Des limites de la clause de mobilité

La clause de mobilité insérée dans un contrat de travail est une question qui donne lieu à un abondant contentieux.

Cette clause est assez contraignante pour le salarié car elle le conduit à accepter à l’avance que son employeur puisse modifier unilatéralement son lieu de travail.

C’est la raison pour laquelle la jurisprudence subordonne la validité de la clause de mobilité à la fixation d’une zone géographique précisément délimitée.

Néanmoins, cela n’offre pas un blanc-seing à l’employeur pour toute mutation dans cette zone.

« En effet nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »

Fort heureusement, la Cour de Cassation apporte des limites au pouvoir de l’employeur d’utiliser cette clause.

Ces limites sont de deux ordres :

  • la mauvaise foi de l’employeur dans l’application de la clause c’est-à-dire l’absence d’intérêt de l’entreprise
  • l’atteinte disproportionnée et injustifiée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale.

Récemment la Cour de Cassation a donné une illustration d’une mutation de l’employeur où ces deux questions se sont posées. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 28 juin 2023, 22-11.227, Inédit)

Dans cette affaire,un salarié employé d’une société de bâtiment en qualité d’ingénieur principal avait reçu de son employeur une mutation pour Cuba puis le Nigéria en application de sa clause de mobilité.

Le salarié avait refusé ces deux mobilités et avait été licencié.

Il avait saisi la juridiction prud’homale pour demander, notamment, une indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il estimait que la demande de mobilité de l’employeur était une atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale, au regard des nécessités de scolarisation de ses enfants.

Dans un premier temps la Cour de Cassation constate l’absence de mauvaise foi de l’employeur en relevant que l’entreprise avait des besoins spécifiques à Cuba et le Nigéria et que le salarié disposait des compétences techniques pour assumer les missions attachées à ce poste consistant à achever la bonne fin des chantiers en cours.

Mais dans un second temps, elle relève que l’absence de mauvaise foi de l’employeur ne suffit pas.

En effet, il faut vérifier si la mise en œuvre de la clause de mobilité ne portait pas atteinte aux droits du salarié à une vie personnelle et familiale et si une telle atteinte pouvait être justifiée par la tâche à accomplir et était proportionnée au but recherché.

L’arrêt de la Cour d’Appel a été cassé car la juridiction du second degré n’avait étudié l’atteinte aux droits du salarié à une vie personnelle et familiale.

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