30 mois pour l’indemnité au titre de la méconnaissance du statut de DS ou RSS en cas de licenciement

La Cour de cassation change sa jurisprudence sur le montant de l’indemnité maximale due par l’employeur en cas de violation du statut protecteur contre le licenciement pour les représentants de la section syndicale (RSS), mais également pour les délégués syndicaux (DS) , (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mai 2019, 18-11.036, Publié au bulletin ,  Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mai 2019, 17-28.547, Publié au bulletin)

Le  représentant de la section syndicale ou le délégué syndical peut désormais  prétendre à une indemnité au titre de la méconnaissance du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu’à la fin de la période de protection dans la limite de trente mois. 

Voici l’attendu de principe : « Vu l’article L. 2411-1, dans sa rédaction applicable au litige et les articles L. 2411-3 et L. 2142-1-2 du code du travail ;

Attendu que le représentant de section syndicale qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de trente mois, durée minimale légale du mandat des représentants élus du personnel augmentée de six mois « . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mai 2019, 18-11.036, Publié au bulletin )

En fait, les juges alignent le droit à indemnisation du RSS (et du délégué syndical) sur celui de l’élu du personnel abusivement licencié et qui ne souhaite pas être réintégré qui bénéficie également d’un plafond de  30 mois.

Rappelons que si le délégué syndical (DS) et le représentant de la section syndicale (RSS) restent révocables à tout instant par leur syndicat, ce sont les élections professionnelles qui mettent fin aux mandats syndicaux. Il n’existe plus de mandats à durée indéterminée.

SYNTEC : précision sur la prime de vacances incluse dans le 13ème mois

mis à jour le 18/05/2021

Il y a de plus en plus de contrats de travail dans les entreprises soumises à convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseil, dite SYNTEC, qui prévoient que la prime de vacances est incluse dans le salaire voire dans le 13ème mois octroyé par l’employeur.

La Cour de Cassation a pu, à de nombreuses reprises, rappeler que l’employeur était en droit de prévoir cette modalité tant qu’il respectait les grilles de salaires prévues par la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseil, dite SYNTEC .

Néanmoins, il reste souvent une difficulté sur le quantum.

En effet, l’article 7.3 de la convention collective SYNTEC (ancien article 31 ) prévoit que l’ensemble des salariés doivent bénéficier d’une prime de vacances d’un montant au moins égal à 10 % de la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective de l’ensemble des salariés.

Dans une affaire récemment soumise à la Cour de Cassation, le contrat de travail d’un salarié prévoyait une rémunération de 12 mois à laquelle s’ajoutait un treizième mois calculé prorata temporis et payable pour moitié en juin et pour moitié en décembre, incluant la prime de vacances.(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 avril 2019, 18-10.014, Inédit)

La Cour d’appel avait considéré que ce treizième mois venait en plus de la rémunération sans constituer une modalité de versement du salaire et qu’il fallait le considérer comme une prime de vacances.

La Cour de Cassation sanctionne la Cour d’Appel en relevant que cette dernière aurait dû vérifier si les primes de treizième mois versées à l’ensemble des salariés représentaient au moins 10 % de la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective de l’ensemble des salariés. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 avril 2019, 18-10.014, Inédit)

Cette solution a été confirmée par un arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 mai 2021, 20-16.290, Inédit

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Rupture conventionnelle et Harcèlement moral

L’existence d’un harcèlement moral n’empêche nullement la signature d’une rupture conventionnelle valable.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale a en effet jugé qu’en l’absence de vice du consentement, l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la convention de rupture intervenue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 janvier 2019, 17-21.550, Publié au bulletin).

Cette décision de la Cour de Cassation est à rapprocher de la position qu’elle tient depuis 2014 en permettant aux salariés inaptes ou en arrêt maladie  de conclure une rupture conventionnelle.

Cette position permet aux salariés de trouver une issue rapide à une relation de travail qui, tant qu’elle existe, les maintient dans un état psychologique difficile et leur rend impossible d’envisager l’avenir.

Cela permet également à l’employeur de mettre fin à une situation souvent lourde qui lui semble inextricable et parfois incompréhensible.

Néanmoins, le harcèlement moral quand il existe, nuit grandement aux facultés du salarié d’appréhender l’ensemble des conséquences post rupture et il n’est pas rare qu’il accepte une rupture « au rabais » pour avoir la paix.

