La consommation d’alcool au travail

Participer à un « pot » au bureau même non autorisé par l’employeur ne constitue pas forcément une faute grave.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale le 15 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-22712et N° de pourvoi: 10-22713 rend deux décisions sages sur cette question.

Il faut retenir de cette décision que la consommation modérée des boissons alcoolisées est autorisée :

– si elle reste exceptionnelle et 

– si le salarié ne se retrouve pas en état d’ébriété.

Compatibilité de la résiliation judiciaire et du licenciement postérieur

  • (mis à jour le 21/12/11)

Les salariés peuvent demander la résiliation judiciaire de leur contrat de travail en raison de faits qu’ils reprochent à leur employeur.

Dans ce cas et pendant toute la procédure de judiciaire, ils peuvent continuer à travailler à son service ou même à celui de tout entreprise repreneuse.

Si le salarié est licencié alors que la résiliation judiciaire n’est pas encore prononcée, la date de la rupture du contrat de travail lorsque les torts de l’employeur sont reconnus par le juge, sera automatiquement la date d’envoi de la lettre de licenciement.

Cour de cassation chambre sociale 7 décembre 2011 N° de pourvoi: 07-45689 Publié au bulletin 

« Mais attendu que lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service ou au service d’un nouvel employeur dans le cas d’un transfert de son contrat de travail en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, et qu’il est licencié ultérieurement, le juge doit rechercher si la demande était justifiée ; que si tel est le cas, il fixe la date de la rupture à la date d’envoi de la lettre de licenciement ;

Et attendu que la cour d’appel, qui a relevé que la salariée avait saisi le conseil de prud’hommes d’une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail le 17 avril 2003, et que le nouvel employeur l’avait licenciée le 10 février 2005, a, peu important le transfert du contrat de travail, exactement décidé qu’il y avait lieu de fixer à cette date la rupture des relations contractuelles . »

 

Le faux forfait jours de la convention collective SYNTEC

IMG_20140331_130251.2Mise à jour :  5 septembre 2019

Ils sont nombreux les salariés cadres du secteur tertiaire qui croient à tort bénéficier d’un forfait jours alors qu’en réalité ils sont soumis à un forfait d’heures. Ces salariés soumis à ces faux forfaits jours peuvent obtenir le paiement d’heures supplémentaires.

Mais souvent ils l’ignorent car leurs contrats de travail et leurs bulletins de paie indiquent souvent faussement  » forfait jours ».

En effet, la convention collective SYNTEC prévoit la possibilité pour les cadres consultants de ne pas suivre strictement un horaire prédéfini selon deux modalités distinctes:

– soit en autonomie complète en bénéficiant de la position 3 de la convention collective ou un salaire au double du plafond de la sécurité social : ce sont les vrais forfait-jours

– soit en autonomie plus modérée en bénéficiant d’un coefficient inférieur : ce sont les faux forfait jours

Les salariés ne bénéficiant pas de la position 3 ont leur temps de travail fixé en jours, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement « .

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Qui est mon employeur ?

Il peut y avoir une différence entre l’employeur mentionné sur le contrat de travail et l’employeur réel du salarié.

Dans les groupes, cela est plus fréquent qu’il n’y parait.

Les salariés ignorent souvent qu’ils ont des droits à l’égard de leurs co-employeurs.(celui sur le papier et celui qui donne les ordres et les paie) 

L’employeur est défini comme la personne pour le compte de laquelle le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles il verse une rémunération. 

La Cour de Cassation vient de condamner la société mère d’un groupe à prendre en charge les demandes des salariés d’une filiale.

(Cour de cassation chambre sociale 30 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-22964 10-22965 10-22966 10-22967 10-22968 10-22969 10-22970 10-22971 10-22972 10-22973 10-22974 10-22975 10-22976 10-22977 10-22978 10-22979 10-22980 10-22981 10-22982 10-22983 10-22984 10-22985 10-22994 )

Elle a fondé sa décision sur :

Une confusion d’activités, d’intérêts et de direction conduisant cette dernière à s’immiscer directement dans la gestion de la société fille et dans la direction de son personnel.

Elle a ainsi constaté qu’il existait entre les sociétés du groupe :

– une unité de direction sous la conduite de la société mère 

– que les décisions prises par la société mère avaient privé la société fille de toute autonomie industrielle, commerciale et administrative, au seul profit de la société mère du groupe, 

– que les choix stratégiques et de gestion de la société fille étaient décidés par la société mère ;

– la société mère assurait la gestion des ressources humaines de la filiale et avait imposé la cessation d’activité, en organisant le licenciement des salariés et en attribuant elle-même une prime aux salariés de la société fille ; 

– que le dirigeant de la société fille ne disposait plus d’aucun pouvoir effectif et était entièrement soumis aux instructions et directives de la direction du groupe, au seul profit de celui-ci; 

Cette décision participe à la reconnaissance de la notion de groupe en droit du travail.

