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Licenciement nul : effet du refus du salarié de réintégrer l’entreprise

Lorsque le salarié peut se prévaloir d’une cause de nullité du licenciement, il a le choix de solliciter soit sa réintégration soit une indemnisation.

IMG_20140506_101304Ce n’est pas à l’employeur de prendre la décision, seul le salarié décide de l’axe de sa demande.

Lorsque le salarié peut valablement refuser de revenir dans l’entreprise malgré la demande de l’employeur, il doit obtenir une indemnisation.

La Cour de Cassation rappelle en effet que le salarié dont le licenciement est nul peut refuser la réintégration proposée par l’employeur sans qu’il en résulte renonciation à se prévaloir de la nullité de la rupture. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 avril 2015, 13-24.182, Publié au bulletin)

Ainsi, le délégué du personnel qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction.

Attention, la Cour de Cassation vient de limiter le montant de cette indemnisation à 30 mois  lorsque la cause de nullité du licenciement est l’absence d’autorisation du licenciement du délégué du personnel. ( Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 avril 2015, 13-24.182, Publié au bulletin Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 avril 2015, 13-27.211, Publié au bulletin )

Voici l’attendu :

« le délégué du personnel qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois  »

 

heures supplémentaires et travail dissimulé

Lorsque le salarié effectue de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées, il peut saisir le juge de plusieurs demandes : un rappel de salaire mais également des dommages et intérêts pour travail dissimulé.

 L’article L.8221-5 du Code du travail définit le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :(…)

 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie…»

La Cour de Cassation rappelle régulièrement que le travail dissimulé est constitué d’un élément matériel (notamment la dissimulation d’heures réalisées payées ou leur non paiement) et également d’un élément intentionnel.

–> L’élément matériel est rapporté par tout moyen par le salarié.

–> L’élément intentionnel

La Cour de Cassation facilite la caractérisation de l’élément intentionnel lorsque l’employeur avait appelé la salariée à effectuer de multiples tâches sans procéder au moindre enregistrement de ses horaires effectués. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, 13-17.900, Inédit)

La Cour de Cassation réaffirme ainsi que la charge de la preuve des heures de travail doit être partagée et que l’employeur qui refuse de noter le temps de travail est présumé le faire sciemment.

La qualification de travail dissimulé est très importante notamment en cas de rupture du contrat de travail.

En effet l’article L.8223-1 du même Code prévoit qu’« En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. »

 

Des copies informatiques du salarié

Le salarié  peut-il conserver une copie entière de son disque dur ?

Il est de jurisprudence constante que le salarié a le droit de conserver une copie des documents dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, si lesdits documents sont nécessaires à la défense de ses intérêts.

IMG00176-20100722-1704Il y a donc une limite à la copie du salarié: Le salarié doit prouver que les documents en cause étaient strictement nécessaires à l’exercice des droits de sa défense dans le litige qui l’opposait à son employeur à l’occasion de son licenciement. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 mars 2015, 13-24.410, Publié au bulletin)

Le salarié doit donc être prudent et savoir pourquoi il fait une copie des pièces..

En pratique ce n’est pas toujours possible.

Le salarié n’a pas toujours le temps de faire une sélection des pièces et fichiers dont il a besoin dans le cas d’une situation de conflit avec son employeur…

Il va alors faire une copie globale pour faire le tri des documents ensuite.

La copie de l’intégralité d’un disque dur va donc être plus difficile à justifier car il y a forcément des fichiers inutiles dans un ordinateur pour la défense du salarié.

Espérons que l’argument temporel soit suffisamment fort pour être entendu des juridictions de fond.

 

Heures de délégation et utilisation desdites heures au profit d’une autre entreprise

Les heures de délégation ont une vocation précise : permettre aux élus  d’exercer au mieux leur mission de représentant des salariés.

IMG_20140923_122333Ces heures sont rémunérées par l’employeur comme du temps de travail ce qui implique que les salariés élus les utilisent avec loyauté.

Le Conseil d’Etat vient de rappeler une évidence : «  l’utilisation par un salarié protégé de ses heures de délégation pour exercer une autre activité professionnelle méconnaît l’obligation de loyauté à l’égard de son employeur qui découle de son contrat de travail . « ( Conseil d’État, 4ème / 5ème SSR, 27/03/2015, 371174).

Outre une déloyauté à l’égard de l’employeur, l’utilisation des heures de délégations pour travailler pour une autre entreprise est également une déloyauté à l’égard des salariés de l’entreprise qui ont voté et qui font confiance à leurs élus.

Les élus locaux salariés deviennent des salariés protégés

La loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice par les élus locaux de leur mandat créé un  statut protecteur à certains élus locaux, titulaires d’un contrat de travail .

Les articles L. 2123-9, L. 3123-7 et L. 4135-7 du code général des collectivités territoriales sont modifiés et prévoient que les élus sont considérés comme des salariés protégés au sens du code du travail.

Attention tous les élus locaux ne sont pas concernés, sont protégés seulement :
– les maires ;
– les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins ;
– les membres d’un conseil d’arrondissement des communes de Paris, Marseille et Lyon ;
– les présidents des conseils départementaux et régionaux ;
– les vice-présidents ayant délégation de l’exécutif du conseil départemental et du conseil régional.

Les « simples » conseillers municipaux, départementaux et régionaux ne sont pas visés par la protection.

