L’insulte ne justifie pas systématiquement le licenciement

La Cour d’Appel de Versailles vient de rendre deux arrêts intéressants à l’égard de salariés ayant utilisé un langage fleuri à l’égard de leur supérieur.(Cour d’appel de Versailles 15ème chambre Audience publique du mercredi 7 septembre 2011 N° de RG: 10/02698 ;Cour d’appel de Versailles 15ème chambre Audience publique du mercredi 7 septembre 2011 N° de RG: 10/05356 ) 

Ces deux décisions, l’une en faveur du salarié l’autre en faveur de l’employeurrappellent qu’en cas d’injure proférée par le salarié à son employeur, la faute n’est pas systématiquement sanctionnable par un licenciement

Le contexte dans lequel intervient la ou les insultes proférées ainsi que l’ancienneté du salarié dans ses fonctions et son attitude antérieure doivent être pris en compte pour apprécier la proportionnalité entre la faute commise par le salarié et la sanction prononcée. 

–>Ainsi dans l’affaire N° de RG: 10/05356 , la Cour d’Appel a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié, qui avait pourtant insulté son supérieur hiérarchique en ces termes : «  » Pour moi t’es rien t’es une merde  » et avait déjà fait l’objet d’un avertissement antérieur pour des faits similaires survenus. 

La Cour d’Appel justifie sa décision en ces termes : 

« Considérant cependant qu’il résulte de l’attestation régulière en la forme de Monsieur D…, son ancien supérieur hiérarchique que durant toute la période où il avait travaillé avec Monsieur Idriss X… du 25 mai 2009 au 28 janvier 2010 il n’avait jamais eu aucune difficulté avec ce dernier qui était  » compétent et assidu à son poste de travail  » ; il précisait :  » tous les travaux que je lui ai confié ont toujours été accompli avec succès. En huit mois, il a cumulé environ 300 heures supplémentaires qui ont toujours été récupérées. Cela m’a confirmé son abnégation et sa solidarité envers tous ses collègues  » ; 

Qu’il apparaît dès lors qu’il existait un problème relationnel avec Monsieur Z… ; que certes Monsieur Idriss X… a commis le 5 mai 2010 une faute disciplinaire incontestable, qu’il devait être sanctionné, que néanmoins compte tenu des circonstances le licenciement pour cause réelle et sérieuse était excessif, une sanction de moindre importance pouvant être utilisée telle qu’une suspension temporaire du contrat de travail, le salarié ayant déjà eu un avertissement ; ce qui aurait eu l’avantage de laisser une chance à ce salarié de se reprendre sous le regard vigilant de son employeur . » 

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit le licenciement litigieux sans cause réelle et sérieuse.  » 

–>A contrario dans l’affaire N° de RG: 10/02698 la Cour d’Appel a estimé que le licenciement disciplinaire pour faute grave du salarié injurieux était justifié en appuyant sa motivation sur l’attendu suivant: 

« Considérant qu’en l’espèce les propos tenus a ses supérieurs hiérarchiques, Monsieur Z… et Monsieur Arnaud C…, tels qu' » enculé  » ne pensant qu’a  » enculer  » ses collaborateurs ou  » quant je ne serai plus dans l’entreprise cela se passera différemment  » qui ne sont pas vraiment contestés, démontrent une violence du salarié qui ne peut être toléré par un employeur, que venant s’ajouter au comportement antérieur et récurrent de Monsieur Mickael Y… ; il est suffisamment établi que le maintien dans l’entreprise de ce dernier était impossible y compris pendant la période de préavis . » 

En résumé, un écart de langage est certes sanctionnable mais pas toujours par un licenciement. 

De la tacite reconduction entre deux sociétés commerciales

Lors de la reconduction tacite d’un contrat entre deux sociétés commerciales, le prestataire de service n’a pas à informer son cocontractant par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu’il a conclu avec une clause de reconduction tacite. 

La Cour de Cassation vient de rappeler que le code de la consommation qui prévoit cette information en son article L. 136-1 du code de la consommationne concerne pas les contrats conclus entre sociétés commerciales et ce même si les cocontractants interviennent dans des domaines d’activités différents. 

Cour de cassation chambre commerciale Audience publique du mardi 6 septembre 2011 N° de pourvoi: 10-21583 Publié au bulletin 

 

La notion de travail effectif permettant l’acquisition de congés payés

Outre les jours de travail effectivement réalisés par le salarié, le Code du Travail prévoit qu’un certain nombre d’absences ouvre un droit à congés payés et sont assimilés à du travail effectif.

Ainsi de nombreuses absences justifiées telles que les congés payés, les repos légaux, les congés de formation, les accidents du travail, le service national, le chômage ainsi que d’autres absences peuvent être assimilés au temps de travail effectif.

Il faut retenir que ne donnent pas droit à congés payés:

1-les congés légaux non assimilés au travail effectif :

– le congé maladie, lorsque la maladie n’est pas une maladie professionnelle ou qu’elle dure plus d’un an,

– le congé de présence parentale totale,

– le congé de solidarité familiale,

– le congé de soutien familial,

– le congé parental d’éducation totale,

– le congé enfant malade,

– le congé solidarité internationale,

– le congé pour création d’entreprise,

– le congé sabbatique,

– le congé relatif à un accident de travail, lorsqu’il est supérieur à une année

– le congé relatif à un accident de trajet.

