Archives par mot-clé : insuffisance professionnelle

Quand la messagerie informatique personnelle du salarié sert à prouver la faute du salarié

Il est maintenant de jurisprudence constante que :

Les dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l’exécution de son travail sont présuméssauf si le salarié les identifie comme étant personnelsavoir un caractère professionnel de sorte que l’employeur peut y avoir accès hors sa présence.

L’employeur peut-il consulter les mails envoyés par le salarié de son adresse mail personnel de l’ordinateur de son bureau ?

La Cour de Cassation répond par l’affirmatif.

En effet, les courriels et fichiers intégrés dans le disque dur de l’ordinateur mis à disposition du salarié par l’employeur ne sont pas identifiés comme personnels du seul fait qu’il émanent initialement de la messagerie électronique personnelle du salarié. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 juin 2013, 12-12.139, Inédit)

Le salarié est donc prévenu …..

S’il utilise sa messagerie personnelle sur l’ordinateur de l’entreprise, il doit vérifier que tous ses envois sont identifiés comme personnels…

Signer une rupture conventionnelle dans une situation conflictuelle

  • (mis à jour le 21/01/14)

La Cour de Cassation a tranché !

L’existence d’un différend entre les parties au contrat de travail n’interdit pas la signature d’une rupture conventionnelle.

Mais la validité de ladite rupture conventionnelle est subordonnée à la preuve d’un consentement libre et éclairé des deux parties.

Or la validité du consentement est plus facilement contestable lorsqu’il existe un différend entre les parties.

La Cour de Cassation vient en effet de juger par un arrêt de principe que : « si l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties « . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.865, Publié au bulletin ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-23.942, Publié au bulletin )

La prudence dans l’utilisation de ce mode de rupture est donc vivement conseillée en cas de conflit latent ou ouvert entre les parties.

Affaire AIRBUS II : LE CHSCT doit être consulté sur les critères d’évaluation comportementaux.

  • (mis à jour le 29/09/11)

L’arrêt Airbus rendu par la Cour d’Appel de TOULOUSE en date du 21 septembre 2011 N° RG 11/00604 a rappelé le rôle bien distinct du CCE et du CHSCT.

En effet, dans cette affaire, la société AIRBUS avait cru pouvoir soumettre uniquement au CCE les critères qu’elle avait retenus pour évaluer les salariés.

« Insuffisant « répond la Cour d’Appel de TOULOUSE.

Elle a jugé que les critères d’évaluation devaient être soumis à la consultation préalable du CHSCT puisqu’ils intégraient des critères comportementaux professionnels représentant une part importante de l’évaluation, cette dernière étant susceptible de générer pour les salariés une insécurité et une pression psychologique entraînant des répercussions sur les conditions de travail.

La consultation du Comité Centrale d’Entreprise ne saurait en aucun cas se substituer à celle du CHSCT. 

 

AFFAIRE AIRBUS : DE L’ILLICEITE DES CRITERES D’EVALUATION DE SALARIES

  • (mis à jour le 29/09/11)

La Cour d’Appel de TOULOUSE vient de rendre le 21 septembre 2011 N° RG 11/00604 une décision illustrant parfaitement des limites autorisées pour évaluer le travail des salariés.

Dans cette affaire, les cadres de la société AIRBUS Opération recevaient chaque année une prime individualisée avec une partie fixe et une partie variable.

Cette partie variable tenait compte des éléments d’appréciation et d’évaluation sur les performances de chaque salarié qui faisait l’objet d’une évaluation selon des procédures en vigueur au sein de l’entreprise.

Lesdites procédures d’évaluation intégraient des critères comportementaux et plusieurs syndicats décidaient de saisir la juridiction aux fins de voir condamner la société AIRBUS pour des pratiques d’évaluation illicites.

La société AIRBUS imposait en effet à ses cadres un certain nombre d’objectifs mais afin de vérifier que lesdits objectifs étaient atteints, il était demandé à l’évaluateur de s’assurer que le salarié avait atteint ses objectifs, conformément aux valeurs de la société à savoir :

« 

– agir avec courage, 

– promouvoir l’innovation et livrer des produits fiables, 

– générer de la valeur pour le client, 

– favoriser le travail d’équipe et intégration au niveau mondial,

– faire face à la réalité et être transparent,

– développer ses talents et ceux des autres, « 

La Cour d’Appel de TOULOUSE a retenu que ces critères constituaient des critères comportementaux notamment celui intitulé « agir avec courage » qui selon la société AIRBUS impliquait de comprendre, partager la vision à long terme de manière censée et cohérente des actions par rapport à leur vision, de prendre des décisions justes et courageuses dans l’intérêt d’AIRBUS et d’en assumer pleinement les conséquences.

La Cour d’Appel a jugé que » l’appréciation du partage par le salarié de la vision à long terme et de l’appréciation de décision juste et courageuse étaient totalement subjectives et laissaient entendre que l’évaluation pourrait avoir une finalité disciplinaire, étrangère à la finalité de l’évaluation des aptitudes professionnelles ».