Illustration de la prise des RTT en cours de contrat de travail

La Cour de Cassation vient de rendre une décision intéressante quant au choix de la date de prise des RTT des salariés. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 mars 2015, 13-19.206, Publié au bulletin)

IMG00176-20100722-1704La Haute juridiction était saisie de deux questions :

1-  l’employeur peut-il imposer les jours de RTT que le salarié doit prendre si un accord collectif prévoit que lesdits jours sont posés à l’initiative du salarié ?

2- De même les RTT affectés à un CET ( compte épargne temps) peuvent -ils faire l’objet d’une décision unilatérale de l’employeur imposant la date de leur utilisation ?

La Cour de Cassation a répondu négativement à ces deux questions.

Sur le premier point, la Cour de Cassation précise que l’accord collectif prévoyait que l’employeur ne pouvait utiliser les JRTT individuels qu’avec l’accord exprès des salariés concernés.

Il apparaît donc cohérent de condamner l’employeur à payer une somme correspondant aux jours de repos prélevés indûment sur les JRTT individuels.

Sur le deuxième point, la haute juridiction retient que les repos inscrits dans un CET ne sont pris qu’à l’initiative du salarié.

Voici sa motivation :

« s’il résulte des dispositions des articles L. 3121-24 et D. 3121-10 du code du travail que l’employeur peut, en l’absence de demande du salarié de prise de la contrepartie obligatoire en repos, imposer à ce salarié, dans le délai maximum d’un an, le ou les jours de prise effective de repos, ces dispositions ne sont pas applicables aux jours de repos compensateur de remplacement affectés à un compte épargne-temps ;

Et attendu que le conseil de prud’hommes, qui a constaté que l’employeur avait pris la décision d’utiliser, sans l’accord du salarié, les repos de remplacement portés préalablement au compte épargne-temps ouvert et alimenté par ce salarié, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision. »

 

Rupture conventionnelle et maternité

Une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.  (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 mars 2015, 14-10.149, Publié au bulletin).

Comme pendant la période de suspension pour arrêt maladie à la suite d’un accident de travail, la Cour de Cassation permet le recours à la rupture conventionnelle.

Cette solution est cependant limitée aux situations où le consentement du salarié est libre et éclairé.

En effet, la Cour de Cassation rappelle que la fraude et le vice du consentement rendent illicite la rupture conventionnelle.

RTT et rupture du contrat de travail

mis à jour 14 avril 2016

Lors de la rupture du contrat de travail du salarié, sauf en cas de faute lourde, l’employeur doit verser au salarié une indemnité équivalente aux congés payés non pris mais qu’en est-il des RTT non pris ?

IMG_20140506_101321La Cour de Cassation vient pour la première fois de répondre à cette question dans un arrêt du 18 mars 2015. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 mars 2015, 13-16.369, Publié au bulletin) confirmé par une décision Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 mars 2016, 14-29.326, Inédit)

Selon la haute juridiction, l’absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n’ouvre droit à une indemnité que :

– si cette situation est imputable à l’employeur,

ou si un accord collectif le prévoit.

Cette solution diffère de la solution retenue pour les congés payés dont l’indemnisation est assurée dans tous les cas lors de la rupture du contrat hors faute lourde (articles L. 3141-22 à L. 3141-25 du code du travail).

Il faut donc retenir qu’en l’absence d’accord collectif,  pour obtenir le paiement des RTT, non pris,  le salarié doit montrer que l’employeur ne l’a pas autorisé à les prendre mais qu’il en a fait la demande pendant l’exécution de son contrat.

Cela va surement être difficile et conduire à la « perte sèche » des RTT non pris pour le salarié.

Qui des RTT acquis pendant une période de dispense de préavis ? (sur l’acquisition : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 avril 2009, 07-44.068, Publié au bulletin)

A mon sens, la dispense de préavis de l’employeur devrait permettre de considérer que les RTT acquis pendant le préavis doivent être indemnisés systématiquement car le salarié ne pouvait absolument pas les prendre.

 

 

Prise d’acte et harcèlement moral

Lorsque le salarié est victime de harcèlement moral, il peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur mais il doit être prudent.

IMG_20140923_122626Il faut que les manquements soient suffisamment graves et compromettent la relation contractuelle.

Le harcèlement moral et le harcèlement sexuel sont des faits graves qui peuvent – au moment où le salarié les subit – justifier une telle prise d’acte.

Mais peuvent ils justifier une prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur plusieurs mois après ?

La Cour de Cassation a déjà jugé que des faits anciens ne peuvent pas en principe justifier la prise d’acte de la rupture. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 mars 2014, 12-23.634, Publié au bulletin)

Néanmoins, elle refuse de donner une position de principe sur la question et renvoie cette question à un problème de fond que doit trancher la Cour d’Appel.

Il faut donc retenir que lorsque le salarié a été victime d’un harcèlement moral et/ou sexuel dans l’entreprise, la Cour d’Appel doit apprécier si ce manquement a empêché la poursuite du contrat de travail au jour de la prise d’acte. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 mars 2015, 13-18.603, Publié au bulletin).

Tout est donc possible …

Il faudra donc être convaincant et habile pour prouver comment un harcèlement ayant conduit à un arrêt de travail peut, plusieurs mois après, justifier une prise d’acte…