2- les absences pour convenance personnelle

3- le préavis non exécuté sur demande du salarié n’entraîne aucune acquisition de droit à congé.

4-Les cures thermales

5- les grèves

6- le chômage total ou le chômage partiel avec cessation d’activités ( contrairement au chômage partiel avec réduction d’horaires assimilé à du travail effectif et donnant droit à congés payés) .

Du droit à bénéficier de congés payés dès 10 jours de travail

L’article L.3141-3 du Code du Travail prévoit que tout salarié a droit à des congés payés si il a effectué au moins 10 jours de travail effectif lors d’un contrat de travail .

Il importe peu que les jours de travail réalisés par le salarié soit consécutifs, ni même que les jours de travail réalisés appartiennent à la même période de référence ouvrant droit à l’ouverture de congés payés.

En d’autre terme, un salarié qui a travaillé 10 jours dans une entreprise même s’il s’agit d’un jour par mois pendant 10 mois bénéficiera d’un droit à congés payés automatique.

Une proposition de Loi relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives a été déposée à l’Assemblée générale le 28 juillet 2011 et prévoit de supprimer la condition d’emploi de 10 jours pour obtenir le bénéfice de l’ouverture des droits à congés payés.

Cette proposition souhaite mettre les textes législatives français en conformité avec la jurisprudence européenne mais également avec la décision de la Cour de Cassation du 2 juin 2010 – n° 08/44834.

CONTESTER LA RUPTURE CONVENTIONNELLE

La rupture conventionnelle n’est pas un mode de rupture du contrat de travail aussi sécurisé qu’il y paraît.

 Les praticiens du droit du travail sont de plus en plus vigilants aux conditions dans lesquelles la rupture conventionnelle du contrat intervient afin de conseiller au mieux tant le salarié que l’employeur.

 Plusieurs décisions des Juges du fond (Conseil de Prud’hommes et Cour d’Appel), même si elles ne sont pas légions, ont accepté d’annuler des ruptures conventionnelles régulières en la forme en se fondant sur les notions de fraude, vice du consentement et cause illicite de l’accord des parties.

 La Cour de Cassation a également retenu en 2013 des cas d’annulations.

 Il ressort de ces décisions que les ruptures conventionnelles peuvent être annulées :

 1- Si le salarié se prétend à tort ou à raison victime de harcèlement moral, (Cour d’Appel de Nîmes 21 juin 2011 – 10/01617 ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 30 janvier 2013, 11-22.332, Publié au bulletin)

 2- si une mutation géographique ou professionnelle concomitante vient d’être proposée au salarié et que ce dernier l’a refusée. (Conseil de Prud’hommes de BORDEAUX dans une décision du 21 janvier 2011- 09/02938)

 3- Si il existe un différent entre l’employeur et le salarié ayant vicié le consentement d’un partie (sur l’insuffisance professionnelle : Cour d’Appel de RIOM en sa Chambre sociale par arrêt du 18 janvier 2001 – n°10/00658 ; sur des fautes du salarié, Conseil de Prud’hommes de Bobigny 6 avril 2010 ; CPH de Rambouillet, section commerce, n° RG 10/00042; Conseil de Prud’hommes de Valence, 25 novembre 2010 n° 09/00519 , Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.865, Publié au bulletin )

 4- si le salarié est inapte à son poste. (Conseil de Prud’hommes des SABLES D’OLONNE en date du 25 mai 2010 – registre n° 09/00068.) ou que son contrat de travail est suspendu.

 5- Si l’entreprise connait des difficultés économiques et que plusieurs salariés sont concernés par la rupture de leur contrat de travail (Rep Min

 6- l’absence de la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-27.000, Publié au bulletin )

 Les juridictions qui ont statué sur la nullité de la rupture conventionnelle ont limité la nullité aux effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui signifie que le salarié est en droit de prétendre à:

– une indemnité compensatrice de préavis,
– des dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,
– une indemnité conventionnelle de licenciement, déduction de celle versée au titre de la rupture conventionnelle
– d’une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou des dommages et intérêts pour licenciement abusif
– ainsi que des dommages et intérêts pour non respect des dispositions relatives au droit individuel à la formation.

Cependant, il convient de noter que certains commentateurs estiment que la nullité de la rupture conventionnelle conclue dans des conditions contraires à l’ordre public (pour contourner la loi), même si elle n’est prévue par aucun texte, doit avoir les mêmes effets que ceux que le Code du travail prévoit en cas de nullité du licenciement, à savoir la réintégration des droits, le paiement des salaires et les indemnités majorées si le salarié refuse de poursuivre son contrat. 

LICENCIEMENT ECONOMIQUE : le CSP remplace la CRP

La loi pour le développement de l’alternance et de la sécurisation des parcours professionnels du 28 juillet 2011 a remplacé depuis le 1er septembre 2011, la convention de reclassement personnalisée (CRP) et le contrat de transition professionnelle (CRP) par le contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

 Le CSP concerne tous les licenciés économiques travaillant dans les entreprises de moins de 1.000 salariés dès lors qu’ils justifient d’au minimum un an d’ancienneté et sont aptes à travailler.

