Archives par mot-clé : faute grave

Des risques de travailler pendant son arrêt maladie

  • (mis à jour le 28/10/13)

Le salarié qui travaille pendant son arrêt maladie risque de perdre le bénéfice de ses indemnités journalières.

Peut-il également perdre son emploi?

La Cour de cassation, chambre sociale, 12 octobre 2011 N° de pourvoi: 10-16649 répond à cette question par un attendu de principe: « que l’inobservation par le salarié de ses obligations à l’égard de la sécurité sociale ne peut justifier un licenciement et que l’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt ; que pour fonder un licenciement, l’acte commis par un salarié durant la suspension du contrat de travail doit causer préjudice à l’employeur ou à l’entreprise « .

Il faut retenir que le salarié qui travaille pendant son arrêt maladie ne peut être licencié pour ce motif que si, pendant cette période, il a concurrencé son employeur…

(confirmation : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 octobre 2013, 12-15.638, Inédit )

L’interdiction de mettre en danger autrui s’applique à l’employeur et au salarié.

  • (mis à jour le 20/10/11)

La Cour de Cassation, chambre sociale, 4 octobre 2011, n° 10-18.862 vient de rappeler que la mise en danger par un salarié de ses collègues peut constituer une faute grave justifiant un licenciement.

En l’espèce, un salarié, chauffeur scolaire a été licencié pour faute grave le 2 mai 2007 pour comportement irresponsable et mise en danger de l’intégrité physique d’autrui. 

Il avait introduit son chien, sur le lieu de travail, et à l’intérieur de son véhicule automobile.

Ce dernier s’était échappé et avait mordu une salariée qui sortait de l’entreprise.

La Cour de Cassation conclut que le licenciement pour faute grave est justifié car le salarié avait commis un manquement à son obligation de ne pas mettre en danger, dans l’enceinte de l’entreprise, d’autres membres du personnel.

Voilà posé un juste équilibre :

– l’employeur a une obligation de sécurité-résultat à l’égard de ses salariés

– le salarié ne doit pas mettre en danger ses collègues 

Abus d’internet et faute grave

  • (mis à jour le 20/10/11)

L’utilisation de l’internet de l’entreprise à des fins personnelles peut-elle justifier un licenciement pour faute grave ?

OUI, répond la Cour de Cassation dans un arrêt de sa chambre sociale du 21 septembre 2011 N° de pourvoi: 10-14869.

Les faits de cette affaire étaient les suivants :

Un salarié passsait des heures entières sur des sites de ventes de véhicules (intégra. fr. « miseauto. com …), de jeux de « hasard (ptg. fr.), de rencontres (amoureux. com, …) et « pornographiques (plugin-x. com., alien-sexe. shop3x, club-mateur. com, sexfulove. com, sa-sex. com, club-sexyloo. com, sexy avenue. com …),

Il avait même téléchargé et envoyé sur une de ses adresses personnelles des vidéos pornographiques.

Pour masquer ses visites sur la toile, il avait téléchargé sur Internet un logiciel « drivecleaner » qui effaçait les traces de ses connexions.

L’employeur finit par découvrir le pot aux roses et le licencia pour plusieurs fautes graves dont – « avoir passé pendant votre temps de travail des heures entières à consulter sur Internet des sites qui n’ont aucun caractère professionnel. » relevant une attitude non professionnelle.

Le salarié tenta de soutenir que l’employeur n’avait interdit ce type de connexions ni par son règlement intérieur, ni par l’installation de filtres sélectifs sur l’ordinateur, ou encore qu’il ne serait résulté de leur consultation aucune gêne dans l’organisation du travail ni aucun préjudice pour l’employeur. 

