre de salariés concernés par le licenciement. 

L’article L 1233-4 du code du travail dispose en effet que : « le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient ». 

Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ».

Ainsi, en l’absence d’offres précises et écrites, l’employeur ne peut donc être considéré comme ayant rempli son obligation de reclassement (Cass., Soc, 20 sept 2006, n°04-45.703, n°2032 FS + P+B+R+I Ferron c/ Association Revivre).

Par ailleurs, la Cour de Cassation précise depuis longtemps que l’obligation de reclassement de l’employeur doit être préalable au licenciement ( Cass. Soc. 21 mars 2001, n° 99-43.108, SA VDO Kienzle c/ Guinot). 

C’est donc avant la notification du licenciement que l’employeur doit rechercher et proposer aux salariés les postes disponibles et tenter leur reclassement, même à l’étranger.

Dernièrement la Cour de Cassation dans un arrêt de sa Chambre sociale du 29 février 2012 N° de pourvoi: 10-26657 vient de préciser que l’employeur ne peut limiter ses recherches et ses offres en fonction de la volonté de ses salariés, exprimés à sa demande et par avance, en dehors de toute proposition concrète.

Voici l’attendu de principe : « l’employeur est tenu avant tout licenciement économique, d’une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l’activité, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, d’autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d’une catégorie inférieure; qu’il ne peut limiter ses recherches et ses offres en fonction de la volonté de ses salariés, exprimés à sa demande et par avance, en dehors de toute proposition concrète.

Il s’ensuit que la méconnaissance par l’employeur de son obligation complète constitue un manquement à l’obligation de reclassement préalable au licenciement et prive celui-ci de cause réelle et sérieuse.

Obligation de mentionner le DIF dans la lettre de licenciement même en cas d’arrêt maladie

  • (mis à jour le 19/11/12)

L’employeur doit impérativement informer le salarié de son droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement.

Le défaut de cette mention cause nécessairement un préjudice au salarié.

La Cour de Cassation considère que ce préjudice existe même si pendant la période de préavis le salarié était en arrêt maladie et donc dans l’incapacité d’exercer son DIF. (Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 28 février 2012 N° de pourvoi: 10-26862) 

Je vous livre l’attendu de principe : « Attendu que l’employeur doit informer le salarié, s’il y a lieu, dans la lettre de licenciement, de la possibilité de demander pendant le préavis à bénéficier d’une action de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l’expérience « .

confirmation :

Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 31 octobre 2012 N° de pourvoi: 11-20179 Non publié au bulletin Cassation partielle

Appliquer un forfait jours sans une convention de forfait = travail dissimulé prouvé

  • (mis à jour le 20/03/12)

Faire croire au salarié qu’il est en forfait jours – alors qu’il n’y a aucune convention en ce sens- pour le contraindre à travailler 10 heures par jour sans lui payer d’heures supplémentaires est non seulement illégal mais également très risqué financièrement voire pénalement.

La Cour de Cassation sanctionne très fortement cette pratique en considérant que ces faits caractérisent l’élément  intentionnel du délit de travail dissimulé. 

(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 28 février 2012 N° de pourvoi: 10-27839)

L’employeur peu scrupuleux prend alors le risque de devoir payer non seulement les heures supplémentaires de son salarié mais également 6 mois de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

Rappelons en outre, que le salarié peut prendre acte de la rupture aux torts de l’employeur dont les conséquences sont celles d’un licenciement abusif….

De la liberté de choisir son domicile

Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. 

L’employeur qui impose à son salarié dans son contrat de travail de résider à proximité de son lieu de travail doit :

– justifier que c’est nécessaire à l’activité professionnelle exercée

– justifier que c’est proportionnel au but recherché

Voici l’exemple d’une atteinte injustifiée à la liberté du salarié de choisir son domicile :

Une salariée avait été engagée à compter du 23 janvier 1999 par l’association Maison départementale de la famille en qualité d’employée gouvernante.

Ses fonctions consistaient à veiller au confort physique et moral des majeurs sous tutelle ou curatelle, logés par l’association dans un appartement.

La durée de son travail était fixée à 35 heures dans les plages horaires obligatoires de 8 h 00 à 12 h 30 et 18 h à 19 h 30, sur 5 jours à raison de 6 heures par jour et d’une demi-journée de 3 h 30, outre un temps de 6 h 30 destiné tous les mois à participer aux activités, réunions, visites psychiatres, accompagnement, sans astreintes.

Son contrat de travail lui imposait de résider à 200 mètres de son travail.

Pour des raisons personnelles, elle avait en cours d’exécution de son contrat de travail, changé de lieu d’habitation fixant son domicile à une distance de 20km de son lieu de travail, soit un parcours de 25 minutes en véhicule personnel.

Son employeur, estimant qu’elle n’avait pas respecté une clause substantielle de son contrat de travail, l’avait licenciée.

Il a eu tort.

La Cour de Cassation considère en effet que l’atteinte au libre choix par la salariée de son domicile n’était pas justifiée par la nature du travail à accomplir et proportionnée au but recherché

(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 28 février 2012 N° de pourvoi: 10-18308 Publié au bulletin Cassation)

 

Les absences injustifiées ne qualifient pas toujours la faute grave

  • (mis à jour le 13/03/12)

Les licenciements pour abandon de poste qualifiés de faute grave sont très nombreux.

La Cour de Cassation vient d’attirer l’attention des Employeurs sur le fait que les absences injustifiées ne sont pas toujours constitutives d’une faute graverendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

L’arrêt de la Chambre sociale du 29 février 2012 N° de pourvoi: 10-23183 retient en effet que dans la mesure où au terme de l’absence injustifiée le salarié a réintégré son poste, il ne pouvait pas y avoir de faute grave.

En effet, selon la haute juridiction, en réintégrant le salarié, l’employeur a estimé que son absence n’avait pas rendu impossible son retour dans l’entreprise.

Il faut retenir :

– lorsque l’on est employeur : que le salarié en absence injustifiée dont on envisage le licenciement pour faute grave, ne peut être réintégré même temporairement dans l’entreprise.

– lorsque l’on est salarié : que si l’employeur accepte la poursuite du contrat après l’absence, il ne pourra pas engager une procédure de licenciement pour faute grave

Port de l’uniforme : des frais de nettoyage.

  • (mis à jour le 25/07/12)

Lorsque les salariés ont l’obligation de porter un uniforme dans le cadre de leurs fonctions, c‘est à l’employeur de prendre à sa charge les frais de nettoyage.

Il faut cependant que la dépense de nettoyage soit certaine.

Dans ces conditions, le Juge peut fixer le montant des frais dont l’employeur devait assumer la charge

(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 29 février 2012 N° de pourvoi: 10-17623 Non publié au bulletin Rejet )(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 juillet 2012 N° de pourvoi: 11-17121 Non publié au bulletin Rejet)

Rappelons pour mémoire, que le temps d’habillage et de déshabillage peut dans certains cas être indemnisé, lorsque le port de l’uniforme est imposé par l’employeur. 

 

Avocat à la Cour D'appel de Paris – droit du travail et droit des affaires – Expert SYNTEC- BETIC-CINOV