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La consommation d’alcool au travail

Participer à un « pot » au bureau même non autorisé par l’employeur ne constitue pas forcément une faute grave.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale le 15 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-22712et N° de pourvoi: 10-22713 rend deux décisions sages sur cette question.

Il faut retenir de cette décision que la consommation modérée des boissons alcoolisées est autorisée :

– si elle reste exceptionnelle et 

– si le salarié ne se retrouve pas en état d’ébriété.

Faute grave : la pornographie et la zoophilie au bureau

Regarder un site pornographique ou zoophile au travail, ce n’est pas comme prendre un café ou faire une pause cigarette.

La Cour de Cassation vient d’en donner une nouvelle illustration dans un arrêt de sa chambre sociale en date du 23 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-30833.

Dans cette affaire un salarié, manifestement décomplexé, avait l’habitude de se connecter sur son lieu de travail sur des sites pornographiques et zoophiles.

Il n’hésitait pas à laisser des traces sur la toile en communiquant son numéro de téléphone professionnel.

Certaines associations de défense des animaux avaient alerté l’employeur et déposé plainte pour maltraitance.

Sans surprise, le salarié fut licencié par son employeur pour faute grave.

la Cour de Cassation confirme la décision de la Cour d’Appel qui avait refusé le recours du salarié en ces termes : 

« le salarié avait négligé ses fonctions en passant le plus clair de son temps de travail, pendant la période analysée du 7 au 23 mai 2007, à se connecter à des sites à caractère pornographique et zoophile et avait mis en ligne le numéro de son téléphone mobile professionnel sur de tels sites faisant ainsi courir un risque tangible à l’image de la société, (…)

De tels agissements rendaient impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et constituaient une faute grave « .

Il faut rappeler que l’utilisation de l’internet de l’entreprise ou du téléphone professionnel à des fins personnelles peut justifier un licenciement pour faute grave, surtout lorsque le travail du salarié est délaissé ou que l’image de l’employeur peut être atteinte.

Abus d’internet et faute grave

  • (mis à jour le 20/10/11)

L’utilisation de l’internet de l’entreprise à des fins personnelles peut-elle justifier un licenciement pour faute grave ?

OUI, répond la Cour de Cassation dans un arrêt de sa chambre sociale du 21 septembre 2011 N° de pourvoi: 10-14869.

Les faits de cette affaire étaient les suivants :

Un salarié passsait des heures entières sur des sites de ventes de véhicules (intégra. fr. « miseauto. com …), de jeux de « hasard (ptg. fr.), de rencontres (amoureux. com, …) et « pornographiques (plugin-x. com., alien-sexe. shop3x, club-mateur. com, sexfulove. com, sa-sex. com, club-sexyloo. com, sexy avenue. com …),

Il avait même téléchargé et envoyé sur une de ses adresses personnelles des vidéos pornographiques.

Pour masquer ses visites sur la toile, il avait téléchargé sur Internet un logiciel « drivecleaner » qui effaçait les traces de ses connexions.

L’employeur finit par découvrir le pot aux roses et le licencia pour plusieurs fautes graves dont – « avoir passé pendant votre temps de travail des heures entières à consulter sur Internet des sites qui n’ont aucun caractère professionnel. » relevant une attitude non professionnelle.

Le salarié tenta de soutenir que l’employeur n’avait interdit ce type de connexions ni par son règlement intérieur, ni par l’installation de filtres sélectifs sur l’ordinateur, ou encore qu’il ne serait résulté de leur consultation aucune gêne dans l’organisation du travail ni aucun préjudice pour l’employeur. 

La Cour de Cassation confirme la position de la Cour d’Appel en rejetant l’argumentation du salarié et valide le licenciement pour faute grave par cet attendu :

« Mais attendu que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; 

Et attendu qu’ayant constaté que le tableau des permanences de M. X… et la liste des heures de connexion sur les différents sites internet de l’ordinateur de l’agence révélaient que les heures de consultation des sites étaient celles où celui-ci s’y trouvait seul, chargé de la permanence téléphonique et que les sites les plus nombreux étaient les sites  » d’activité sexuelle et de rencontres « , le dernier site étant celui destiné au téléchargement d’un logiciel permettant d’effacer les fichiers temporaires du disque dur, la cour d’appel a pu décider que de tels faits, qui constituaient à eux seuls des manquements graves du salarié à ses obligations découlant du contrat de travail, étaient constitutifs d’une faute grave. « 

Cette solution est à rapprocher de celle rendue par la Cour de Cassation en matière d’utilisation du téléphone.

Rappelons cependant qu’une charte informatique permet souvent d’éviter de tels excès de connexions.