  • Il faut donc alerter les salariés sur la nécessité de prendre conseil avec un avocat si une rupture conventionnelle est proposée par l’employeur en parallèle d’une situation de harcèlement moral ;
  • L’employeur lui-même sera rassuré d’une telle démarche qui participe à la sécurité juridique de la rupture conventionnelle et permet de s’assurer du réel consentement du salarié.

 

 

Rupture conventionnelle et inaptitude à la suite d’un accident de travail

La Cour de Cassation, après avoir accepté les ruptures conventionnelles malgré une inaptitude simple, étend sa jurisprudence aux inaptitudes résultant d’un accident de travail. (Cass. soc., 9 mai 2019, n° 17-28.767)

Dans cette affaire, Mme K…  a été engagée par la société Arbor France, devenue la société AFR France, en qualité d’employée élevage et couvoir.

Victime d’un accident du travail, la salariée a été déclarée inapte à son poste de travail par deux examens des 1er et 16 avril 2014.

La salariée et l’employeur ont signé une convention de rupture le 25 avril 2014 non dénoncée dans le délai de rétractation de 15 jours et qui a été régulièrement homologuée par la DIRECCTE.

Quelques temps après, la salariée revenait sur son accord et saisissait le Conseil de prud’hommes aux fins de voir  annuler la rupture conventionnelle de son contrat de travail en invoquant qu’elle avait été conclue en méconnaissance des obligations spécifiques d’ordre public mises à la charge de l’employeur par les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail au profit du salarié régulièrement déclaré inapte à son emploi à la suite d’un accident du travail.

La Cour de Cassation rejette la demande de la salariée et retient :

« sauf cas de fraude ou de vice du consentement, non allégué en l’espèce, une convention de rupture pouvait être valablement conclue par un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident du travail « 

Temps partiel résultant d’un congé parental et calcul des indemnités de licenciement

A retenir : le calcul des indemnités de licenciement et de reclassement d’un salarié en congé parental à temps partiel doit être effectué sur la base de la rémunération à temps plein.

La Cour de justice de l’Union européenne vient en effet de publier un communiqué de presse n° 60/19, le 8 mai 2019 à propos d’un arrêt rendu dans l’affaire C-486/18 RE/Praxair MRC SAS très clair sur la question.

Outre les modalités de calcul de l’indemnité de licenciement et de reclassement du salarié à temps partiel  en raison d’un congé parental, elle précise qu‘une réglementation nationale contraire entraîne une discrimination indirecte en raison du sexe.

En l’espèce, une salariée est licenciée pour motif économique dans le cadre d’un licenciement collectif, à une période durant laquelle elle bénéficiait d’un congé parental à temps partiel. Elle conteste le licenciement ainsi que le montant de son indemnité de licenciement et celui de son allocation de congé de reclassement.

La Cour de cassation Française qui a été saisie du contentieux ( Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 juillet 2018, 16-27.825, Publié au bulletin) a décidé de soumettre plusieurs  questions préjudicielles à la Cour de justice afin de connaitre la compatibilité de la législation française avec les principes de non discrimination entre hommes et femmes de Traité de Fonctionnement de l’Union Européenne.

La Cour de Justice de l’Union Européenne démontre qu’il y a discrimination indirecte en raison du sexe lorsque l’application d’une mesure nationale, bien que formulée de façon neutre, désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de travailleurs d’un sexe par rapport à l’autre.

Elle juge qu’une telle mesure n’est compatible avec le principe d’égalité de traitement qu’à la condition que la différence de traitement entre les deux catégories de travailleurs qu’elle engendre soit justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

Elle expose que la Cour de cassation a indiqué, dans le cadre du renvoi préjudiciel, qu’un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes choisissent de bénéficier d’un congé parental à temps partiel, puisque, en France, 96 % des travailleurs prenant un congé parental sont des femmes.

Dans une telle hypothèse, une réglementation nationale, comme la réglementation française, n’est compatible avec le principe d’égalité de traitement qu’à la condition que la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins ainsi engendrée
soit, le cas échéant, susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

En conclusion,  la Cour de Justice a retenu qu’aucun facteur objectivement justifié n’était avancé par la France et a conclu que la réglementation en cause n’apparaissait pas conforme au principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et  travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur, tel que prévu à l’article 157 TFUE.