La Cour de Cassation confirme la position de la Cour d’Appel en rejetant l’argumentation du salarié et valide le licenciement pour faute grave par cet attendu :

« Mais attendu que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; 

Et attendu qu’ayant constaté que le tableau des permanences de M. X… et la liste des heures de connexion sur les différents sites internet de l’ordinateur de l’agence révélaient que les heures de consultation des sites étaient celles où celui-ci s’y trouvait seul, chargé de la permanence téléphonique et que les sites les plus nombreux étaient les sites  » d’activité sexuelle et de rencontres « , le dernier site étant celui destiné au téléchargement d’un logiciel permettant d’effacer les fichiers temporaires du disque dur, la cour d’appel a pu décider que de tels faits, qui constituaient à eux seuls des manquements graves du salarié à ses obligations découlant du contrat de travail, étaient constitutifs d’une faute grave. « 

Cette solution est à rapprocher de celle rendue par la Cour de Cassation en matière d’utilisation du téléphone.

Rappelons cependant qu’une charte informatique permet souvent d’éviter de tels excès de connexions.

 

Des dangers d’une mise à pied informelle

La mise à pied qu’elle soit disciplinaire ou à titre conservatoire doit impérativement résulter d’un écrit signé de l’employeur .

Elle doit être soit remise en main propre soit adressée par lettre recommandée avec accusé de réception.

Aucune interdiction d’accès au lieu de travail du salarié ne peut être réalisée sans ce préalable.

La Cour de Cassation vient en effet dans un arrêt de sa chambre sociale du 21 septembre 2011 N° de pourvoi: 10-14927 de sanctionner un employeur pour avoir interdit l’accès au salarié de son lieu de travail avant notification d’une mise à pied.

Les attendus de l’arrêt sont édifiants : 

« la mesure de mise à pied conservatoire décidée par l’employeur n’avait pas encore été notifiée au salarié bien que celui-ci avait été empêché d’accéder à son lieu de travail dont les serrures avaient été changées et le digicode modifé par le nouveau responsable désigné qui lui avait ordonné de quitter l’entreprise ;

(…) l’employeur avait mis fin au contrat de travail en dehors de toute procédure régulière de sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse « 

Il ne faut pas confondre vitesse et précipitaion !

 

Prise d’acte de la rupture et calcul de l’ancienneté

  • (mis à jour le 11/10/11)

La prise d’acte de rupture par le salarié aux torts d’un employeur produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cela signifie que le salarié est en droit de prétendre à : 

– une indemnité de préavis 

– une indemnité de congés payés sur préavis

– une indemnité de licenciement

– des dommages et intérêts pour perte de chance d’utiliser les droits qu’il a acquis au titre du droit individuel à la formation 

– des dommages et intérêts pour licenciement abusif ou une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse selon son ancienneté et l’effectif de l’entreprise.

Un problème se pose cependant en pratique pour calculer l’indemnité conventionnelle de licenciement.

Faut-il retenir l’ancienneté à la date de la prise d’acte de la rupture par le salarié ou l’ancienneté acquise à la fin du préavis auquel le salarié pouvait prétendre?

La Cour de cassation,chambre sociale, par arrêt du 28 septembre 2011 N° de pourvoi: 09-67510 estime que la prise d’acte entraîne la cessation immédiate du contrat de travail de sorte que le salarié n’est pas tenu d’exécuter un préavis et que son ancienneté dans l’entreprise devait se calculer à la date de la rupture.

Particularisme de la prise d’acte de la rupture…

 

Utilisation du téléphone à des fins personnelles et faute grave

L’utilisation du téléphone à des fins personnelles peut-elle justifier un licenciement pour faute grave ?

La Cour de Cassation en sa chambre sociale vient de répondre positivement à cette question dans une décision du 22 septembre 2011 N° de pourvoi: 09-72876 .

Dans cette affaire, un salarié avait utilisé pendant ses heures de travail, le téléphone mis à sa disposition par l’entreprise pour contacter des plates-formes téléphoniques à caractère érotique.

L’employeur apportait la preuve :

– que cette situation avait perduré pendant plus d’un an 

– et que il avait sanctionné ces faits moins de deux mois avant que ils ne cessent.