Inaptitude définitive et le cas de force majeure

  • (mis à jour le 19/12/11)

La déclaration d’inaptitude physique définitive du salarié ne constitue pas un cas de force majeure rompant le contrat de travail.

La Cour de Cassation réaffirme ce principe dans un arrêt de sa chambre sociale 7 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-11301.

Dans cette affaire, M. X était pilote de ligne Air France .

Il avait été déclaré inapte définitivement aux fonctions de personnel navigant par le Conseil médical de l’aéronautique civile (CMAC).

Son employeur lui avait proposé un reclassement dans un poste au sol et son placement en situation d’attente non rémunérée.

Air France considerait en effet qu’il s’agissait d’un cas de force majeure, l’exonérant de son obligation de paiement du salaire du pilote.

Le pilote a refusé ce reclassement et avait été licencié pour perte de licence en raison d’une inaptitude physique.

Il a contesté l’absence de remunération antérieure à son licenciement.

Il a obtenu gain de cause.

Air france a donc du rémunéré le salarié pour la période d’attente .

La Cour de Cassation a refusé de considérer que la déclaration d’inaptitude physique définitive du salarié était un cas de force majeure.

De la protection du candidat aux élections des délégués du personnel ou du délégué syndical nouvellement désigné

  • (mis à jour le 15/12/11)

Le salarié, candidat à une élection professionnelle ou désigné représentant syndical n’a le statut de salarié protégé qu’à compter de la connaissance par l’employeur de sa candidature ou de son mandat.

Deux arrêts récents de la Cour de Cassation confirment cette solution en rappelant que si l’envoi de la convocation à l’entretien préalable est antérieur à la connaissance par l’employeur de la candidature ou du mandat, la procédure de licenciement est parfaitement valable sans qu’il n’y ait lieu de respecter la procédure spécifique aux salariés protégés.

Dans le premier arrêt de la chambre sociale du 6 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-18440, la salariée s’était portée candidate aux élections des délégués du personnel par une déclaration adressée à l’employeur le 20 février 2007 mais reçue par ce dernier le 26 février 2007 et avait été convoquée à un entretien préalable au licenciement par une lettre du 21 février 2007.

Dans la seconde affaire de la chambre sociale du 6 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-18071, le salarié de la société avait été convoqué à un entretien préalable au licenciement par lettre du 5 mars 2007 et avait été désigné en qualité de représentant syndical au comité d’entreprise suivant une lettre notifiée à l’employeur le 8 mars 2007.

Dans ces deux affaires les salariés ont été licenciés sans que l’inspection du travail n’ait été consultée.

La Cour de Cassation a validé lesdites procédures.

Elle précise cependant que ces procédures ne sont valables, que dans la mesure où les salariés n’ont pas apporté la preuve que l’employeur ait eu connaissance de l’imminence de la désignation ou de la candidature.

En effet, dans ce cas, les salariés auraient bénéficié du statut protecteur de salarié protégé et les licenciements intervenus auraient pu être annulés, faute d’autorisation préalable de l’inspection du travail.

les droits du salarié étranger

Le code du travail prévoit l’interdiction d’employer directement ou par personne interposée pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

Pourtant de nombreux étrangers en situation irrégulière ont un emploi en France souvent dans des conditions d’extrême précarité.

Le salarié qui est employé malgré cette interdiction a cependant des droits rappelés par l’articleL. 8251-1 du Code du travail :

Il a les mêmes droits à compter de la date de son embauche, qu’un salarié régulièrement engagé :

– les périodes d’interdiction d’emploi prénatal et postnatal et à l’allaitement, prévues aux articles L. 1225-29 à L. 1225-33 ;

– la durée du travail, le repos et les congés ; 

– les régles de santé et sécurité au travail ;

– la prise en compte de l’ancienneté dans l’entreprise.

– le droit de se voir remettre par son employeur les bulletins de paie, le certificat de travail et le solde de tout compte correspondant à la période d’emploi dans l’entreprise ; 

En cas d’emploi irrégulier, le salarié étranger a droit au titre de la période d’emploi illicite au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci et en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à un mois de salaire,sauf stipulations contractuelles plus favorables.

Ces dispositions ne font pas obstacle au droit du salarié de demander en justice une indemnisation supplémentaire s’il est en mesure d’établir l’existence d’un préjudice non réparé au titre de ces dispositions.

