Tous les articles par Carole Vercheyre-Grard

Me Carole VERCHEYRE-GRARD est titulaire d’un DEA de droit des affaires et droit économique de l’université Paris II (Assas) de 1995. Elle possède une double compétence en droit des affaires et droit du travail. Sa connaissance du milieu judiciaire, lui permet une approche pragmatique des contentieux devant les Tribunaux de Commerce et le Conseil de Prud’hommes.

Exemple de clause de mobilité nulle

  • (mis à jour le 12/03/13)

La clause par laquelle la salariée s’engage à accepter à l’avance une mutation en tout lieu où l’employeur ou une autre société du même groupe est implanté, est nulle.

Il importe peu que cette clause n’implique pas forcément de changement d’employeur.

Le fait de mentionner une mutation « en tout lieu » équivaut à une clause de mobilité indéterminée. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-27.612, Inédit)

Remettre en cause sa démission

  • (mis à jour le 12/03/13)

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Attention cependant, ce n’est pas toujours un acte définitif et sécure pour l’employeur.

En premier lieu, le salarié peut demander l’annulation de la démission pour vice du consentement (notamment la violence, dans les cas fréquents de harcèlement moral ou d’accusation de vol : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-20.797, Inédit ).

En second lieu, le salarié peut remettre en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur si il existe des griefs antérieurs ou contemporains à la date de démission.

Peu importe que le salarié n’ait pas mentionné dans sa lettre de démission les manquements de l’employeur.

Il peut tout à fait invoquer a posteriori que sa démission est une prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur, si il existe au moment de la rupture des vrais manquements de l’employeur. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-23.226, Inédit). 

 

Le salarié qui travaille à son domicile à le droit de refuser de travailler autrement

Peut on obliger un salarié en télétravail à venir travailler au siège de l’entreprise ?

La Cour de Cassation répond par la négative.

Lorsque les parties sont convenues d’une exécution de tout ou partie de la prestation de travail par le salarié à son domicile, l’employeur ne peut modifier cette organisation contractuelle du travail sans l’accord du salarié. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-22.360, Inédit)

L’employeur qui persiste à vouloir imposer ce changement à son salarié commet une faute susceptible de justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts .

Rappel : le forfait jours nécessite une convention individuelle écrite de forfait

  • (mis à jour le 20/11/15)

L’article L. 3128-38 du code du travail prévoit que la durée de travail des cadres peut être fixée par des conventions individuelles de forfait jours établies sur une base annuelle.

IMG_20140506_100927La Cour de Cassation rappelle que ces conventions doivent nécessairement être passées par écrit et signées par l’employeur et le salarié . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-27.826, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 février 2014, 12-26.479, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 novembre 2015, 14-10.419, Publié au bulletin).

La simple mention sur le bulletin de paie de l’existence d’un forfait jours ne suffit pas.

C’est une des conditions diriminantes de l’application du forfait jours au salarié.

Licencié pour des mails non professionnels reçus ou envoyés de sa messagerie professionnelle

La Cour d’Appel d’Orléans par décision du 29 janvier 2013 n°11/03345 a validé le licenciement d’un salarié qui avait utilisé sa messagerie en recevant, de l’extérieur ou de collègues, des fichiers et documents à caractère humoristique ou personnel, comportant pour certains des photos grivoises , et en en envoyant. 

Selon la Cour d’Appel, il ne s’agissait pas d’une faute grave car la poursuite du contrat pendant la durée limitée du préavis était possible, mais d’une cause sérieuse de licenciement. 

Dans cette affaire la Cour d’Appel a sanctionné le salarié en retenant que ce dernier avait utilisé la messagerie professionnelle pour une partie non négligeable de son temps à des fins extérieures à son activité. 

Pour apprécier cet arrêt, il convient de relever que l’entreprise avait une charte informatique selon laquelle l’usage de la messagerie se faisait dans le cadre « exclusif » de l’activité professionnelle et que le règlement intérieur de l’entreprise interdisait le travail personnel au sein des locaux de l’entreprise . 

L’appelant soutenait qu’il s’agissait de correspondances, et donc de sa vie privée, et que certains mails faisaient partie de son fichier personnel, auquel l’employeur n’avait pas à accéder. 

Or la Cour d’Appel a rappelé justement que les mails et fichiers contenus dans son ordinateur professionnel sont présumés avoir un tel caractère, sauf s’ils sont identifiés comme personnels, ce qui ici n’était pas le cas. 

La Cour d’Appel a considéré que l’employeur pouvait en prendre connaissance et les produire comme élément de preuve. 

Cette décision est-elle critiquable ? 

La Cour de Cassation a déjà pu considérer à plusieurs reprises que l’employeur pouvait se servir des messageries informatiques pour justifier le licenciement d’un salarié.

Elle estime en effet que le message, envoyé par le salarié aux temps et lieu du travail, qui est en rapport avec son activité professionnelle, ne revêt pas un caractère privé. 

Elle retient que les courriels adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé sauf s’ils sont identifiés comme personnels. 

L’arrêt de la Cour d’Appel d’Orléans précité va plus loin puisqu’il considère que recevoir et envoyer des mails non professionnels constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement pour ne pas avoir consacré tout son temps de travail à son activité professionnelle. 

Espérons que c’est une solution d’espèce, car si les employeurs devaient licencier tous les salariés qui reçoivent des mails personnels au travail, il faudrait alors interdire au salarié d’avoir la moindre vie privée alors qu’ils sont en poste … 

Une manière de déshumaniser le salarié en somme !!! 

