En tant qu’avocate en droit du travail, je suis régulièrement interrogée sur les droits des salariés pendant les périodes de suspension de leur contrat de travail, notamment lors d’un arrêt maladie ou d’un congé maternité.
La question est essentielle : que se passe-t-il lorsqu’un salarié est contraint de travailler durant ces périodes ?
Quelles sont les réparations possibles ?
Voici un décryptage à la lumière des principes juridiques et de la jurisprudence récente.
La suspension du contrat de travail : un principe fondamental
Le Code du travail et la sécurité sociale encadrent strictement les périodes de suspension du contrat de travail. Ces périodes, notamment celles correspondant à un arrêt maladie ou un congé maternité, impliquent que le salarié est dispensé de toute activité professionnelle :
- Pendant un arrêt maladie : le salarié est placé dans une situation de repos afin de se rétablir. L’employeur ne peut ni solliciter ni tolérer une quelconque activité professionnelle.
- Pendant un congé maternité : la loi interdit explicitement à l’employeur de faire travailler une salariée. Cette période est conçue pour protéger la santé de la mère et de l’enfant.
Ces protections visent à garantir que le salarié puisse pleinement se consacrer à sa santé ou à sa vie familiale. Cependant, dans la pratique, il arrive que des employeurs, consciemment ou non, sollicitent leurs salariés durant ces périodes.
Que dit la jurisprudence récente ?
La Cour de cassation, dans un arrêt du 2 octobre 2024, a réaffirmé des principes importants en la matière. Cet arrêt concernait une salariée contrainte de travailler pendant plusieurs arrêts maladie et son congé maternité.
Voici ce qu’il en ressort :
1⃣ Pas de rappel de salaire pour les heures travaillées
La salariée ne peut pas réclamer un paiement supplémentaire sous forme de rappel de salaire pour les heures effectuées. Pourquoi ? Parce qu’admettre un rappel de salaire reviendrait à régulariser une situation illégale et contraire aux prescriptions légales.
2⃣ Dommages et intérêts pour le préjudice subi
En revanche, le salarié a droit à des dommages et intérêts. La Cour a considéré que le fait de contraindre un salarié à travailler pendant la suspension de son contrat constitue une faute de l’employeur engageant sa responsabilité civile contractuelle. Ces dommages et intérêts visent à compenser le préjudice subi par le salarié.
Les enjeux pour les employeurs et les salariés
Pour les employeurs : vigilance accrue
Faire travailler un salarié durant un arrêt maladie ou un congé maternité constitue une infraction. Outre les dommages et intérêts qu’ils devront verser, les employeurs s’exposent également à des sanctions pénales dans certains cas, notamment en matière de congé maternité. Il est essentiel de respecter scrupuleusement les périodes de suspension des contrats de travail.
Pour les salariés : des recours à envisager
Si vous êtes contraint(e) de travailler durant ces périodes, sachez que vous avez des droits. Vous pouvez saisir le conseil de prud’hommes pour réclamer réparation du préjudice subi sous forme de dommages et intérêts. Cette démarche est d’autant plus importante que ces indemnités peuvent dépasser le montant des salaires qui auraient été dus.