Le Décret n° 2011-1693 du 30 novembre 2011 relatif à la protection des droits sociaux et pécuniaires des étrangers sans titre et à la répression du travail illégal prévoit quelorsque des agents constatent l’emploi de salariés en situation irrégulière, ils doivent leur notifier :

– Leur droit aux salaires et indemnités mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 8252-2 ; 

-leur droit de se voir remettre par leur employeur les bulletins de paie, le certificat de travail et le solde de tout compte correspondant à la période d’emploi dans l’entreprise

– leur droit d’obtenir le recouvrement des salaires et des indemnités auprès de l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

– La possibilité, le cas échéant, de saisir la juridiction compétente en matière prud’homale aux fins d’obtenir le paiement des salaires et des indemnités, pour la partie non recouvrée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

– le droit de saisir également la juridiction compétente en matière prud’homale afin de réclamer des dommages et intérêts s’ils sont en mesure d’établir l’existence d’un préjudice non réparé au titre des dispositions de l’article L. 8252-2 du code du travail; 

– le droit de porter plainte contre une personne qu’ils accusent d’avoir commis à leur encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal et de pouvoir bénéficier à cet effet d’une carte de séjour temporaire durant la procédure, au titre de l’article L. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

– le droit à l’indemnité forfaitaire mentionnée au 2° de l’article L. 8252-2 ou celle prévue par l’article L. 8223-1, en cas d’emploi dans les conditions définies aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5. 

Notons que ce document doit être traduit dans les langues les plus couramment utilisées désignées par le ministre chargé de l’immigration. 

La Femme de Chambre et le Téléphone

Eh oui, je reconnais que le titre de ce billet est énigmatique…la décision de la Cour de Cassation beaucoup moins.

Une fois n’est pas coutume, voici la décision in extenso de la Cour de cassationchambre sociale Audience publique du mardi 6 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-20333 Non publié au bulletin Cassation 

« Sur le moyen unique : 

Vu les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ; 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X…, engagée le 1er octobre 2002 par la société Best Western-hôtel George Sand en qualité de femme de chambre, a été licenciée pour faute grave le 30 décembre 2004 ; 

Attendu que pour dire que le licenciement de Mme X… repose sur une faute grave et la débouter de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts, l’arrêt retient qu’elle avait été surprise en train de téléphoner à destination du Cameroun depuis une chambre inoccupée et que des appels au même numéro avaient été passés au cours du mois précédent ce qui avait contraint le client concerné à contester la facturation qui lui avait été imputée à tort 

Qu’en statuant ainsi, alors que l’utilisation épisodique du téléphone d’une chambre inoccupée pour des appels à l’étranger par une femme de chambre ne rendait pas impossible son maintien dans l’entreprise et ne constituait pas une faute grave, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 septembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée « 

Licenciement : attention à l’excès de pouvoir de l’expert comptable

mise à jour 24/05/2017

La Cour de Cassation est parfois saisie de situations tellement illicites que le juriste averti ne peut que s’interroger sur les raisons pour lesquelles les juridictions du fond n’ont pas tranché le litige conformément aux règles légales.

L’arrêt de la chambre sociale du mercredi 7 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-30222 en est un exemple frappant .

Dans cette affaire, le salarié avait été convoqué à un entretien préalable au licenciement par lettre signée du cabinet d’expertise comptable de l’entreprise.

Le gérant de l’entreprise avait bien réalisé en personne l’entretien mais la lettre de licenciement avait été également signée et adressée par l’Expert Comptable.

La Cour d’appel d’Angers par décision du 24 novembre 2009 n’y avait vu qu’une irrégularité de forme.

Fort heureusement, la Cour de Cassation casse cette décision et rappelle qu en application de L. 1232-6 du code du travail, la finalité même de l’entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l’employeur de donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour conduire la procédure de licenciement jusqu’à son terme.

Par conséquent, le Cabinet d’Expertise comptable étant une personne étrangère à l’entreprise, il ne pouvait conduire la procédure de licenciement ce dont il résultait que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Un cas d’école ?

Pas si sur…voici un nouveau cas (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 avril 2017, 15-25.204, Publié au bulletin)

contrat de cession de droits sociaux et protection du cédant salarié en cas de licenciement

La Cour de cassation en sa chambre sociale par arrêt du 1 décembre 2011 N° de pourvoi: 10-26064 traite d’une situation fréquente dans les TPE et PME : la protection du cédant de droits sociaux qui reste salarié dans l’entreprise.

En l’espèce, le Chef d’entreprise, associé avait cédé ses actions à un repreneur qui s’était engagé dans le contrat de cession d’actions à le salarier.

Pour se prémunir d’un éventuel licenciement intempestif, le cédant avait exigé qu’une clause du contrat de cession ( contrat commercial) prévoit qu’il ne pourrait être licencié qu’après consultation et vote du comité éditorial.

Quelques temps plus tard, le repreneur, faisait fi de ses engagements et licenciait le cédant devenu salarié sans consulter le comité éditorial.

La Cour de Cassation était interrogée sur le point de droit suivant : La non consultation du comité éditorial constitue-elle une irrégularité de forme ou rend-elle le licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

La décision de la Haute juridiction est limpide :

« lorsqu’une convention de cession d’actions à laquelle intervient l’employeur, prévoit que le cédant deviendra salarié de la société dont les titres sont cédés et que son licenciement, avant sa notification, devra être soumis à un vote de consultation du comité éditorial, le salarié est en droit de se prévaloir de cette clause dont le non respect rend son licenciement sans cause réelle et sérieuse ».

Il ne s’agissait donc pas d’un nullité de forme mais bien d’une nullité de fond.