Le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail cause toujours un préjudice indemnisable

Ne pas respecter les durées maximales de travail cause nécessairement un préjudice au salarié et l’employeur devra verser obligatoirement une indemnisation au salarié  en cas de procès. (Cour de Cassation chambre sociale 26 janvier 2022, Pourvoi n° 20-21.636 )

Cette décision est conforme à la position de la Cour de Justice de l’Union Européenne qui a une jurisprudence constante sur cette question depuis 2010 qui retient que les conditions d’application des règles relatives aux durées maximales de travail ne sont pas subordonnées à l’existence d’un préjudice et leur violation doit entraîner une compensation en repos ou pécuniaire (CJUE, arrêt du 14 octobre 2010, Fuss, C-243/09.

Cette position s’appuie sur la volonté de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d’un repos suffisant.

Pour mémoire, il existe des règles légales françaises très précises sur la durée maximale de travail hebdomadaire et journalier qui sont formalisées tant dans le code du travail que dans les dispositions de la directive européenne 2003/8.

Il faut retenir que :

  • Durée maximale quotidienne

La durée de travail effectif journalière ne doit pas dépasser la durée maximale de 10 heures par jour, sauf dérogations. (Article L3121-18 du code du travail)

  • Durées maximales hebdomadaires

La durée de travail effectif hebdomadaire ne doit pas dépasser les 2 limites suivantes :

  • 48 heures sur une même semaine;
  • 44 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives.

(Articles L3121-20 à L3121-22 du code du travail)

 

8 réflexions sur « Le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail cause toujours un préjudice indemnisable »

  1. Bonjour Maitre .

    Il s’agit donc d’un retour à la règle qui prévalait avant l’arrêt Cass. Soc. 13 avril 2016 n°14-28.293 . C’est plutôt une bonne chose pour la protection des salariés amha .

    Pour autant cet arrêt de 2022 porte uniquement (à ma connaissance) sur le volume horaire . Alors même que certaines conventions collectives sont + permissives sur ce point (référence à la moyenne de 44h/semaine sur 12semaines) .

    Et, dans un registre proche, des arrêts (anciens) avaient été rendus, reconnaissant le droit à dommages et intérêts « automatiques » (Cass.soc. 29 janvier 1981,n°79-41.406, et Cass. soc., 8 juin 2011, no 09-67.051) en cas de non respect du repos hebdomadaire (définition personnelle : arrêts de type « automatique » = nul besoin de prouver la réalité du préjudice pour obtenir réparation) . Cependant ces deux arrêts semblaient avoir été cassés par l’arrêt Cass. Soc. 13 avril 2016 n°14-28.293 .

    Ainsi, par extension : pourrais-on considérer que l’arrêt de 2022 peut être interprété également de manière favorable au salarié dans le cas de non respect du repos hebdomadaire ? (ce que faisaient les arrêts de 1981 et 2011 sus-nommés) .

    Je demande ceci car si mon employeur est bien « dans les clous » en ce qui concerne le respect du volume horaire maximal malgré des semaines de 49h (« ma » convention collective idcc3127 est permissive malheureusement, la moyenne de 44h sur 12semaines n’est pas dépassée) … Il ne l’est en revanche pas du tout concernant le repos hebdomadaire (j’affiche des périodes de 12jours travaillés consécutivement, soit bien au delà du maximum de 6jours par semaine, sans naturellement que les 35h de repos règlementaires hebdomadaires soient respectés…) .
    Pourrais je donc ? Dans le cas ou j’attaquerais mon employeur sur l’aspect du non respect du repos hebdomadaire (ce sujet étant fortement connexe avec le volume horaire hebdomadaire même si l’arret du 26.01.2022 porte uniquement sur le volume horaire et non le repos hebdomadaire) : M’appuyer sur le cass. soc. 26.01.2022, Pourvoi n° 20-21.636 pour m’abstenir de devoir prouver la réalité du préjudice subi ? (dans le but d’obtenir des dommages et intérêt naturellement, sur la base du non respect du repos hebdomadaire) .

    Je m’excuse d’avance pour la technicité de la question tout autant que pour l’aspect de conseil juridique gratuit .

    Merci pour votre aide .

    1. Je me permets de me répondre à moi même, ayant eut quelques temps pour réfléchir à la question que j’ai posé . Peut être que Maître vercheyre-grard confirmera ou infirmera mon propos par la suite, en tout cas ce n’est nullement une critique de ma part (bien au contraire) qu’elle n’ai pas à ce jour commenté mes dires/assertions .

      Après réflexion il m’est apparu que le jugement de la cour de cassation se fonde sur l’arrêt de la cour de justice européenne (CJUE, arrêt du 14 octobre 2010, Fuss, C-243/09.) . Or, bien que le jugement de la cour de cassation (chambre sociale 26 janvier 2022, Pourvoi n° 20-21.636 ) aborde uniquement le point concernant le dépassement de la durée hebdomadaire de travail (pour rendre un jugement en faveur du salarié demandeur), il apparait que l’arrêt de la cjue sur lequel la cassation se base est bien plus général que cela, au sens ou il concerne aussi : le temps de pause obligatoire après 6 heures de travail, et le repos quotidien minimal de 11 heures consécutives par 24 heures, et aussi le repos hebdomadaire minimal de 24 heures sans interruption durant chaque période de sept jours de travail (nota : 6 jours suffisent en droit français, article L3121-1 du code du travail).

      Ainsi j’aurai tendance à penser que l’arrêt de la Cour de Cassation chambre sociale 26 janvier 2022, Pourvoi n° 20-21.636, même s’il concerne uniquement le point du volume de travail hebdomadaire, peut légitimement être appliqué (aussi!) aux autre points abordés par l’arrêt de la cjue sur lequel il est basé (même si la chambre de cassation n’a utilisé que l’un de ses points) .

      Donc selon moi (mais je ne suis pas juriste, je préfère le répéter) l’arrêt de la cour de cassation peut parfaitement être cité comme base réglementaire jurisprudentielle ,dans le cas d’un salarié qui contesterait à son employeur un (ou plusieurs) dépassement(s) cités tant dans la directive « 2003/88/CE du 4 novembre 2003, art. 3,4,5,6 » que dans l’arrêt « CJUE, arrêt du 14 octobre 2010, Fuss, C-243/09. » .

      C’est plutôt une bonne nouvelle je trouve .
      Attention cependant (je sais que je me répète…) je ne suis pas juriste et mon interprétation bien que me semblant d’une logique raisonnable peut tout à fait ne pas être vraie au sens du droit (Ce dernier pouvant parfois revêtir un certain illogisme au yeux du profane que je suis, ce n’est pas une critique) .

      L’éclairage d’un(e) juriste compétant(e) dans ce domaine serait bienvenu, que cela soit pour confirmer, ou au contraire infirmer, mon raisonnement .

      Merci beaucoup de m’avoir lu .

    2. Bonjour,

      Comme vous l’avez bien compris, la Cour de Cassation a abandonné sa formule classique cause « nécessairement un préjudice ».

      Cela signifie donc que le préjudice devra donc être toujours expliqué et prouver

      Néanmoins il faut comprendre tout de même des arrêts que le préjudice existe systématiquement car le nom respect des plafonds affecte la santé et la sécurité du salarié ce qui doit être indemnisé.

      Bien à vous

      Carole VERCHEYRE-GRARD

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