Tous les articles par Carole Vercheyre-Grard

Me Carole VERCHEYRE-GRARD est titulaire d’un DEA de droit des affaires et droit économique de l’université Paris II (Assas) de 1995. Elle possède une double compétence en droit des affaires et droit du travail. Sa connaissance du milieu judiciaire, lui permet une approche pragmatique des contentieux devant les Tribunaux de Commerce et le Conseil de Prud’hommes.

Des effets d’une démission rétractée

L’employeur doit être vigilant sur les réelles intentions d’un salarié qui démissionne.

En effet, la Cour de Cassation accepte dans certains cas qu’un salarié démissionnaire sur un coup de tête puisse se rétracter.

Cela peut avoir des conséquences importantes surtout lorsque le salarié est un salarié protégé.

Ainsi dans un arrêt du 26 octobre 2011 – n° pourvoi : 10-14-139, la Cour de Cassation a eu à trancher du cas d’une salariée qui avait démissionné de son poste puis s’était rétractée en invoquant son état de grossesse.

Dans cette affaire, l’employeur avait refusé la rétractation de la démission.

Or, la Cour de Cassation a considéré non seulement que la salarié pouvait revenir sur sa démission mais que de surcroît en sa qualité de salariée protégée, en raison de son état de grossesse, le refus par l’employeur d’accepter la réintégration constituait un licenciement abusif qui devait être annulé.

Or dans le cadre d’un licenciement nul, les conséquences sont bien plus drastiques pour l’employeur que s’il avait accepté la réintégration.

Il n’est donc pas inutile de rappeler une seconde fois que la démission pour être valable doit résulter d’une volonté claire et non équivoque de démissionner.

La Cour de Cassation par la présente décision estime qu’un salarié en état de grossesse est plus fragile et que sa volonté non équivoque doit être absolument vérifiée par l’employeur.

Du délai minimum entre l’entretien préalable et la lettre de convocation audit entretien

( mise à jour 20/08/2019)

L’article L.1232-2 du Code du Travail prévoit que le délai entre la convocation de l’entretien préalable et la tenue dudit entretien est de 5 jours ouvrables.

Ce délai permet au salarié de se faire assister par un Conseiller lors de l’entretien préalable au licenciement.

Le point de départ de ce délai de 5 jours débute le lendemain de la remise de la convocation à l’entretien préalable en mains propres ou de la 1ère présentation de la lettre recommandée o.

La Cour de Cassation estime depuis de nombreuses années que le jour de la remise de la lettre de convocation à l’entretien préalable ne doit pas être compté dans les délais des 5 jours ouvrables.

Le dernier jour du délai ne doit pas être un samedi, ni un dimanche, ni un jour férié sinon il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Cela signifie donc que le salarié doit bénéficier de 5 jours entiers pour qu’il puisse préparer sa défense.

L’arrêt de la Cour de Cassation en Chambre sociale du 14 décembre 2011 – n°pourvoi : 10.21242 donne une illustration de computation des délais.

Ainsi dans cette affaire, la lettre recommandée convoquant le salarié à un entretien au licenciement était datée du 14 novembre 2006 mais avait été présentée le 17 novembre 2006.

Si on retient les règles relatives aux délais de procédure, l’entretien préalable au licenciement ne pouvait avoir lieu avant le 23 novembre 2006.

Or, la lettre de convocation à l’entretien prévoyait un entretien au 22 novembre 2006, c’est donc à juste titre que la Cour de Cassation a considéré qu’il y avait une irrégularité de procédure faute de respect du délai de 5 jours.

Rappelons que cette disposition est une disposition d’ordre public, cela signifie qu’en aucun cas, le salarié ne peut renoncer au bénéfice desdites dispositions.

Voir également plus récemment : L’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 juillet 2019, 18-11.528, Inédit qui donne une illustration de computation des délais lorsque la convocation a été remise en main propre.

 

De la lenteur de la Justice

Il a fallu un an au Ministre de La Justice et des Libertés pour répondre à la question d’un député sur la lenteur de la Justice prud’homale.(Question N° : 97924).

La réponse est intéressante : Nos Ministres réfléchissent et se concertent…

Pendant ce temps, les délais des procédures ne cessent de s’allonger. 

Personnellement j’attends encore des décisions rendues en juin 2011 et qui n’ont toujours pas été notifiées à mes clients.

Nous savions que la Justice était une vieille dame qui aimait prendre son temps … mais si personne ne la bouge un peu, je crains qu’elle ne finisse paralysée.

Pour ceux qui sont intéressés, voici la question posée en janvier 2011 , sur le délai anormalement long de traitement des litiges devant les conseils de prud’hommes :

« M. Claude Bartolone interpelle M. le Garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le délai anormalement long de traitement des litiges devant les conseils de prud’hommes. 

Le Syndicat des avocats de France s’inquiète notamment des dysfonctionnements constatés à Bobigny, où trente-deux mois sont nécessaires à la tenue des audiences présidées par le juge départiteur, alors que l’article L. 1454-2 du code du travail prévoit, en pareille hypothèse, un délai d’un mois. 

De même, à Nanterre, les salariés ne peuvent espérer obtenir gain de cause devant le conseil de prud’hommes qu’à l’issue d’une procédure de deux ans. À Nanterre toujours, au mépris du délai légal d’un mois, plus d’une année d’attente est imposée au salarié sollicitant la requalification de son contrat de travail à durée déterminée. 

Devant les conseils de prud’hommes de Longjumeau et Melun, le délai de renvoi des affaires devant le bureau de jugement dépasse, désormais, treize mois.

