Le DIF et la prise d’acte de la rupture.

  • (mis à jour le 01/06/11)

Le salarié qui prend acte de la rupture aux torts de l’employeur peut espérer – en cas de succès de son action judiciaire- obtenir une condamnation de son employeur au paiement au minimum:

– d’une indemnité de préavis

– d’une indemnité de congés payés sur préavis

– d’une indemnité de licenciement si il a plus d’un an d’ancienneté

– des dommages et intérêts pour licenciement abusif ou une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse selon son ancienneté et l’effectif de l’entreprise.

ET 

– des dommages et intérêts pour perte de chance d’utiliser les droits qu’il a acquis au titre du droit individuel à la formation ( DIF)

(Cour de Cassation en sa chambre sociale 18 mai 2011, n° 09-69175)

 Par contre, le salarié ne pourra pas bénéficier d’une indemnité pour irrégularité de la procédure, la Cour de Cassation spécifiant que cette indemnité en application de l’article L1235-2 du Code du Travail ne s’applique que dans le cadre du licenciement et non dans le cadre d’une prise d’acte.

Fumer sur son lieu de travail n’est pas une cause réelle et sérieuse de licenciement

  • (mis à jour le 01/06/11)

La Cour de Cassation par arrêt de sa chambre sociale du 18 mai 2011 N° de pourvoi: 09-42223 de vient de rendre une décision controversée.

Dans cette affaire, un salarié fumait pendant ses heures de travail et sur son lieu de travail.

La Cour de Cassation affirme que « fumer sur son lieu de travail et en dehors de temps de pause n’est pas nécessairement une cause de licenciement même si le contrat de travail l’interdit »

Elle confirme la décision de la Cour d’Appel qui avait considéré que le fait de fumer sur son lieu de travail ne constituait pas une faute du salarié, faute pour l’employeur de rapporter la preuve que fumer perturbait le fonctionnement de l’entreprise.

Pourtant l’employeur avait fait valoir de solides arguments en rappelant :

-qu’il pesait sur lui une obligation de sécurité de résultat, en ce qui concerne la protection de ses salariés contre le tabagisme dans l’entreprise, qui lui impose de prendreles mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs.

– qu’en l’état de cette obligation impérieuse pesant sur l’employeur, celui-ci est en droit de sanctionner par un licenciement toute infraction à l’interdiction de fumer dans les locaux de travail.

– que le salarié avait méconnu l’interdiction de fumer sur son lieu de travail qui lui avait été rappelée notamment dans son contrat de travail.

Aucun de ces arguments n’a été retenu par la Cour de Cassation. 

La situation pour les employeurs devient donc particulièrement ubuesque:

– d’une part, le code de la santé publique les oblige à faire respecter l’interdiction de fumer dans les locaux de l’entreprise.

– de l’autre part, la Cour de Cassation considère que le salarié ne peut pas être sanctionné par un licenciement si il fume régulièrement dans les locaux malgré l’interdiction de son employeur. Si l’employeur veut licencier son salarié, il doit rapporter une preuve matérielle d’une désorganisation de l’entreprise.

Nous espérons sincèrement qu’il s’agit d’un arrêt d’espèce, c’est-à-dire un arrêt rendu en tenant compte du contexte général de l’affaire jugée et non d’un arrêt destiné à prendre une position de principe sur la question.

En effet, l’effet pervers de la solution retenue par la Cour de Cassation dans l’arrêt du 18 mai 2011, pourrait conduire les employeurs à une discriminatoire à l’embauche entre les salariés fumeurs et non fumeurs

 

Contrat de travail : Clause de Mobilité et Mutation

  • (mis à jour le 01/06/11)

La clause de mobilité est celle par laquelle le salarié accepte, par avance, une modification de son lieu de travail. 

Toutes les clauses de mobilité ne sont pas valables.

Une telle clause doit, pour être applicable :

– être prévue par le contrat de travail signé par le salarié ou prévue par la convention collective (l’ajout d’une telle clause à un contrat de travail existant constitue une modification de ce contrat, qui doit être acceptée par le salarié).

– définir de façon précise sa zone géographique d’application.

– ne pas être mise en oeuvre de manière abusive ou déloyale par l’employeur.

La Cour de Cassation vient de rendre plusieurs décisions sur cette question.

—> Tout d’abord elle estime que la clause du contrat de travail qui prévoit que le salarié aura pour mission essentielle d’assurer la réparation, la maintenance, les interventions en atelier et sur site, en France et à l’étranger ne constitue pas une clause de mobilité.(Cour de cassation chambre sociale 18 mai 2011 N° pourvoi: 09-65065)

Dès lors le salarié est affecté sur un site précis où sont établis ses bulletins de paie et toute affectation en dehors du secteur géographique auquel il avait été rattaché, constitue une modification de son contrat de travail qu’il est en droit de refuser.

—>dans une deuxième affaireune clause de mobilité prévue au contrat de travail renvoyait à un accord d’entreprise de 1993, et exposait « qu’il pouvait être proposé au salarié d’autres affectations selon les conditions prévues à l’accord d’entreprise« .