La Cour de Cassation reconnait l’existence de la faute grave par un attendu de principe juridiquement fort intéressant sur le visa de l’article L. 1332-4 du code du travail :

« Attendu, cependant, que si aux termes de l’article susvisé, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d’un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s’est poursuivi ou s’est réitéré dans ce délai « .

C’est une jurisprudence classique mais qu’il n’est pas inutile de rappeler régulièrement.

L’insulte ne justifie pas systématiquement le licenciement

La Cour d’Appel de Versailles vient de rendre deux arrêts intéressants à l’égard de salariés ayant utilisé un langage fleuri à l’égard de leur supérieur.(Cour d’appel de Versailles 15ème chambre Audience publique du mercredi 7 septembre 2011 N° de RG: 10/02698 ;Cour d’appel de Versailles 15ème chambre Audience publique du mercredi 7 septembre 2011 N° de RG: 10/05356 ) 

Ces deux décisions, l’une en faveur du salarié l’autre en faveur de l’employeurrappellent qu’en cas d’injure proférée par le salarié à son employeur, la faute n’est pas systématiquement sanctionnable par un licenciement

Le contexte dans lequel intervient la ou les insultes proférées ainsi que l’ancienneté du salarié dans ses fonctions et son attitude antérieure doivent être pris en compte pour apprécier la proportionnalité entre la faute commise par le salarié et la sanction prononcée. 

–>Ainsi dans l’affaire N° de RG: 10/05356 , la Cour d’Appel a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié, qui avait pourtant insulté son supérieur hiérarchique en ces termes : «  » Pour moi t’es rien t’es une merde  » et avait déjà fait l’objet d’un avertissement antérieur pour des faits similaires survenus. 

La Cour d’Appel justifie sa décision en ces termes : 

« Considérant cependant qu’il résulte de l’attestation régulière en la forme de Monsieur D…, son ancien supérieur hiérarchique que durant toute la période où il avait travaillé avec Monsieur Idriss X… du 25 mai 2009 au 28 janvier 2010 il n’avait jamais eu aucune difficulté avec ce dernier qui était  » compétent et assidu à son poste de travail  » ; il précisait :  » tous les travaux que je lui ai confié ont toujours été accompli avec succès. En huit mois, il a cumulé environ 300 heures supplémentaires qui ont toujours été récupérées. Cela m’a confirmé son abnégation et sa solidarité envers tous ses collègues  » ; 

Qu’il apparaît dès lors qu’il existait un problème relationnel avec Monsieur Z… ; que certes Monsieur Idriss X… a commis le 5 mai 2010 une faute disciplinaire incontestable, qu’il devait être sanctionné, que néanmoins compte tenu des circonstances le licenciement pour cause réelle et sérieuse était excessif, une sanction de moindre importance pouvant être utilisée telle qu’une suspension temporaire du contrat de travail, le salarié ayant déjà eu un avertissement ; ce qui aurait eu l’avantage de laisser une chance à ce salarié de se reprendre sous le regard vigilant de son employeur . » 

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit le licenciement litigieux sans cause réelle et sérieuse.  » 

–>A contrario dans l’affaire N° de RG: 10/02698 la Cour d’Appel a estimé que le licenciement disciplinaire pour faute grave du salarié injurieux était justifié en appuyant sa motivation sur l’attendu suivant: 

« Considérant qu’en l’espèce les propos tenus a ses supérieurs hiérarchiques, Monsieur Z… et Monsieur Arnaud C…, tels qu' » enculé  » ne pensant qu’a  » enculer  » ses collaborateurs ou  » quant je ne serai plus dans l’entreprise cela se passera différemment  » qui ne sont pas vraiment contestés, démontrent une violence du salarié qui ne peut être toléré par un employeur, que venant s’ajouter au comportement antérieur et récurrent de Monsieur Mickael Y… ; il est suffisamment établi que le maintien dans l’entreprise de ce dernier était impossible y compris pendant la période de préavis . » 

