La formation du salarié est une obligation et non une faculté

L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail.

Cette règle, posée par l’article  L.6321-1 du Code du travail, constitue une réelle obligation de formation pour l’employeur et non une simple faculté. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 avril 2017, 15-28.640, Inédit)

IMG_20140923_132137Dans cette affaire, un ouvrier déclaré inapte au travail par le médecin du travail après 25 ans de travail dans la même entreprise avait saisi le Conseil de prud’hommes de plusieurs  griefs et  notamment d’une demande de dommages-intérêts pour non-respect par l’employeur de son obligation de formation.

La Cour d’appel de BASTIA, après avoir retenu que le salarié avait pu bénéficier d’une seule formation professionnelle de deux jours en 2011, constatait que l’employeur n’avait pas proposé d’autres actions de formation ou d’alphabétisation, visées par l’article L.6321-1 du Code du travail.
Elle refusait pourtant de faire droit à la demande du salarié en arguant que les actions de formation visées par l’article L.6321-1 du Code du travail n’avaient pas de caractère impératif et ne constituaient qu’une faculté de l’employeur.

Ce faisant, la Cour d’appel de BASTIA s’appuyait sur une partie de l’article L.6321-1 du Code du travail qui prévoit que l’employeur « peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme (…) » mais elle ignorait totalement la première partie de l’article L.6321-1 du Code du travail qui prévoit « l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. »

La Cour de Cassation ne suit pas cet argumentaire.

Elle retient au contraire :

« Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts du salarié pour non-respect par l’employeur de son obligation de formation, l’arrêt retient que les formations visées par l’article L. 6321-1 du Code du travail restent une simple faculté et non une obligation pour l’employeur ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation du salarié à son poste de travail et de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi pendant toute la durée de la relation de travail, la cour d’appel a violé le texte susvisé ». (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 avril 2017, 15-28.640, Inédit)

C’est une décision qu’il faut approuver.

Il  y a donc à la charge des employeurs une obligation de formation que l’on peut qualifier d’obligation de résultat. Ils ne peuvent s’en exonérer au motif que les formations participant au développement des compétences et à la lutte contre l’illettrisme ne seraient pas littéralement prévues comme une obligation dans le code du travail.

Il appartient donc à l’employeur d’apporter la preuve qu’il a effectivement mis à disposition de ses salariés des actions de formation dans le but d’atteindre les objectifs d’adaptation au poste et de maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi. 
Cette obligation de résultat n’implique pas la moindre demande du salarié.  Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 juin 2014, 13-14.916, Publié au bulletin; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 septembre 2015, 14-10.410, Inédit)

Dans tous les cas l’employeur qui n’aura pas pris soin de former son salarié sera automatiquement rendu responsable, et le salarié pourra lui demander une juste indemnisation de son préjudice.

Ce dernier étant très souvent la difficulté de retrouver un emploi en fin de carrière.

 

 

Un fait unique peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel

L’article L1153-1-2 du code du travail prévoit que les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers sont interdits.
IMG_20140923_132137La Cour de Cassation a été interrogée sur le point de savoir si un fait unique pouvait constituer du harcèlement sexuel.
La Haute Juridiction répond positivement et offre à une application stricte des textes légaux. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 mai 2017, 15-19.300, Publié au bulletin)
Aucun dérapage n’est acceptable!
La qualification de harcèlement sexuel ne nécessite pas la répétition d’agissements.
Dans cette affaire,  le président d’une association avait « conseillé » à sa salariée qui se plaignait de coups de soleil de « dormir avec lui dans sa chambre », « ce qui lui permettrait de lui faire du bien ».
La Cour de Cassation a considéré que la salariée établissait un fait qui permettait de présumer l’existence d’un harcèlement sexuel.
Ce faisant, elle donne tort à la Cour d’appel qui avait refusé de condamner sur ce point l’association et retient qu’un fait unique peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel.

L’expert comptable et la signature de la lettre de licenciement

La finalité même de l’entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent de manière absolue à l’employeur de donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour conduire la procédure de licenciement jusqu’à son terme.

2017-01-02-14-41-20L’Expert Comptable comme l’Avocat est une personne extérieure à l’entreprise.

Ils ne peuvent donc absolument pas apposer leur signature pour ordre sur la lettre de licenciement au nom de l’employeur.

Ce n’est malheureusement pas un cas d’école.

Rappelons que la procédure de licenciement qui serait conduite par l’expert-comptable de l’employeur, personne étrangère à l’entreprise, priverait le licenciement de cause réelle et sérieuse.

