Tous les articles par Carole Vercheyre-Grard

Me Carole VERCHEYRE-GRARD est titulaire d’un DEA de droit des affaires et droit économique de l’université Paris II (Assas) de 1995. Elle possède une double compétence en droit des affaires et droit du travail. Sa connaissance du milieu judiciaire, lui permet une approche pragmatique des contentieux devant les Tribunaux de Commerce et le Conseil de Prud’hommes.

Licenciement du salarié inapte et délais

  • (mis à jour le 19/11/11)

Les articles L1226-4 et L1226-11 du Code du Travail rappellent que l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour reclasser le salarié inapte et, si cela n’est pas possible, le licencier .

Ce délai d’un mois court à compter de l’avis d’inaptitude du salarié émis par le Médecin du Travail lors de la visite médicale de reprise.

La Cour de Cassation a précisé que l’employeur qui n’aurait pas adressé la lettre recommandée de licenciement à son salarié au terme du mois suivant l’avis d’inaptitude, est fautif.

Dès lors, le salarié est en droit de percevoir son salaire comme s’il travaillait dès l’expiration du délai d’un mois à compter de l’avis d’inaptitude (Cour de Cassation – Chambre sociale 12/10/2011 – n° 10-15258).

L’employeur doit donc être extrêmement vigilant et ne pas perdre de temps lorsqu’il reçoit un avis d’inaptitude pour convoquer le salarié à un entretien préalable dans les plus brefs délais.

En effet, s’il tarde à convoquer le salarié à un entretien préalable, il risque de ne pas pouvoir adresser la lettre de licenciement dans le délai d’un mois et dès lors, s’expose à devoir payer le salaire du salarié pendant la procédure.

De la validité d’une clause de mobilité du contrat de travail

  • (mis à jour le 19/11/11)

La clause de mobilité du contrat de travail est une disposition du contrat qui prévoit une acceptation anticipée par le salarié de la modification de son lieu de travail. 

La Cour de Cassation depuis plusieurs années est très sévère quant à la validité des clauses de mobilité insérées dans le contrat de travail.

Elle considère en effet que pour être valable, la clause doit:

– être acceptée par le salarié

– définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée. 

 ne pas porter atteinte au droit du salarié à une vie personnelle et familialesauf si cette atteinte est justifiée par la tâche à accomplir et si elle est proportionnée au but recherché.

Par arrêt du 9 novembre 2011 n°10-10320 de pourvoi, la Chambre sociale de la Cour de Cassation confirme sa position en estimant que le caractère prévisible pour un salarié de sa mutation ne saurait valider une clause de mobilité nulle en raison de l’indétermination de l’étendue géographique de la clause.

De la différence entre l’ancienneté dans son emploi et l’ancienneté dans l’entreprise

La formulation de la reprise de l’ancienneté dans le contrat de travail est fondamentale.

Un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 3 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-23202 illustre l’importance de la formulation.

Dans cette affaire, un salarié avait été engagé par la Fondation hôpital saint Joseph, le 10 novembre 1997, en qualité de chef de projet, administrateur de données, avec prise de ses fonctions le 12 janvier 1998.

Son contrat de travail prévoyait qu’il bénéficierait dans son emploi d’une ancienneté de 6 ans .

La Haute juridiction considère que l’ancienneté à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité conventionnelle de licenciement est celle du début du contrat et non celle de l’ancienneté dans l’emploi.

L’arrêt de la Cour de Cassation fait une différence entre l’ancienneté dans l’emploi et l’ancienneté dans l’entreprise par l’attendu suivant: 

« Qu’en statuant comme elle l’a fait, alors que le contrat de travail du salarié disposait qu’il bénéficierait à compter de la date de son engagement d’une ancienneté de six ans dans son emploi, et non dans l’entreprise, ce dont il résultait que la reprise d’ancienneté n’avait d’incidence que sur le calcul de la rémunération, la cour d’appel, qui l’a dénaturé, a violé les textes susvisés; » 

 

Rappel : Obligation stricte pour l’employeur de remettre au salarié l’attestation pôle emploi

  • (mis à jour le 25/07/12)

Il est obligatoire de remettre au salarié dont le contrat de travail est rompu tous les documents prévus par les articles L. 1234-19, L. 3243-2 et R. 1234-9 du code du travail soit : 

– un certificat de travail 

– une attestation d’assurance chômage 

– un bulletin de paie correspondant aux dernières sommes versées au salarié 

Selon, une jurisprudence constante, le préjudice subi par le salarié en cas de défaut de remise d’un de ces documents ou de remise tardive entraine nécessairement un préjudice pour le salarié et doit donner lieu à dommages et intérêts . 

Cette solution est rappelée par un arrêt de la Cour de cassation chambre sociale 26 octobre 2011 N° de pourvoi: 10-20112 à l’occasion de la remise tardive par l’employeur de l’attestation pôle emploi conforme.

Ces dommages et intérêts sont destinés à compenser notamment la difficulté pour le salarié d’obtenir les prestations chômages et un nouvel emploi. 