La Cour d’Appel en déduit que » sans entrer dans le détail de chacun des comportements issus de la valeur de l’entreprise, il apparait que certains d’entre eux ont une connotation morale qui rejaillit sur l’aspect personnel et qui constitue une appréciation trop subjective de l’évaluateur et souvent bien éloignée des aptitudes professionnelles des salariés« .

Dès lors, ces critères d’évaluation ne sauraient constituer des critères pertinents d’évaluation au sens de l’article L.1223 du Code du Travail.

Les règles de l’entretien d’évaluation

La jurisprudence reconnaît que l’employeur a le droit de pratiquer des évaluations qui relèvent de son pouvoir de direction.

L’entretien annuel d’évaluation est souvent redouté par les salariés qui craignent la partialité de leur employeur.

Or des règles limitent le pouvoir de l’employeur.

Rappelons que les méthodes et techniques d’évaluation des salariés doivent :

– être soumises à l’appréciation du CHSCT et du Comité d’Entreprise préalablement à leur mise en place dans l’entreprise.

– respecter la dignité des personnes dans le respect du principe de loyauté.

– Etre objectives et transparentes.

Cela signifie que le dispositif d’évaluation dont les critères restent flous et ne permettent pas de savoir si ce sont des compétences et des objectifs concrets qui sont jugés, est illicite 

– être pertinentes au regard de la finalité poursuivie ( article L1222-3 alinéa 3 du Code du Travail).

Il faut noter en effet que l’article L.1222-2 du Code du Travail prévoit que les informations demandées au salarié sous quelque forme que ce soit ne peuvent avoir comme autre finalité que d’apprécier ses aptitudes professionnelles.

Les informations demandées doivent donc présenter un lien direct et nécessaire avec l’évaluation de ses aptitudes.

Enfin et cela est primordial, Les résultats de l’évaluation doivent rester confidentiels entre l’employeur et le salarié.

 

CONTESTER LA RUPTURE CONVENTIONNELLE

La rupture conventionnelle n’est pas un mode de rupture du contrat de travail aussi sécurisé qu’il y paraît.

 Les praticiens du droit du travail sont de plus en plus vigilants aux conditions dans lesquelles la rupture conventionnelle du contrat intervient afin de conseiller au mieux tant le salarié que l’employeur.

 Plusieurs décisions des Juges du fond (Conseil de Prud’hommes et Cour d’Appel), même si elles ne sont pas légions, ont accepté d’annuler des ruptures conventionnelles régulières en la forme en se fondant sur les notions de fraude, vice du consentement et cause illicite de l’accord des parties.

 La Cour de Cassation a également retenu en 2013 des cas d’annulations.

 Il ressort de ces décisions que les ruptures conventionnelles peuvent être annulées :

 1- Si le salarié se prétend à tort ou à raison victime de harcèlement moral, (Cour d’Appel de Nîmes 21 juin 2011 – 10/01617 ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 30 janvier 2013, 11-22.332, Publié au bulletin)

 2- si une mutation géographique ou professionnelle concomitante vient d’être proposée au salarié et que ce dernier l’a refusée. (Conseil de Prud’hommes de BORDEAUX dans une décision du 21 janvier 2011- 09/02938)

 3- Si il existe un différent entre l’employeur et le salarié ayant vicié le consentement d’un partie (sur l’insuffisance professionnelle : Cour d’Appel de RIOM en sa Chambre sociale par arrêt du 18 janvier 2001 – n°10/00658 ; sur des fautes du salarié, Conseil de Prud’hommes de Bobigny 6 avril 2010 ; CPH de Rambouillet, section commerce, n° RG 10/00042; Conseil de Prud’hommes de Valence, 25 novembre 2010 n° 09/00519 , Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.865, Publié au bulletin )

 4- si le salarié est inapte à son poste. (Conseil de Prud’hommes des SABLES D’OLONNE en date du 25 mai 2010 – registre n° 09/00068.) ou que son contrat de travail est suspendu.

 5- Si l’entreprise connait des difficultés économiques et que plusieurs salariés sont concernés par la rupture de leur contrat de travail (Rep Min

 6- l’absence de la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-27.000, Publié au bulletin )

 Les juridictions qui ont statué sur la nullité de la rupture conventionnelle ont limité la nullité aux effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui signifie que le salarié est en droit de prétendre à:

– une indemnité compensatrice de préavis,
– des dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,
– une indemnité conventionnelle de licenciement, déduction de celle versée au titre de la rupture conventionnelle
– d’une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou des dommages et intérêts pour licenciement abusif
– ainsi que des dommages et intérêts pour non respect des dispositions relatives au droit individuel à la formation.

Cependant, il convient de noter que certains commentateurs estiment que la nullité de la rupture conventionnelle conclue dans des conditions contraires à l’ordre public (pour contourner la loi), même si elle n’est prévue par aucun texte, doit avoir les mêmes effets que ceux que le Code du travail prévoit en cas de nullité du licenciement, à savoir la réintégration des droits, le paiement des salaires et les indemnités majorées si le salarié refuse de poursuivre son contrat. 