En résumé, un écart de langage est certes sanctionnable mais pas toujours par un licenciement. 

les messageries informatiques d’entreprise et le droit au respect de la vie privée

La Cour de Cassation avait, au mois de février dernier, posé le principe selon lequel : « Le message, envoyé par le salarié aux temps et lieu du travail, qui est en rapport avec son activité professionnelle, ne revêt pas un caractère privé et peut être retenu au soutien d’une procédure disciplinaire. « 

La Cour de cassation chambre sociale du 5 juillet 2011 N° de pourvoi: 10-17284 adopte une autre solution lorsque les messages conservés par la salarié sur son ordinateur n’ont été ni enregistrés ni diffusés et qu’ils sont purement privés.

Elle estime en effet « que le salarié a droit, même au temps et au lieu du travail, au respect de l’intimité de sa vie privée ; que si l’employeur peut toujours consulter les fichiers qui n’ont pas été identifiés comme personnels par le salarié, il ne peut les utiliser pour le sanctionner s’ils s’avèrent relever de sa vie privée«  .

En résumé:

– des fichiers non identifiés comme personnels peuvent être consultés par l’employeur

– même si ils font référence à la vie privée du salariée

– mais l’employeur ne peut pas les utiliser pour sanctionner le salarié.

Du vol de documents par le salarié

(mise à jour 16/12/2014)

La jurisprudence traditionnelle des chambres sociale et criminelle estime que le salarié peut conserver une copie des documents dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, si lesdits documents sont nécessaires à la défense de ses intérêts. (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 novembre 2014, 13-84.414, Inédit)

Cependant, lorsque le salarié est parti de l’entreprise en emportant des documents qui ne peuvent lui servir pour faire valoir ses droits devant une juridiction prud’hommale, l’infraction pénale de soustraction frauduleuse de documents peut être retenue.

C’est l’enseignement de l’arrêt de la Cour de cassation en sa chambre criminelle le 21 juin 2011 N° de pourvoi: 10-87671 qui vient de juger :

« Attendu qu’en l’état de ces énonciations, nonobstant le motif inopérant cité à la seconde branche du moyen, d’où il ressort que les dossiers « cotation » n’ont pas été emportés par le prévenu pour assurer sa défense dans un dossier prud’homal, la cour d’appel a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu’intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et a ainsi justifié l’allocation, au profit de la partie civile, de l’indemnité propre à réparer le préjudice en découlant; »

Il faut retenir de cet arrêt :

– que le salarié n’est pas en droit de faire une copie de tous les documents de l’entreprise

– et que sa responsabilité pénale peut être engagée si il conserve des documents dont il n’a pas l’usage pour la défense de ses intérêts.

 

Du transfert des mails professionnels sur une messagerie personnelle

(Mise à jour le 16/12/2014)

Le salarié peut-il transférer des mails professionnels sur sa boite mail personnelle?

La Cour de Cassation vient de répondre favorablement à cette question par arrêt n° 3239 du 16 juin 2011 (10-85.079) – Cour de cassation – Chambre criminelle.

Cette décision reprend ainsi une jurisprudence traditionnelle des chambres sociale et criminelle qui estime que le salarié peut conserver une copie des documents dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, si lesdits documents sont nécessaires à la défense de ses intérêts. (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 novembre 2014, 13-84.414, Inédit)

L’intérêt de cette décision réside dans le fait que les documents sont dématérialisés.

En l’espèce, le salarié avisé du projet de son employeur de rompre son contrat de travail, avait transféré des mails dont il avait eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions et dont la production était strictement nécessaire à l’exercice de sa défense dans la procédure prud’homale qu’il a engagée peu après.

Il en avait parfaitement le droit.

Aucune qualification pénale de vol ou d’abus de confiance ne peut donc être retenue à l’égard du salarié.