 

changement des affichettes pour l’interdiction de fumer

Le code de la santé publique prévoit en ses articles. L. 3511-7 et R. 3511-1 que l »employeur doit rappeler l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif à l’aide d’une signalisation spécifique .

Depuis l’arrêté de 2007, les affichettes signalant l’interdiction de fumer et les espaces fumeurs devaient être éditées ou imprimées conformément à l’annexe 3 dudit arrêté .

À compter du 11 mars 2011, les étiquettes changent.

L’employeur devra signaler les espaces fumeurs existant dans l’entreprise à l’aide d’une nouvelle affichette. 

Il convient cependant de noter que les signalisations éditées ou imprimées avant le 11 décembre 2010 et conformes aux modèles annexés à l’arrêté du 22 janvier 2007 (abrogé), restent valables.

Il n’est donc pas nécessaire de changer les affichages.

 

De l’utilité d’une charte informatique dans l’entreprise pour lutter contre le stockage d’images pornographiques

  • (mis à jour le 20/04/11)

ou l’affaire Coca Cola 

Un salarié travaillant chez Coca Cola, en qualité de commercial depuis plus de quinze années, conservait des fichiers pornographiques particulièrement vulgaires et dégradants sur son ordinateur portable à usage professionnel mis à sa disposition par l’employeur 

Il a été découvert sur le disque dur 480 fichiers rassemblant de multiples documents, aux formats les plus variés (films, diaporamas, fichiers audio, photos…) de nature : 

– érotique : publicité Aubade, calendrier Pirelli, photos de femmes dénudées…, 

– pornographique : photos de fellations, de sodomie, de partouzes, d’actes sexuels dans des positions multiples…, 

– sexiste : diaporamas mettant en cause les capacités intellectuelles de certaines catégories de femmes (les blondes) ou présentant leurs aptitudes professionnelles comme étant proportionnelles à leur tour de poitrine…, 

– malsaine : film d’une autopsie, photos de difformités humaines (femmes obèses montrées nues), images sadomasochistes (positions humiliantes), images zoophiles, photos urologiques (femmes menottées déféquant sur elles-mêmes…), – 

– pédo-pornographique : 3 photos sont particulièrement dérangeantes 

Face à cette situation, la société COCA COLA décida de se passer des services de ce sinistre individu en le licenciant pour faute grave. 

Le salarié contesta son licenciement arguant que le seul fait de ne pas avoir supprimé sur l’ordinateur portable qui lui avait été confié les messages tendancieux que lui auraient envoyés ses collègues de travail ne constituait pas une faute, dès lors qu’il n’a nullement été établi que ce stockage aurait perturbé d’une quelconque manière le fonctionnement du système informatique de la Société ou de son réseau intranet, ni qu’en agissant de la sorte, le salarié aurait entaché la réputation ou l’honneur de son employeur auprès des tiers. 

La Cour de Cassation par décision du 15 décembre 2010, dans son infinie sagesse refusa de faire droit à la demande du salarié dans cet attendu : 

« la cour d’appel, qui a relevé que l’utilisation de sa messagerie pour la réception et l’envoi de documents à caractère pornographique et la conservation sur son disque dur d’un nombre conséquent de tels fichiers constituaient un manquement délibéré et répété du salarié à l’interdiction posée par la charte informatique mise en place dans l’entreprise et intégrée au règlement intérieur, a pu en déduire que ces agissements, susceptibles pour certains de revêtir une qualification pénale, étaient constitutifs d’une faute grave et justifiaient le licenciement immédiat de l’intéressé «  

En conclusion, le droit et la morale ont fait cause commune dans cette affaire. 

En droit, il faut retenir de cet arrêt plusieurs enseignements : 

 l’existence d’une charte informatique protège l’entreprise d’éventuels salariés qui polluent les ordinateurs avec des fichiers nauséabonds 

– le licenciement du salarié peut être valablement prononcé pour faute grave dans ce cas 

– les salariés doivent absolument être vigilants quant aux mails tendancieux qu’ils reçoivent de leurs collègues et ne pas stocker ceux-ci 

La même solution aurait-elle été retenue par la Cour de Cassation , si l’entreprise n’avait pas eu de charte informatique ? 

Cela est vraisemblable dans le cas d’espèce dans la mesure où il y avait de très nombreux fichiers et certains fichiers avaient manifestement un caractère délictueux. 

Par contre, en l’absence de charte informatique, la solution aurait pu être différente pour des fichiers pornographiques non délictueux. 

En effet, la Cour de Cassation le 8 décembre 2009 a déjà jugé que : 

la seule conservation sur son poste informatique de trois fichiers contenant des photos à caractère pornographique sans caractère délictueux ne constituait pas, en l’absence de constatation d’un usage abusif affectant son travail, un manquement du salarié aux obligations résultant de son contrat susceptible de justifier son licenciement. 