Du vol de documents par le salarié

(mise à jour 16/12/2014)

La jurisprudence traditionnelle des chambres sociale et criminelle estime que le salarié peut conserver une copie des documents dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, si lesdits documents sont nécessaires à la défense de ses intérêts. (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 novembre 2014, 13-84.414, Inédit)

Cependant, lorsque le salarié est parti de l’entreprise en emportant des documents qui ne peuvent lui servir pour faire valoir ses droits devant une juridiction prud’hommale, l’infraction pénale de soustraction frauduleuse de documents peut être retenue.

C’est l’enseignement de l’arrêt de la Cour de cassation en sa chambre criminelle le 21 juin 2011 N° de pourvoi: 10-87671 qui vient de juger :

« Attendu qu’en l’état de ces énonciations, nonobstant le motif inopérant cité à la seconde branche du moyen, d’où il ressort que les dossiers « cotation » n’ont pas été emportés par le prévenu pour assurer sa défense dans un dossier prud’homal, la cour d’appel a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu’intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et a ainsi justifié l’allocation, au profit de la partie civile, de l’indemnité propre à réparer le préjudice en découlant; »

Il faut retenir de cet arrêt :

– que le salarié n’est pas en droit de faire une copie de tous les documents de l’entreprise

– et que sa responsabilité pénale peut être engagée si il conserve des documents dont il n’a pas l’usage pour la défense de ses intérêts.

 

Du transfert des mails professionnels sur une messagerie personnelle

(Mise à jour le 16/12/2014)

Le salarié peut-il transférer des mails professionnels sur sa boite mail personnelle?

La Cour de Cassation vient de répondre favorablement à cette question par arrêt n° 3239 du 16 juin 2011 (10-85.079) – Cour de cassation – Chambre criminelle.

Cette décision reprend ainsi une jurisprudence traditionnelle des chambres sociale et criminelle qui estime que le salarié peut conserver une copie des documents dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, si lesdits documents sont nécessaires à la défense de ses intérêts. (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 novembre 2014, 13-84.414, Inédit)

L’intérêt de cette décision réside dans le fait que les documents sont dématérialisés.

En l’espèce, le salarié avisé du projet de son employeur de rompre son contrat de travail, avait transféré des mails dont il avait eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions et dont la production était strictement nécessaire à l’exercice de sa défense dans la procédure prud’homale qu’il a engagée peu après.

Il en avait parfaitement le droit.

Aucune qualification pénale de vol ou d’abus de confiance ne peut donc être retenue à l’égard du salarié.

 

Des mails liant vie professionnelle et vie privée pour prouver une insuffisance professionnelle

La Cour de Cassation vient encore une fois de montrer les conséquences de l’imbrication des sphères privées et professionnelles dans l’entreprise dans un arrêt du 28 avril 2011 N° de pourvoi: 09-42986.

Dans cette affaire, un salarié, directeur d’un établissement bancaire entretenait avec une assistante technico-commerciale une relation extra professionnelle.

A plusieurs reprises des mails avaient été échangés entre eux, la salariée souhaitant quitter son poste mais laissait entrevoir la possibilité de maintenir des relations avec le Directeur et évoquant des difficultés avec une autre salariée.

A la suite de cet échange, le Directeur lui avait alors demandé en termes pressants et maladroits de prendre position sur le maintien de la relation contractuelle en évoquant son projet de démissionner exprimé préalablement.

Finalement au bout de quelques échanges de mails, la salariée avait adressé à la société, un courriel aux termes duquel elle demande conseil « pour régler ce problème entre son directeur et elle ». 

L’Employeur avait alors licencié le Directeur de l’établissement bancaire pour faute grave

– en s’appuyant sur les mails 

– et estimant que le Directeur n’avait pas eu, à l’égard d’une de sa subordonnée, l’attitude qu’on est en droit d’attendre d’un directeur d’agence 

– et que la forme et le contenu des messages électroniques qu’il lui avait adressés révélaient un manque de discernement de nature à porter atteinte à sa crédibilité en tant que directeur d’agence .

La Cour de Cassation confirme que l’utilisation des mails peut causer un licenciement.

Mais elle refuse de considérer dans cette affaire que la faute grave était qualifiée .

Elle estime que « si l’attitude du salarié pouvait constituer un manque de discernement de sa part propre à porter atteinte à sa crédibilité en tant que directeur d’agenceelle ne caractérisait pas un manquement délibéré à ses obligations mais relevait d’une insuffisance professionnelle « .

Dans le cas d’espèce, l’employeur ayant retenu à tort un fondement disciplinaire au licenciement, ce dernier est donc sans cause réelle et sérieuse.

Mais il faut tout de même retenir de cet arrêt :

Mélanger vie privée et vie professionnelle peut justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle