Tous les articles par Carole Vercheyre-Grard

Me Carole VERCHEYRE-GRARD est titulaire d’un DEA de droit des affaires et droit économique de l’université Paris II (Assas) de 1995. Elle possède une double compétence en droit des affaires et droit du travail. Sa connaissance du milieu judiciaire, lui permet une approche pragmatique des contentieux devant les Tribunaux de Commerce et le Conseil de Prud’hommes.

Le secrétaire du CE ne peut pas s’opposer à l’inscription à l’ordre du jour de questions qui doivent être soumises au CE

  • (mis à jour le 12/03/13)

La question de l’ordre du jour dans les instances représentatives du personnel donne souvent lieu à des tensions.

Entre l’employeur qui refuse que certaines questions soient abordées et les représentants des salariés qui ne sont pas d’accord sur les mesures soumises à leur avis, le torchon brûle régulièrement.

Pour autant, il est nécessaire que chacun accepte de laisser à l’autre la possibilité de mettre à l’ordre du jour des questions qu’il souhaite voir examinées et ce a fortiori lorsque l’examen de ces questions par le CE est imposée par un texte.

La Cour de Cassation refuse que le secrétaire du CE (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-26.783, Inédit ) puisse empêcher la tenue desdites assemblées sur ces questions légales.

Dans cette affaire, il s’agissait de questions relatives à l’information et la consultation du comité sur le projet de dénonciation d’usages relatifs au port de tenues de travail par les conducteurs.

La loi impose cette consultation, le secrétaire du CE ne peut s’y opposer en arguant qu’il ne s’agissait pas d’usages.

Des conséquences de la résiliation judiciaire pour harcèlement moral

  • (mis à jour le 12/03/13)

Une salariée avait sollicité la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, en raison notamment du harcèlement moral dont elle avait été victime sur son lieu de travail.

La Cour d’appel a reconnu l’existence du harcèlement moral.

La Cour de Cassation comme la Cour D’Appel ont retenu que cette rupture produit les effets d’un licenciement nul conformément aux dispositions de l’article L. 1152-3 du code du travail. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-26.560, Publié au bulletin)

Il faut donc retenir que la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur pour harcèlement moral produit les effets d’un licenciement nul. 

Cette solution doit donc être différenciée de celle retenue habituellement qui retient la résiliation judiciaire prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur, produit les effets d’un licenciement sans cause réelle sérieuse (Cass. soc., 20 janv. 1998, n° 95-43.350).

 

transaction et sort de la participation aux résultats

  • (mis à jour le 12/03/13)

Les transactions intervenues après la rupture du contrat de travail mettent en général un terme aux demandes des salariés.

Cependant, il arrive que ces transactions ne fassent pas spécifiquement état du sort de la participation aux résultats.

Peut on en conclure que le salarié a abandonné toute prétention à ce titre lorsqu’il a accepté de mettre un terme à tout litige avec son employeur en rapport avec son contrat de travail ?

La Cour de Cassation répond par la négative. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-28.739, Inédit ).

Si les transactions signées à la suite de la rupture du contrat de travail ne se référaient pas aux droits acquis au titre de la participation aux résultats, et que de tels droits pour les exercices litigieux n’étaient ni déterminés ni déterminables , ces droits ne pouvaient être compris dans l’objet de la transaction ayant mis fin au différend avec l’employeur.

En d’autres termes, il est possible de réclamer la participation aux résultats même après avoir signé une transaction avec son employeur tant que cette dernière ne fait pas référence à ces droits.

 

Exemple de clause de mobilité nulle

  • (mis à jour le 12/03/13)

La clause par laquelle la salariée s’engage à accepter à l’avance une mutation en tout lieu où l’employeur ou une autre société du même groupe est implanté, est nulle.

Il importe peu que cette clause n’implique pas forcément de changement d’employeur.

Le fait de mentionner une mutation « en tout lieu » équivaut à une clause de mobilité indéterminée. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-27.612, Inédit)

Remettre en cause sa démission

  • (mis à jour le 12/03/13)

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Attention cependant, ce n’est pas toujours un acte définitif et sécure pour l’employeur.

En premier lieu, le salarié peut demander l’annulation de la démission pour vice du consentement (notamment la violence, dans les cas fréquents de harcèlement moral ou d’accusation de vol : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-20.797, Inédit ).

En second lieu, le salarié peut remettre en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur si il existe des griefs antérieurs ou contemporains à la date de démission.

Peu importe que le salarié n’ait pas mentionné dans sa lettre de démission les manquements de l’employeur.