 Comme pour la CRP, L’employeur doit informer personnellement chaque salarié concerné de l’existence et du contenu de le CSP lors de l’entretien préalable et par écrit dans un courrier remis contre récépissé.

 Le salarié dispose d’un délai de réflexion de 21 jours, pour accepter ou refuser ce dispositif.

 –>Le salarié licencié qui a accepté le dispositif est dispensé d’effectuer son préavis.

 Le demandeur d’emploi devient stagiaire de la formation professionnelle et s’engage à suivre un parcours individualisé d’une durée maximum de 12 mois et coordonné par Pôle emploi.

 En contrepartie, il perçoit une allocation compensant en partie la perte de son salaire durant la période couverte par le CSP égale à 80% de son salaire journalier de référence, allocation qu’il peut cumuler avec un emploi.

 Il a en effet la possibilité d’être embauché deux fois à titre temporaire pendant la durée de son CSP.

 Dans ce cas le CSP est suspendu pendant une durée maximale de 3 mois.

 –> L’employeur a dès lors l’obligation de verser le montant du préavis directement auprès du pôle emploi.

 Le site internet du pôle emploi propose des formulaires en ligne…. Vous pouvez également appeler le service employeur au 3995 pour obtenir l’envoi du dossier contenant le CSP ou imprimer le CSP que j’ai téléchargé dans les outils.

La déclaration unique d’embauche: mode d’emploi depuis le 1er août 2011

  • (mis à jour le 08/09/11)

En application de l’article R 1221-1 du Code du Travail modifié depuis 1er août 2011, les employeurs doivent remplir une déclaration unique qui sera obligatoirement préalable à l’embauche. 

Cette déclaration regroupe les informations contenues dans l’ancienne déclaration nominative préalable à l’embauche et la déclaration unique antérieure d’embauche qui complétait les déclarations préalables. 

Afin de faire cette déclaration préalable à l’embauche, l’employeur devra indiquer : 

– la dénomination sociale de l’entreprise ou ses nom et personne, 

– le code APE de l’entreprise, 

– son n° de SIRET, 

– le service de santé au travail dont dépend l’employeur, 

– les nom et prénom du salarié, 

– son sexe, 

– sa date et lieu de naissance, 

– son n° de sécurité sociale, 

– la date et l’heure de son embauche, 

– la nature du contrat de travail, s’il s’agit d’un CDD, sa durée, 

– le cas échéant, la durée de la période d’essai pour les CDI et pour les CDD qui excèdent 6 mois, 

En application de l’article R 1221-2 du Code du Travail, cette déclaration préalable à l’embauche permettra : 

– l’immatriculation au régime de sécurité sociale de l’employeur ( pour la première embauche) 

– l’immatriculation du salarié à la CPAM 

– l’affiliation à l’assurance chômage 

– la demande d’adhésion à un service de santé au travail ( pour la première embauche) 

– la demande d’examen médical du salarié 

En pratique, les employeurs effectueront la plupart du temps, la déclaration préalabled’embauche par voie électronique sur le site de l’URSSAF. 

Mais il convient de noter qu’il sera toujours possible de faire une déclaration unique d’embauche par lettre recommandée ou télécopie en conservant, soit l’accusé de réception remis par le télécopieur, soit l’accusé de réception de la Poste. 

De plus, depuis le 1er août 2011, lorsque le salarié bénéficiera d’un contrat de travail écrit accompagné de la mention de l’organisme destinataire de la déclaration (l’adresse de l’URSSAF), l’employeur ne sera pas obligé de transmettre une copie de la déclaration préalable à l’embauche à ce dernier. 

Enfin, il faut rappeler : 

– que l’employeur doit communiquer sa déclaration au plus tôt huit jours avant l’embauche 

– et au plus tard, 

—–s’il l’adresse par voie postale: la veille de l’embauche, 

—–s’il le fait par Internet, avant la prise de fonction du salarié

De la diminution des contrôles sur les CONVENTIONS ENTRE LES SOCIETES PAR ACTIONS ET LEURS DIRIGEANTS

Depuis la Loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit du 17 mai 2011, les conventions conclues entre un dirigeant (ou un actionnaire détenant plus de 10 % du capital) et la société, portant sur des opérations courantes conclues à des conditions normales ne sont plus considérées comme suspectes.

Dès lors, il n’y a plus d’obligation légale ni de les communiquer au Président du Conseil d’Administration ou du Conseil de surveillance, ni au Commissaire aux comptes, ni aux actionnaires.

Cela ne signifie pas que les dirigeants peuvent soustraire au regard des associés toutes les conventions.

Seules les conventions constituant :

– des opérations courantes

– et conclues à des conditions conformes aux prix et aux usages du marché auquel elles s’appliquent

sont concernées par cette  » absence de contrôle ».

Avocat à la Cour D'appel de Paris – droit du travail et droit des affaires – Expert SYNTEC- BETIC-CINOV