Cumul possible de l’indemnité conventionnelle de licenciement et de l’indemnité pour travail dissimulé

  • (mis à jour le 04/03/13)

Important Revirement de Jurisprudence : 

Désormais, l’indemnité pour travail dissimulé et l’indemnité conventionnelle de licenciement peuvent se cumuler (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-23.738, Publié au bulletin N° de pourvoi 11-23738). 

Voici l’attendu de l’arrêt :  » selon l’article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus par l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; qu’au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l’indemnité forfaitaire qu’elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail ; que le moyen n’est pas fondé ». 

(confirmation Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-26.133, Inédit ) 

La clé USB personnelle du salarié et le pouvoir de contrôle de l’employeur

Mis à jour  23 octobre 2024

La clé USB personnelle du salarié peut servir à son licenciement.

C’est la leçon qu’il faut retenir de l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 12 février 2013(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2013, 11-28.649, Publié au bulletin ).

Dans cette affaire, une salariée engagée le 26 juillet 2006 en qualité d’assistante administrative par la société PBS, a été licenciée pour faute grave par lettre du 20 février 2009 pour avoir enregistré sur une clé USB des informations confidentielles concernant l’entreprise et des documents personnels de collègues et du dirigeant de l’entreprise.

La Cour d’Appel avait déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, en retenant que l’employeur ne pouvait se prévaloir d’un moyen de preuve illicite, la salariée n’étant pas présente lorsque sa clef USB personnelle a été consultée par son employeur et n’ayant donc pas été informée de son droit d’en refuser le contrôle ou d’exiger la présence d’un témoin.

Elle est censurée par la Cour de Cassation qui considère que lorsqu’une clé USB, dès lors qu’elle est connectée à un outil informatique mis à la disposition du salarié par l’employeur pour l’exécution du contrat de travailest présumée utilisée à des fins professionnelles.

Dès lors, l’employeur peut avoir accès aux fichiers non identifiés comme personnels que la clé contient,et ce même hors la présence du salarié.

Il est de jurisprudence constante que les fichiers créés par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel.

Il s’agit d’un présomption simple.

En effet, dès lors que le salarié identifie ses fichiers dans un dossier informatique intitulé PERSONNEL, la présomption disparaît et les fichiers sont clairement reconnus comme personnels.

La clé USB personnelle n’est pas un fichier identifié comme personnel selon la haute juridiction. 

La Cour de Cassation, par la décision du 12 février, autorise donc l’employeur à en contrôler le contenu.

Avec cette décision, le salarié qui emmène au bureau une clé USB prend le risque de voir cette dernière contrôlée à tout moment par son employeur et ce hors sa présence…

 2024 – Ce risque est encore plus grand avec l’acceptation ces dernières années des preuves illicites par la Cour de Cassation. Voir en ce sens un licenciement fondé sur des données d’une clé USB non connectée.

Seule parade : identifier à l’intérieur de sa clé USB ses dossiers comme personnels….ou laisser sa clé USB personnelle à la maison.

Inaptitude et obligation de reclassement sur le même poste ou un poste similaire

En cas d’inaptitude médicalement constatée, l’employeur doit impérativement tenter de reclasser le salarié.

Attention, l’employeur doit avant tout chercher un reclassement en proposant au salarié son postesi nécessaire aménagé, ou un emploi similaire, en tenant compte des préconisations du médecin du travail. (Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 6 février 2013 N° de pourvoi: 11-28038 Publié au bulletin Cassation)

Le fait de rechercher un poste avec mutation ou transformation doit également être réalisé mais dans un second temps.

Quand le Juge des référés ordonne la poursuite d’un CDD jusqu’à son terme contre la décision de l’employeur

L’article R. 1455-6 du code du travail permet au juge des référés , même en l’absence de disposition spécifique l’y autorisant, d’ordonner la poursuite des relations contractuelles en cas de violation d’une liberté fondamentale par l’employeur .

C’est le cas lorsque l’employeur prononce la rupture illicite d’un contrat à durée déterminée avant l’échéance du terme

– en dehors des cas prévus par l’article L.1243-1 du code du travail, 

– en réponse à l’action en justice engagée par le salarié contre son employeur, 

(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-11.740 11-11.742 11-11.743 11-11.744 11-11.745 11-11.746 11-11.747 11-11.748, Publié au bulletin)

Une exception est cependant admise par la Cour de Cassation : L’employeur peut établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l’exercice, par le salarié, de son droit d’agir en justice .

Du maintien de salaire en cas de maladie dans le convention collective de la chimie

IMG_20140331_121229L’article 23 de l’avenant n° 1 du 11 février 1971 à la convention collective des industries chimiques et connexes du 30 septembre 1952 étendue par arrêté du 13 novembre 1956 garantit en cas de maladie :

  • le maintien des appointements mensuels augmentés des seules primes d’ancienneté, de rendement, de production et de productivité, à l’exclusion de tous autres éléments de rémunération

Faut-il faire une interprétation restrictive de cet article ?

En d’autres termes le maintien de salaire peut il inclure d’autres éléments que les appointements visés spécifiquement dans l’article 23 de la convention collective ?

La Cour de Cassation répond que l’article doit être interprété de manière stricte et ne peut inclure d’autres primes.

Ainsi, les primes liées à un travail posté et au travail dominical ne sont pas comprises dans la rémunération ainsi garantie. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-23.925 11-23.926 11-23.927 11-23.928 11-23.929 11-23.930 11-23.931 11-23.932, Publié au bulletin).