mis à jour le 1er juin 2018
La Cour de Cassation ne se prononcera plus sur l’existence ou non du harcèlement moral mais elle vérifiera que les juridictions de fond (Cour d’Appel et Conseil de Prud’hommes) ont bien respecté les règles de preuve pour prendre une décision.
C’est cette position que la Cour de Cassation vient de poser clairement dans une dernière décision sur le harcèlement moral rendue le 8 juin dernier. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 juin 2016, 14-13.418, Publié au bulletin)
Quelles sont ces règles que doivent respecter les juridictions de fond?
1– Vérifier que celui qui se prévaut d’un harcèlement apporte la preuve de faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement ;
2– Etudier les preuves fournies par l’employeur pour démontrer que lesdits faits ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
3- Etudier les mesures prises par l’employeur pour faire cesser le harcèlement.
Dans la décision du 8 juin 2016, les attendus de la Cour de Cassation sont clairs :
« Mais attendu qu’aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement ; qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Attendu qu’il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Attendu que, sous réserve d’exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement ;
Et attendu qu’après avoir exactement rappelé le mécanisme probatoire prévu par l’article L. 1154-1 du code du travail, la cour d’appel, qui sans se contredire, a souverainement retenu que la salariée établissait des faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral mais que l’employeur justifiait au soutien de ses décisions d’éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, a décidé, dans l’exercice des pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1154-1 du code du travail, qu’aucun harcèlement moral ne pouvait être retenu ; »
Une réflexion sur « Harcèlement moral : l’appréciation des faits à la charge des magistrats du fond »