PORT DU VOILE ET LICENCIEMENT

(mis à jour le 1/07/2014) – voir également l’affaire baby loup

La décision du Conseil des Prud’hommes de MANTES LA JOLIE du 13 décembre 2010 sur le licenciement d’une salariée qui refusait d’enlever son voile sur son lieu de travail a fait d’ores et déjà couler beaucoup d’encre.

Il n’est pas inutile de rappeler les faits de l’espèce.

Une association, qui avait pour objet l’accueil de la petite enfance, avait engagé la salariée en qualité d’Assistante Maternelle depuis de nombreuses années.

Le règlement intérieur du personnel de l’association avait prévu une stipulation spécifique précisant que dans l’exercice du travail, le salarié devait respecter et garder la neutralité d’opinions politiques et confessionnelles au regard du public accueilli tels que mentionnés dans les statuts.

Il convient en effet de noter qu’il s’agissait d’une crèche ayant une activité de service public puisqu’elle percevait 80 % de son budget par des subventions publiques.

En décembre 2008, la salariée revenant d’un congé parental s’est présentée à la crèche avec son voile.

Sa supérieure lui demanda immédiatement de retirer celui-ci, ce que la salariée refusa.

Elle refusa également d’accepter la mise à pied conservatoire en découlant et la convocation à l’entretien préalable qui lui était transmis le lendemain.

Parallèlement, elle se maintenait sur place, refusant de sortir de la crèche et de respecter la mise à pied transmise par son employeur.

C’est dans ces conditions que l’employeur l’a licenciée pour faute grave sur des motifs d’insubordination, d’obstruction et de menaces.

L’argumentaire soulevée par la salariée pour contester son licenciement reposait principalement sur la liberté de se vêtir à sa guise au temps et lieu de travail.

Elle s’appuyait notamment sur une décision du Conseil d’Etat qui estimait que le seul port du foulard ne constitue pas en lui même un acte de pression ou de prosélytisme (Conseil d’Etat – 27 nov.1996 – n° 170 209).

De même, elle invoquait des délibérations de la HALDE dont celle n°2009-22 du 26 janvier 2009 qui prévoyait que le port d’un vêtement répondant à une pratique religieuse ou manifestant l’appartenance à une religion, à un parti politique ou à un mouvement philosophique ne relevait pas en tant que telle d’un comportement prosélyte.

Le Conseil de prud’hommes s’appuyant sur la constitution qui précise en son article 1 que la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale et sur les statuts de l’association et son règlement intérieur a décidé que l’insubordination de la salariée était caractérisée :

– puisqu’elle n’avait pas respecté le règlement intérieur en refusant de retirer son voile malgré les demandes réitérées de la Direction.

-puisqu’elle a refusé de quitter les locaux de l’entreprise lors de sa mise à pied

Le licenciement pour faute grave de la salariée a donc été validé.

Le Conseil de Prud’hommes en tranchant la solution en ce sens, se rapproche de la décision rendue par la Cour de cassation en Chambre sociale le 28 mai 2003 lorsque cette dernière a rappelé que la liberté de se vêtir à sa guise n’entre pas dans la catégorie des libertés fondamentales et que l’employeur peut tout à fait estimer qu’une tenue vestimentaire est incompatible avec les fonctions et conditions de travail.

La Cour de Paris a également eu à statuer sur cette question le 16 mars 2010, n° 99-31 302 et a jugé qu’une vendeuse pouvait se voir interdire de porter un foulard dissimulant totalement son cou et la partie de son visage.

Ces décisions ne doivent cependant pas être considérées comme des décisions de principe puisque dans sa délibération n°209-117 du 6 avril 2009, la HALDE a rappelé que « la justification au cas par cas de la pertinence et de la proportionnalité de la décision au regard de la tâche concrète du salarié et du contexte devaient être appréciées afin de démontrer que l’interdiction du port de signes religieux et en dehors de toute discrimination proportionnelle est justifiée par la tâche à accomplir dans les circonstances de faits ».

En d’autres termes, le port du voile ne constitue pas systématiquement un motif de licenciement.

Cependant si le salarié est amené à travailler dans un secteur public et à recevoir du public, il est raisonnable de penser que les règles de laïcité inhérentes au secteur public peuvent permettre à l’employeur d’interdire le port du voile dans son règlement intérieur.

Il faut par ailleurs noter qu’en tout état de cause,  la loi du 11 octobre 2010 applicable à compter du 13 avril 2011 interdit le port du voile intégral dans les lieux publics pour les salariés qui sont amenés à exercer dans un espace public.

Il est vraisemblable que les juridictions prud’homales considèreront que dans le cas du voile intégral, le refus de l’enlever dans un espace public, constitue au moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.