À Meaux, il est constaté un délai de près de dix mois entre l’audience de plaidoirie et le prononcé du jugement. 

L’extrême lenteur de la procédure est également dénoncée devant les conseils de prud’hommes de Creil, Paris et Pau

Ce dysfonctionnement de la justice civile impacte, aujourd’hui, certaines chambres sociales de cours d’appel. Il est banal que la durée de la procédure devant la cour d’appel de Paris dépasse vingt-et-un mois.

À Versailles, compte tenu de l’encombrement de la juridiction d’appel, un salarié est parfois contraint d’attendre sept mois pour connaître le délibéré dans son affaire

Face à cette situation alarmante, le Syndicat des avocats de France rappelle que le droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable est un droit fondamental, reconnu par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et la loi française.

L’exigence de célérité est d’autant plus essentielle devant les juridictions du travail que celles-ci statuent sur des litiges dont le jugement impacte la vie quotidienne des salariés. 

Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour que le droit républicain d’obtenir une décision de justice dans un délai raisonnable soit effectivement garanti devant l’ensemble des conseils de prud’hommes »

Du lieu d’affichage des informations relatives aux élections professionnelles

En application des articles L. 2324-2 et L. 2314-2 du code du travail l’employeur doit informer le personnel par affichage de l’organisation des élections en vue de la désignation des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise.

Cette obligation s’impose dans les locaux de l’entreprise et dans ses établissements.

Elle s’applique aussi dans les locaux des entreprises clientes de l’employeuroù les salariés sont affectés.

Il importe peu que l’employeur ait plusieurs centaines de clients différents.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale par arrêt du 30 novembre 2011 N° de pourvoi: 11-11852 justifie sa position en retenant que les salariés mis à disposition chez des clients de leur employeur ont le même droit de bénéficier des affichages que les salariés dont le lieu de travail est l’entreprise de l’employeur.

L’employeur doit être très vigilant car l’inobservation de cette formalité entraîne la nullité des élections.

Calcul de l’ancienneté et période de suspension du contrat de travail

Pour calculer l’indemnité due au salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, il est important de déterminer si le salarié a ou non plus de 2 ans d’ancienneté.

Dans ce cas, l’ancienneté du salarié est la période pendant laquelle le salarié fait partie du personnel de l’entreprise.

Il importe peu que pendant cette période, il ait bénéficié de la suspension de son contrat de travail en raison d’arrêts maladie.

C’est le sens de l’arrêt de la Cour de cassation en sa chambre sociale en date 7 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-14156 Publié au bulletin Cassation partielle.

La consommation d’alcool au travail

Participer à un « pot » au bureau même non autorisé par l’employeur ne constitue pas forcément une faute grave.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale le 15 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-22712et N° de pourvoi: 10-22713 rend deux décisions sages sur cette question.

Il faut retenir de cette décision que la consommation modérée des boissons alcoolisées est autorisée :

– si elle reste exceptionnelle et 

– si le salarié ne se retrouve pas en état d’ébriété.

Compatibilité de la résiliation judiciaire et du licenciement postérieur

  • (mis à jour le 21/12/11)

Les salariés peuvent demander la résiliation judiciaire de leur contrat de travail en raison de faits qu’ils reprochent à leur employeur.

Dans ce cas et pendant toute la procédure de judiciaire, ils peuvent continuer à travailler à son service ou même à celui de tout entreprise repreneuse.

Si le salarié est licencié alors que la résiliation judiciaire n’est pas encore prononcée, la date de la rupture du contrat de travail lorsque les torts de l’employeur sont reconnus par le juge, sera automatiquement la date d’envoi de la lettre de licenciement.

Cour de cassation chambre sociale 7 décembre 2011 N° de pourvoi: 07-45689 Publié au bulletin 

« Mais attendu que lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service ou au service d’un nouvel employeur dans le cas d’un transfert de son contrat de travail en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, et qu’il est licencié ultérieurement, le juge doit rechercher si la demande était justifiée ; que si tel est le cas, il fixe la date de la rupture à la date d’envoi de la lettre de licenciement ;

Et attendu que la cour d’appel, qui a relevé que la salariée avait saisi le conseil de prud’hommes d’une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail le 17 avril 2003, et que le nouvel employeur l’avait licenciée le 10 février 2005, a, peu important le transfert du contrat de travail, exactement décidé qu’il y avait lieu de fixer à cette date la rupture des relations contractuelles . »

 

Le faux forfait jours de la convention collective SYNTEC

IMG_20140331_130251.2Mise à jour :  5 septembre 2019

Ils sont nombreux les salariés cadres du secteur tertiaire qui croient à tort bénéficier d’un forfait jours alors qu’en réalité ils sont soumis à un forfait d’heures. Ces salariés soumis à ces faux forfaits jours peuvent obtenir le paiement d’heures supplémentaires.

Mais souvent ils l’ignorent car leurs contrats de travail et leurs bulletins de paie indiquent souvent faussement  » forfait jours ».

En effet, la convention collective SYNTEC prévoit la possibilité pour les cadres consultants de ne pas suivre strictement un horaire prédéfini selon deux modalités distinctes:

– soit en autonomie complète en bénéficiant de la position 3 de la convention collective ou un salaire au double du plafond de la sécurité social : ce sont les vrais forfait-jours

– soit en autonomie plus modérée en bénéficiant d’un coefficient inférieur : ce sont les faux forfait jours

Les salariés ne bénéficiant pas de la position 3 ont leur temps de travail fixé en jours, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement « .

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