Il peut tout à fait invoquer a posteriori que sa démission est une prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur, si il existe au moment de la rupture des vrais manquements de l’employeur. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-23.226, Inédit). 

 

Le salarié qui travaille à son domicile à le droit de refuser de travailler autrement

Peut on obliger un salarié en télétravail à venir travailler au siège de l’entreprise ?

La Cour de Cassation répond par la négative.

Lorsque les parties sont convenues d’une exécution de tout ou partie de la prestation de travail par le salarié à son domicile, l’employeur ne peut modifier cette organisation contractuelle du travail sans l’accord du salarié. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-22.360, Inédit)

L’employeur qui persiste à vouloir imposer ce changement à son salarié commet une faute susceptible de justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts .

Rappel : le forfait jours nécessite une convention individuelle écrite de forfait

  • (mis à jour le 20/11/15)

L’article L. 3128-38 du code du travail prévoit que la durée de travail des cadres peut être fixée par des conventions individuelles de forfait jours établies sur une base annuelle.

IMG_20140506_100927La Cour de Cassation rappelle que ces conventions doivent nécessairement être passées par écrit et signées par l’employeur et le salarié . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-27.826, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 février 2014, 12-26.479, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 novembre 2015, 14-10.419, Publié au bulletin).

La simple mention sur le bulletin de paie de l’existence d’un forfait jours ne suffit pas.

C’est une des conditions diriminantes de l’application du forfait jours au salarié.

Licencié pour des mails non professionnels reçus ou envoyés de sa messagerie professionnelle

La Cour d’Appel d’Orléans par décision du 29 janvier 2013 n°11/03345 a validé le licenciement d’un salarié qui avait utilisé sa messagerie en recevant, de l’extérieur ou de collègues, des fichiers et documents à caractère humoristique ou personnel, comportant pour certains des photos grivoises , et en en envoyant. 

Selon la Cour d’Appel, il ne s’agissait pas d’une faute grave car la poursuite du contrat pendant la durée limitée du préavis était possible, mais d’une cause sérieuse de licenciement. 

Dans cette affaire la Cour d’Appel a sanctionné le salarié en retenant que ce dernier avait utilisé la messagerie professionnelle pour une partie non négligeable de son temps à des fins extérieures à son activité. 

Pour apprécier cet arrêt, il convient de relever que l’entreprise avait une charte informatique selon laquelle l’usage de la messagerie se faisait dans le cadre « exclusif » de l’activité professionnelle et que le règlement intérieur de l’entreprise interdisait le travail personnel au sein des locaux de l’entreprise . 

L’appelant soutenait qu’il s’agissait de correspondances, et donc de sa vie privée, et que certains mails faisaient partie de son fichier personnel, auquel l’employeur n’avait pas à accéder. 

Or la Cour d’Appel a rappelé justement que les mails et fichiers contenus dans son ordinateur professionnel sont présumés avoir un tel caractère, sauf s’ils sont identifiés comme personnels, ce qui ici n’était pas le cas. 

La Cour d’Appel a considéré que l’employeur pouvait en prendre connaissance et les produire comme élément de preuve. 

Cette décision est-elle critiquable ? 

La Cour de Cassation a déjà pu considérer à plusieurs reprises que l’employeur pouvait se servir des messageries informatiques pour justifier le licenciement d’un salarié.

Elle estime en effet que le message, envoyé par le salarié aux temps et lieu du travail, qui est en rapport avec son activité professionnelle, ne revêt pas un caractère privé. 

Elle retient que les courriels adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé sauf s’ils sont identifiés comme personnels. 

L’arrêt de la Cour d’Appel d’Orléans précité va plus loin puisqu’il considère que recevoir et envoyer des mails non professionnels constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement pour ne pas avoir consacré tout son temps de travail à son activité professionnelle. 

Espérons que c’est une solution d’espèce, car si les employeurs devaient licencier tous les salariés qui reçoivent des mails personnels au travail, il faudrait alors interdire au salarié d’avoir la moindre vie privée alors qu’ils sont en poste … 

Une manière de déshumaniser le salarié en somme !!! 

Cumul possible de l’indemnité conventionnelle de licenciement et de l’indemnité pour travail dissimulé

  • (mis à jour le 04/03/13)

Important Revirement de Jurisprudence : 

Désormais, l’indemnité pour travail dissimulé et l’indemnité conventionnelle de licenciement peuvent se cumuler (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-23.738, Publié au bulletin N° de pourvoi 11-23738). 

Voici l’attendu de l’arrêt :  » selon l’article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus par l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; qu’au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l’indemnité forfaitaire qu’elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail ; que le moyen n’est pas fondé ». 

(confirmation Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-26.133, Inédit )