C’est ce que vient de rappeler la Cour de Cassation dans un arrêt de sa Chambre sociale, 26 avril 2017, 15-25.204, Publié au bulletin.

Voici un extrait des attendus :

« Vu l’article L. 1232-6 du code du travail ;

Attendu que la finalité même de l’entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l’employeur de donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour conduire la procédure de licenciement jusqu’à son terme ; qu’il s’ensuit que la signature pour ordre de la lettre de licenciement au nom de l’employeur par une telle personne ne peut être admise ;

Attendu que pour dire que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient qu’il est constant que c’est M. Z…, expert-comptable de la société Y…Agricola, qui a signé la lettre de convocation à l’entretien préalable, a mené l’entretien préalable de la salariée et a signé la lettre de licenciement, tous ces documents étant signés « pour ordre » par ce dernier, sous le nom de M. Y…Clemens ou A…Félix, gérants, que l’employeur justifie d’un mandat donné le 20 juillet 2011 à M. David Z…, expert-comptable, par M. Félix A…, gérant de la société Y…Agricola, « pour le représenter dans toutes les démarches de licenciement à l’égard de Mme Marie-José X…, pour le compte de la SCEA Y…Agricola », que si la finalité même de l’entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l’employeur de donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour procéder à l’entretien et notifier le licenciement, les documents comportant la mention « po » (pour ordre) ont la valeur de documents rédigés par la personne ayant le pouvoir de signature, qu’ainsi, la lettre de licenciement signée « pour ordre » au nom du gérant est valable, quand bien même l’identité de la personne signataire ne serait pas connue, dès lors que la procédure de licenciement a été menée à son terme, le mandat de signer la lettre de licenciement ayant été ratifié, qu’en l’absence de désapprobation du mandant (personne ayant la signature en temps normal) à l’égard des actes effectués par celui qui s’est comporté comme le titulaire d’un mandat apparent (le signataire), la lettre de licenciement est valable, qu’il en résulte que la procédure de licenciement diligentée à l’encontre de la salariée est parfaitement régulière ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la procédure de licenciement avait été conduite par l’expert-comptable de l’employeur, personne étrangère à l’entreprise, ce dont il résultait, nonobstant la signature pour ordre de la lettre de licenciement par cette personne à laquelle il était interdit à l’employeur de donner mandat, que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »

Vapoter au travail : entre liberté et interdiction !

Depuis janvier 2016, il est interdit de s’adonner au plaisir coupable de la cigarette électronique dans les locaux de travail fermés et couverts à usage collectif, c’est à dire dans certaines parties de l’entreprise (C. trav., art. L. 3513-6).

IMG_20150625_091759Mais le texte de loi ne prévoyait pas ni les lieux concernés  ni les sanctions.

Bref, une interdiction sur le papier … avec peu d’effet dans la pratique !

 Mais le gouvernement veille à l’essentiel (sic) …

Un décret du 25 avril 2017 vient de préciser les lieux de travail concernés par l’interdiction et sera applicable dès le 1er octobre 2017.

Il impose à l’entreprise de mettre en place une signalisation apparente et fixe les sanctions encourues par les salariés contrevenants et par l’employeur.

C’est désormais clair, il est interdit de vapoter dans les  open-space et les bureaux partagés.

Mais les salariés pourront  vapoter en toute tranquillité, sauf règlement intérieur contraire :

  • dans leurs bureaux individuels, sauf indication contraire du règlement intérieur ;
  • dans les locaux de travail accueillant du public : ces locaux sont expressément exclus par le décret.

Le salarié qui enfreindra cette interdiction s’exposera à l’amende pénale prévue pour les contraventions de 2e classe (c’est-à-dire une amende pouvant aller jusqu’à 150 €).

L’employeur devra rappeler l’interdiction de vapoter par une signalisation apparente. Il devra également rappeler les conditions d’application de cette interdiction dans l’enceinte des lieux, par voie d’affichage
A défaut, il encourra l’amende prévue pour les contraventions de 3e classe, soit une amende pénale pouvant aller jusqu’à 450 €.

 

 

SYNTEC : arrêt de travail et complément de salaire de l’employeur

mise à jour le 28 juin 2023

En cas de maladie ou d’accident (non professionnel) dûment constaté par certificat médical, les ingénieurs et cadres, qui ont au moins un an d’ancienneté, ont le droit d’exiger que leur employeur complète les sommes versées par la sécurité sociale afin de ne pas perdre de revenus.

IMG_20140331_121154C’est l’article 9.1 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 dite Syntec qui pose cette solution.( ancien article 43 avant la refonte de la convention collective)

Les indemnités versées par un régime de prévoyance auquel aurait fait appel l’employeur viendront également en déduction des sommes que doit reverser l’employeur.

Cette garantie est fixée à 3 mois entiers d’appointements.

Le maintien du salaire s’entend dès le premier jour d’absence pour maladie ou accident dûment constatés par certificat médical.

La Haute juridiction rappelle que  l’employeur ne devra verser que les sommes nécessaires pour compléter ce que verse la sécurité sociale, et éventuellement le régime de prévoyance, jusqu’à concurrence de ce qu’aurait perçu, net de toute charge, l’ingénieur cadre malade s’il avait travaillé à temps plein ou à temps partiel, non compris primes et gratifications.

Lorsque le salarié a une rémunération comportant une partie fixe et une partie  variable calculée annuellement, faut -il tenir compte de la partie variable? (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mars 2017, 15-23.276, Inédit)

La Cour de Cassation répond par l’affirmatif. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mars 2017, 15-23.276, Inédit)

L’employeur se voit imposer la même règle lors des congés maternité. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 février 2021, 18-25.348, Inédit)

L’employeur ne peut pas chercher à contourner cette règle en  rajoutant une condition sur la durée de l’arrêt de travail.

Voici l’attendu de l’arrêt du 15 mars 2017 concernant cette question:

« Vu l’article L. 2254-1 du code du travail, ensemble l’article 43 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 dite Syntec ;

Attendu qu’il résulte du second de ces textes se rapportant à l’incapacité temporaire de travail des ingénieurs et cadres, que l’employeur ne devra verser que les sommes nécessaires pour compléter ce que verse la sécurité sociale et éventuellement le régime de prévoyance jusqu’à concurrence de ce qu’aurait perçu, net de toute charge, l’ingénieur cadre malade s’il avait travaillé à temps plein ou à temps partiel, non compris primes et gratifications ;

Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes de compléments d’indemnités journalières pour la période d’avril 2008 à janvier 2009, l’arrêt retient que le contrat de travail et le plan de commissionnement stipulent un salaire annuel fixe de 32 500 euros et des commissions calculées annuellement selon facultés d’acomptes le mois suivant chaque trimestre et le solde le 30 janvier de l’année suivante, qu’il est précisé que pour les arrêts-maladie de moins d’un mois, il est référé à la rémunération fixe, que les réclamations pour les arrêts de moins d’un mois pendant le mois de juin 2008 au delà du salaire fixe ne sont pas fondées ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, alors que la convention collective ne distingue pas selon la durée de l’arrêt de travail, la cour d’appel, qui a fait prévaloir les stipulations moins favorables du contrat de travail pour exclure la rémunération variable du calcul du complément concernant les arrêts de travail d’une durée inférieure à un mois, a violé les textes susvisés ; « 

La Cour de Cassation inclut également les astreintes. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 mai 2017, 15-23.649, Publié au bulletin)

POSITION 3.1 DE LA CONVENTION COLLECTIVE SYNTEC

IMG_20140331_130251.3La position 3.1 de la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs conseils et des sociétés de conseils (Syntec) du 15 décembre 1987  ne nécessite pas que le salarié ait une position de commandement ou la  responsabilité de coordonner le travail d’autres cadres. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mars 2017, 15-19.958, Publié au bulletin)

La Cour de Cassation  adopte une position très claire en rappelant que les cadres classifiés en position 3 n’ont pas tous des fonctions de commandement. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 mars 2017, 15-19.958, Publié au bulletin)

Il faut en effet distinguer les positions  3.1 et 3.2 :

La décision de la Cour de Cassation n’est pas très surprenante si on prend le temps de lire la grille de classification de la convention  collective Syntec qui prévoit :

Position 3.1, Coefficient hiérarchique 170  » Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en œuvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef. »

 

Syntec forfait d’heures (modalité 2) : exemple de condamnation à verser le plafond de la sécurité sociale

mis à jour le 19 janvier 2021

La modalité 2 de l’accord cadre du 22 juin 1999 prévoit la possibilité de conclure avec un salarié dépendant de la convention collective SYNTEC,  un forfait de temps de travail de 38h30 par semaine sur 218 jours annuels (article 3 de l’accord).

IMG_20140331_130251Ce forfait d’heures repose sur une condition d’éligibilité : les ingénieurs ou cadres doivent percevoir au moins un salaire au plafond de la sécurité sociale de chaque année.

Dans les sociétés qui ont choisi de retenir cette modalité,  il est constant de nombreux salariés se voient appliquer la modalité 2 de l’accord cadre sans pour autant percevoir le salaire minimum.

Que peut faire le salarié ?

La Cour de Cassation a déjà répondu que le salarié qui ne perçoit pas le montant du plafond de la sécurité sociale n’est pas soumis au forfait d’heures et peut prétendre à un rappel de salaire pour les heures supplémentaires au-delà de 35 heures.

Mais le salarié peut-il demander à bénéficier du plafond annuel de la Sécurité sociale au lieu de soulever l’inopposabilité de cette modalité 2 ?

Cette question a été débattue en doctrine et ceux qui lisent mes chroniques savent que j’ai été favorable à cette solution.

La Cour d’appel de LYON, à l’instar de plusieurs juridictions du premier degré a admis cette solution (Cour d’Appel de Lyon 9 septembre 2016- 15/04050) sur un principe de droit que j’avais déjà développé :

Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude (nemo auditur propriam turpitudinem allegans).

 Voici la motivation de l’arrêt de la Cour d’appel de LYON :

« Qu’il appartient à la société, en concluant le forfait en heures, d’assurer au salarié la rémunération minimum prévue pour ce type de convention de forfait, à savoir un rémunération au moins égale à 115% du minimum conventionnel de sa catégorie, ce qui a été incontestablement respecté, mais aussi de lui fournir une rémunération au moins égale au plafond de la sécurité sociale ; que ces deux éléments relatifs à la rémunération constituent des conditions de formation d’une convention de forfait en heures «  réalisation de mission.

 Que le salarié est donc bien fondé à solliciter un rappel de salaires correspondant à la différence entre les salaires qu’il a réellement perçus et le plafond de la sécurité sociale. 

 Qu’il ne saurait d’ailleurs être admis que la société puisse se prévaloir de sa propre défaillance pour obtenir l’annulation de la convention de forfait du salarié. »

 Néanmoins, cette solution ne me semble plus soutenable aujourd’hui.

En effet, la jurisprudence actuelle retient que le salarié qui ne perçoit pas le montant du plafond de la sécurité sociale ne peut être soumis au forfait d’heures et peut prétendre à un rappel de salaire pour les heures supplémentaires au-delà de 35 heures. ( (Arrêt n° 1834 du 4 novembre 2015 14-25.745 ; 14-25.751 FS-P+B+R+I – Cour de cassation – Chambre sociale)

 

 

 

De l’absence de responsabilité pécuniaire du salarié qui conduit sans permis

Le principe en droit du travail est clair : la responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde.

IMG_20140506_101119C’est à dire d’une intention de nuire caractérisée de la part du salarié.

La Cour de Cassation vient de faire une illustration de ce principe dans une situation d’un salarié ayant conduit sans permis. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 janvier 2017, 14-26.071, Publié au bulletin) 

Dans cette affaire, l’employeur avait licencié son salarié  pour avoir conduit un véhicule de l’entreprise entre le 1er février et le 1er mars 2011 alors que son permis de conduire n’était plus valide, faute de renouvellement du certificat médical d’aptitude venu à expiration le 24 janvier 2011, faits constatés le 02 mars 2011 à l’occasion de la remise par le salarié d’un certificat médical régularisé.

La  matérialité des faits n’était aucunement contestée par le salarié qui se bornait à soutenir qu’il appartenait à l’employeur de veiller à la régularité du permis de conduire de son salarié et à prendre toutes dispositions utiles pour le soumettre en temps utile à la visite médicale permettant de vérifier son aptitude à la conduite des véhicules poids lourds.

Les juridictions de fond avaient validé le licenciement pour faute grave et condamné le salarié pour exécution déloyale du contrat de travail à indemniser l’employeur.

Selon la Cour d’appel, la condamnation du salarié résultait de l’exécution déloyale du contrat de travail en raison des risques qu’il avait fait courir à son entreprise.

La Cour de Cassation ne remet pas en cause la validité du licenciement pour faute grave mais estime que le salarié n’a pas engagé sa responsabilité pécuniaire à l’égard de l’employeur.

Voici la motivation de la Cour de Cassation :

« Vu le principe selon lequel la responsabilité pécuniaire d’un salarié à l’égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde ;

Attendu que pour condamner le salarié à payer à la société Axe froid une somme à titre de dommages-intérêts, l’arrêt retient qu’en exposant délibérément l’employeur aux conséquences gravissimes de la conduite d’un véhicule poids lourd de l’entreprise par un conducteur dépourvu de permis valable, ce salarié a exécuté de façon déloyale le contrat de travail ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle décidait, par un chef de dispositif que le rejet du premier moyen rend définitif, que le licenciement du salarié était fondé sur une faute grave, la cour d’appel, qui n’a pas retenu l’existence de faits, distincts de ceux visés par la lettre de licenciement, susceptibles de caractériser une faute lourde, a violé le principe susvisé ; » (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 janvier 2017, 14-26.071, Publié au bulletin) 

 

Travail au noir pendant un arrêt maladie : le salarié peut aussi être condamné au pénal

Sanctionner le « travail au noir » est actuellement un cheval de bataille important de l’Administration et de la Justice.
IMG_20150413_094121L’employeur est souvent condamné et le salarié rarement.
Cela ne signifie nullement que le salarié ne court aucun risque lorsqu’il a volontairement participé à la fraude pour violer la loi.
C’est ce que nous rappelle l’arrêt de la Cour de Cassation du 7 décembre 2016. (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 7 décembre 2016, 15-85.544, Inédit)
Le salarié en arrêt de travail pour maladie et exerçant parallèlement une activité au noir peut également être sanctionné par le Tribunal Correctionnel à même hauteur que l’employeur.

En l’espèce, un salarié électricien, placé en arrêt de travail pour maladie par son médecin traitant, a été contrôlé présent et actif sur le chantier de construction d’une villa appartenant à ce même médecin pendant son arrêt.

Les deux hommes ont naturellement été reconnus coupables de faits d’exécution d’un travail dissimulé et condamné à 5.000 euros d’amende chacun.

La caisse primaire d’assurance maladie interjetait alors appel de la décision, réclamant des dommages et intérêts relatifs à cette fraude.

Les deux hommes étaient alors condamnés au paiement solidaire d’environ 6.600 euros de dommages et intérêts et de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La Cour de cassation a confirmé la condamnation des deux hommes à l’égard de la CPAM pour le préjudice subi.

 

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 7 décembre 2016, 15-85.544, Inédit

La visite médicale au travail version 2017

Depuis le 1er janvier 2017 et en application de la » loi travail », les conditions du suivi individuel de l’état de santé des salariés au travail sont totalement modifiées.

IMG00176-20100722-1704Le Décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 relatif à la modernisation de la médecine du travail publié au Journal officiel le 29 décembre 2016 a transformé la visite médicale à l’embauche et les visites médicales périodiques.

Désormais tout travailleur a le droit à une visite médicale d’information et de prévention au cours des 3 mois suivant sa prise de poste,  sauf s’il en a déjà bénéficié au cours des 5 années précédentes,

Cette visite, réalisée par le médecin ou l’infirmier collaborateur du médecin du travail, a notamment pour objet :

  • d’interroger le salarié sur son état de santé ;
  • de l’informer sur les risques éventuels liés à son poste de travail ;
  • de le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre ;
  • d’identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail ;
  • de l’informer sur les conditions de suivi de son état de santé par le service et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d’une visite à sa demande avec le médecin du travail.

Le médecin du travail fixe la périodicité des visites médicales en fonction de chaque personne et selon les conditions de travail, l’âge, l’état de santé et les risques auxquels est exposé le salarié.

  • les visites périodiques seront plus espacées

Le délai entre chaque visite ne peut pas dépasser 5 ans. (contre 2 ans auparavant)

  • spécificité du suivi renforcé

Un suivi renforcé pour certains salarié continuera d’exister mais dans des conditions différentes.

Lorsque le médecin du travail constate que le travailleur est affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, un suivi individuel renforcé est mis en place.

Ce suivi renforcé comprend un examen médical d’aptitude, effectué par le médecin du travail préalablement à l’affectation sur le poste, qui se substitue à la visite d’information et de prévention.

Le délai maximum entre chaque visite médicale est réduit à 4 ans et une visite intermédiaire est effectuée par le médecin ou l’infirmier collaborateur du médecin du travail.

Des dispositions particulières sont prévues au bénéfice :

  • des travailleurs de nuit ;
  • des travailleurs âgés de moins de 18 ans ;
  • des femmes enceintes ;
  • des travailleurs handicapés ou titulaires d’une pension d’invalidité ;
  • des intérimaires.

Ces dispositions s’appliquent aux salariés de droit privé et aux agents de la fonction publique hospitalière.

 

Avocat à la Cour D'appel de Paris – droit du travail et droit des affaires – Expert SYNTEC- BETIC-CINOV