(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 juillet 2012 N° de pourvoi: 11-11709 Non publié au bulletin Cassation )

le taux horaire du salaire ne peut être modifié unilatéralement par l’employeur

  • (mis à jour le 12/11/11)

La Cour de cassation chambre sociale 3 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-11765rappelle une évidence:

L’accord du salarié doit être impérativement obtenu si l’employeur souhaite modifier le taux horaire applicable.

Il s’agit en effet d’une modification du contrat de travail .

Peu importe que cette modification n’ait entraîné aucune diminution de la rémunération mensuelle elle-même du salarié.

le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu entraîne la modification du contrat de travail

  • (mis à jour le 17/11/11)

Il faut rappeler que sauf atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos,l’instauration d’une nouvelle répartition du travail sur la journée relève du pouvoir de direction de l’employeur. ( Cour de cassation chambre sociale Audience publique du jeudi 3 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-14702 Publié au bulletin).

Cela signifie qu’il peut changer les horaires de son salarié sans son accord.

Cependant, l’employeur doit impérativement obtenir l’accord du salarié lorsqu’il souhaite transformer les horaires de travail de son salarié l’obligeant de passer d’un horaire continu à un horaire discontinu.

La Cour de cassation en sa chambre sociale Audience publique du jeudi 3 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-30033vient de rendre un arrêt de principe sur cette question.

Prise d’acte de la rupture et utilisation illicite d’un système de géolocalisation

  • (mis à jour le 12/11/11)

C’est de nouveau à l’occasion de la prise d’acte de la rupture par un salarié que la Cour de Cassation apporte une nouvelle illustration des limites du pouvoir de contrôle par l’employeur du temps de travail de son salarié. 

En l’espèce, un salarié commercial était soumis à un horaire de 35 heures par semaine mais disposait d’une liberté dans l’organisation de son travail. 

Son employeur lui avait notifié la mise en place d’un système de géolocalisation sur son véhicule afin de permettre l’amélioration du processus de production et des visites effectuées. 

L’employeur a alors cru pouvoir utiliser ce système de géolocalisation pour contrôler le temps de travail de son salarié et réduire sa rémunération. 

La salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur. 

La Cour D’Appel puis la Cour de Cassation chambre sociale 3 novembre 2011 N° de pourvoi: 10-18036 donne raison au salarié et sanctionne cette utilisation illicite de la géolocalisation par ces motifs: 

« Mais attendu, d’abord, que selon l’article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ; que l’utilisation d’un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail, laquelle n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen, n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail ; 

Attendu, ensuite, qu’un système de géolocalisation ne peut être utilisé par l’employeur pour d’autres finalités que celles qui ont été déclarées auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, et portées à la connaissance des salariés ; 

Et attendu que la cour d’appel a constaté, d’une part, que selon le contrat de travail, le salarié était libre d’organiser son activité selon un horaire de 35 heures, à charge pour lui de respecter le programme d’activité fixé et de rédiger un compte-rendu journalier précis et détaillé, lequel de convention expresse faisait preuve de l’activité du salarié, et, d’autre part, que le dispositif avait été utilisé à d’autres fins que celles qui avaient été portées à la connaissance du salarié ; qu’elle en a exactement déduit que cette utilisation était illicite et qu’elle constituait un manquement suffisamment grave justifiant la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur «  

Prise d’acte de la rupture et absence de reconnaissance par l’employeur de la qualification du salarié

Le salarié a toujours intérêt à contester sa qualification retenue par son employeur, si il estime que celle-ci n’est pas conforme à son poste et à sa convention collective.

En outre, si aucun accord n’est possible entre les deux parties, le salarié qui n’a pas bénéficié, depuis plusieurs années, de la classification à laquelle il pouvait prétendre et la rémunération y afférente peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

La Cour de Cassation vient de confirmer cette position par deux arrêts de sa chambre sociale du 13 octobre 2011 N° de pourvoi: 09-71574 et N° de pourvoi: 09-71702.

La prise d’acte de rupture par le salarié aux torts d’un employeur produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Des risques de travailler pendant son arrêt maladie

  • (mis à jour le 28/10/13)

Le salarié qui travaille pendant son arrêt maladie risque de perdre le bénéfice de ses indemnités journalières.

Peut-il également perdre son emploi?

La Cour de cassation, chambre sociale, 12 octobre 2011 N° de pourvoi: 10-16649 répond à cette question par un attendu de principe: « que l’inobservation par le salarié de ses obligations à l’égard de la sécurité sociale ne peut justifier un licenciement et que l’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt ; que pour fonder un licenciement, l’acte commis par un salarié durant la suspension du contrat de travail doit causer préjudice à l’employeur ou à l’entreprise « .

Il faut retenir que le salarié qui travaille pendant son arrêt maladie ne peut être licencié pour ce motif que si, pendant cette période, il a concurrencé son employeur…

(confirmation : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 octobre 2013, 12-15.638, Inédit )