Un nouvel accord d’entreprise du 24 novembre 2004, qui, selon son préambule, avait pour objet de se substituer de plein droit et dans tous ses effets à celui de 1993,disposait que la mobilité pouvait être à l’initiative du salarié ou de l’employeur et que seul le contrat de travail des salariés cadres pourra intégrer une clause de mobilité .

La salarié dont le poste était basé sur Marseilleavait refusé sa mutation à Boulogne-Billancourt.

Il avait été licencié par son employeur pour faute grave, son employeur considérant qu’il n’avait pas le droit de refuser sa mutation et qu’il s’agissait d’insubordination.

« Faux  » répond la Cour de Cassation, le salarié est en droit de se prévaloir de ce qu’il a personnellement accepté : c’est-à-dire uniquement l’accord de 1993. Or selon cet accord, l’employeur ne peut lui imposer une mutation mais simplement lui proposer. (Cour de cassation chambre sociale 18 mai 2011 N° de pourvoi: 09-72895).

—> Dans une troisième affaire, le salarié, directeur de Magasin, avait une clause de mobilité l’obligeant à accepter toute mutation « dans toute société ayant un lien juridique avec son employeur, en tout lieu géographique, en France ».

Il refusa de déménager de Saint Priest ( 69) à Coignière ( 78) et fut licencié.

La Cour de Cassation en chambre sociale 18 mai 2011 N° de pourvoi: 09-42232 confirme la décision de la Cour d’Appel qui avait jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

« Mais attendu qu’une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et qu’elle ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée ; que la cour d’appel, qui a fait ressortir que la clause de mobilité stipulée au contrat était formulée de manière générale et conférait à l’employeur le pouvoir de l’étendre à volonté, a légalement justifié sa décision ».

L’allongement du Congé- Maternité ?

  • (mis à jour le 01/06/11)

Aux termes du premier alinéa de l’article L. 1225-17 du code du travail, une femme exerçant une activité salariée a le droit de bénéficier d’un congé de maternité pendant une période qui commence six semaines avant la date présumée de l’accouchement et se termine dix semaines après la date de celui-ci.

Une proposition de loi visant à augmenter la durée du congé maternité est en cours de discussion au Sénat.

Cette proposition de loi intervient au moment où la Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen discutent la proposition de directivevisant à harmoniser les dispositions de prise en charge et d’accompagnement de la maternité dans les Etats membres de l’Union, où l’on constate des disparités importantes.

Le projet de loi français prévoit un congé maternité de 20 semaines, un maintien intégral du salaire et une adaptation des horaires de travail dès le retour de la salariée.

La commission d’examen des lois prône l’allongement de la durée du congé de maternité à dix-huit semaines et refuse la modification des horaires.

Elle estime qu » aller au-delà de 18 semaines de congés ne lui semble ni nécessaire ni souhaitable et ce, pour trois raisons :

– une durée de dix-huit semaines répond de manière suffisamment pertinente à l’objectif de santé de la mère et de l’enfant ;

– la durée du congé ne doit pas compromettre la réinsertion professionnelle, à court et à moyen terme, de la mère ;

– pour la mère qui souhaite rester plus longtemps auprès de son enfant, il existe d’autres instruments juridiques à sa disposition (congés prévus par les conventions collectives, congé parental…). »

Le projet de loi sera examiné en première lecture au sénat le 1er juin 2011.

Si vous souhaitez suivre l’évolution de cette loi, vous pouvez consulter le dossier législatif.

 

l’absence illicite d’institutions représentatives du personnel cause nécessairement un préjudice au salarié

La Cour de cassation en sa chambre sociale par arrêt du 17 mai 2011 N° de pourvoi: 10-12852 vient de condamner un employeur, qui n’avait pas organisé les élections du personnel, à verser des dommages et intérêts à un salarié . 

La Haute juridiction a statué en ces termes : 

« Vu l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, ensemble l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les articles L. 2323-1 et L. 2324-5 du code du travail et 1382 du code civil, l’article 8 § 1 de la directive 2002/ 14/ CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne ; 

Attendu qu’il résulte de l’application combinée de ces textes que l’employeur qui, bien qu’il y soit légalement tenu, n’accomplit pas les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause nécessairement un préjudice aux salariésprivés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts ; ».

 

Du licenciement pour dénonciation d’un harcèlement moral non prouvé

De nombreux salariés ont peur de porter plainte à l’encontre de leur employeur pour « harcèlement moral« . 

Certains craignent notamment de ne pas pouvoir prouver les faits de harcèlement et d’être licenciés pour avoir dénoncé lesdits faits sans preuve. 

La haute Juridiction facilite pourtant la preuve du harcèlement moral notamment en rappelant que la victime n’a pas à prouver l’intention du harceleur. 

La Cour de Cassation vient de faire encore un pas vers les victimes. 

En effet par arrêt de sa chambre sociale du mardi 17 mai 2011 N° de pourvoi: 09-71882,la Cour de Cassation refuse le licenciement d’une salariée qui avait dénoncé des faits de harcèlement moral sans pouvoir prouver la matérialité des faits

Il faut retenir de la décision de la Cour de Cassation: 

– le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi. 

– la mauvaise foi ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis. 

Des conséquences de l’absence de diplôme d’un salarié d’une profession réglementée

  • (mis à jour le 26/05/11)

Peut-on licencier pour absence de diplôme un salarié qui exerce une profession réglementée depuis plusieurs années en violation des règles légales ?

La Cour de Cassation a été saisie très récemment de cette question à propos d’une infirmière.

Les faits étaient très simples : 

La salariée a été engagée, à compter du 1er mars 2003, en qualité d’infirmière d’Etat par le groupe Les Doyennés Europe aux droits duquel vient la société Medica France bien qu’elle n’en avait pas le diplôme.

Le 30 novembre 2007, son employeur la mettait en demeure de lui transmettre son diplôme d’Etat d’infirmière ou une équivalence délivrée par la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS).

Bien évidemment, elle n’a pas pu présenter le diplôme qu’elle n’avait jamais eu.

Elle a été licenciée le 16 janvier 2008, au motif de l’impossibilité de continuer de l’employer au sein de l’établissement en application des textes réglementaires régissant le secteur d’activité.

La Cour de Cassation en sa Chambre Sociale en date du 18 mai 2011 N° de pourvoi: 09-68704 refuse un licenciement pour ce motif en rappelant que « l’employeur, qui avait eu connaissance dès l’origine de ce que la salariée n’était pas titulaire du diplôme ou de l’équivalence requis et qui avait poursuivi les relations contractuelles pendant cinq ans jusqu’à lui confier des responsabilités de cadre infirmier, ne pouvait valablement invoquer une réglementation à laquelle il avait lui-même contrevenu.« .

Sage décision basée sur une règle de droit civil : « Nemo auditur propriam turpitudinem allegans » (Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude) .

Exemple de dommages et intérêts pour absence de visite médicale

Attention les règles ont été modifiée en 2017.

La visite médicale d’embauche a été remplacée par la visite médicale d’information et de prévention.

–> avant 2017: la visite médicale d’embauche a entraîné la jurisprudence suivante

La Cour de Cassation estime que l’absence de visite médicale d’embauche ou en cours d’exécution du contrat de travail cause nécessaire un préjudice au salarié.

Il appartient aux juridictions de fond (Cour d’Appel et Conseil de Prud’hommes) de fixer celui-ci.

La Cour d’appel de Versailles en sa 15ème chambre par arrêt du 11 mai 2011 N° de RG: 10/03463 vient de condamner un employeur à 5. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale d’embauche et visites médicales de reprise.

Modification du Code du Travail : ajout de l’inaptitude dans les modes de ruptures autorisées du CDD

  • (mis à jour le 26/05/11)

C’est dans une loi  » pêle-mêle » du 17 mai 2011 ( loi n° 2011-525 ) que le contrat de travail à durée déterminée se voit offrir «  enfin » une nouvelle cause de rupture autorisée :

LE LICENCIEMENT POUR INAPTITUDE

Article L1243-1 du code du travail est désormais ainsi rédigé :

« Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail. »

Cette modification était très attendue. 

Il faut tout de même rappeler qu’en cas d’inaptitude constatée, l’employeur devra tout de même satisfaire aux obligations de reclassement.

Si l’employeur justifie de son impossibilité de proposer un emploi, dans les conditions prévues aux articles L. 1226-10 et L. 1226-11 du code du travail, au salarié déclaré inapte titulaire d’un tel contrat ou si le salarié refuse un emploi offert dans ces conditions, l’employeur est DESORMAIS en droit de procéder à la rupture du contrat

QUAND LA DISSOLUTION D’UNE SARL CAUSE UN PREJUDICE A L’ASSOCIE MINORITAIRE

  • (mis à jour le 26/05/11)

La Cour de cassation vient de rendre une décision intéressante en matière d’abus de majorité dans un arrêt de sa Chambre Commerciale du 8 février 2011 – n° 10-11788.

Dans cette affaire, l’associé majoritaire avait promis d’acheter à l’associé minoritaire l’ensemble de ses parts sociales.

Or, avant la réalisation de ladite cession, l’assemblée générale de la SARL avait décidé de dissoudre la société, ce qui rendait impossible l’acquisition des parts sociales de l’associé minoritaire.

Il convient de noter que l’associé majoritaire pouvait, grâce à la détention de ses parts sociales, prendre seul ladite décision.

La Cour d’appel avait estimé qu’il y avait manifestement un abus de majorité et condamné l’associé majoritaire à réparer le préjudice subi par l’associé minoritaire qui n’avait pas pu lui vendre ses parts.

La Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’Appel et caractérise l’abus de majorité en faisant observer que « la décision de dissolution avait été prise contrairement à l’intérêt social et dans l’unique dessein de permettre à l’associé majoritaire de se soustraire de ses engagements envers l’associé minoritaire ».

Il faut retenir de cette décision que même si l’associé majoritaire reste le principal décisionnaire de la société, il ne doit en aucun cas utiliser ce pouvoir pour nuire à l’associé minoritaire.