De la charge de la preuve du respect des onze heures de repos quotidien

Mis à jour 15/03/2022

L’union Européenne fixe des seuils de repos et des plafonds pour le temps de travail du salarié.(dir. 2003/88/CE du 4 novembre 2003, art. 3,4,5,6).

Le repos quotidien minimal de 11 heures consécutives par 24 heures fait partie de ces seuils.

Cette preuve incombe exclusivement à l’employeur. (Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 17 octobre 2012 N° de pourvoi: 10-17370 Publié au bulletin).

En effet, l’article L. 3171-4 du code du travail qui fixe la répartition de la charge de la preuve entre les salarié et employeur des heures de travail effectuées n’est pas applicable à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.015, Inédit).

Il faut noter que le défaut de respect par l’employeur du repos quotidien de onze heures cause nécessairement un préjudice au salarié, dont le juge doit fixer la réparation(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.015, Inédit, voire également Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, 13-19.606, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, 13-19.605, Inédit ,.

De surcroît, ce défaut de respect des règles relatives au repos quotidien de onze heures caractérise une atteinte aux intérêts collectifs de la profession et peut donner lieu à l’allocation de dommages et intérêts aux syndicats. Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.015, Inédit).

Il faut noter que  le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation. (Cour de Cassation chambre sociale 26 janvier 2022, Pourvoi n° 20-21.636 )

Le Juge a l’obligation de se procurer la convention collective applicable

IMG_20140331_121042La Cour de Cassation est rassurante …les juges ont l’obligation de se procurer les conventions collectives applicables au litige !!

Une évidence ?

Pas forcément pour la Cour d’Appel de Fort-de-France qui avait cru pouvoir rejeter une demande de rappel de salaire d’un salarié au motif que les dispositions conventionnelles applicables, bien que listées dans les pièces, ne figuraient pas au dossier.

Heureusement la Cour de Cassation rappelle : « Lorsqu’une partie invoque une convention collective précise, il incombe au juge de se procurer ce texte qui contient la règle de droit éventuellement applicable au litige, au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire. » (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-15.047, Inédit ).

Dommage que la Cour de Cassation doive rappeler des règles basiques !

Signer une rupture conventionnelle dans une situation conflictuelle

  • (mis à jour le 21/01/14)

La Cour de Cassation a tranché !

L’existence d’un différend entre les parties au contrat de travail n’interdit pas la signature d’une rupture conventionnelle.

Mais la validité de ladite rupture conventionnelle est subordonnée à la preuve d’un consentement libre et éclairé des deux parties.

Or la validité du consentement est plus facilement contestable lorsqu’il existe un différend entre les parties.

La Cour de Cassation vient en effet de juger par un arrêt de principe que : « si l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties « . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.865, Publié au bulletin ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-23.942, Publié au bulletin )

La prudence dans l’utilisation de ce mode de rupture est donc vivement conseillée en cas de conflit latent ou ouvert entre les parties.

Dématérialisation de l’attestation de salaire servant au calcul des indemnités journalières

Le Décret du 28 mars 2013 a fixé des modalités de mise en oeuvre de la déclaration sociale nominative dont certaines s’appliquent dès le 1er juillet 2013.

Actuellement et jusqu’au 1er juillet 2013, le salarié doit adresser à la Caisse d’assurance maladie, l‘attestation de salaire papier établie par l’employeur.

C’est cette attestation qui lui permet de percevoir ses indemnités journalières.

A ce titre, il convient de noter que la remise non conforme par l’employeur d’attestations de salaire suscite un lourd contentieux devant les juridictions prud’homales.

A compter du 1er juillet 2013, cette attestation devra être adressée sous forme électronique par l’employeur.

Ce n’est que dans l’hypothèse où l’employeur ne peut pas l’adresser sous forme électronique que le salarié aura l’obligation de remettre à la Caisse primaire d’assurance maladie un document papier dûment rempli par son employeur.

Attention, il faut noter que dès le 1er juillet prochain, l’employeur sera subrogé de plein droit dans les droits aux indemnités journalières de son salarié, qu’il maintienne en totalité le salaire de l’intéressé ou simplement en partie pendant la période de maladie.

Cette subrogation bien sûr ne s’appliquera qu’à la condition que le salaire maintenu au cours de cette période soit au moins égal au montant des indemnités dues pour la même période.

(Voir CSS – art R.323-10 et R.323-11 modifiés par le décret n°2013-266 du 28 mars 2013 – art.8 : JO, 30 mars)

De l’obligation de formation du salarié en contrat d’apprentissage

Le contrat d’apprentissage est un contrat aidé qui permet à l’employeur de bénéficier d’un apprenti salarié dont les coûts sont moindres mais en contrepartie de cette rémunération faible, il doit absolument lui dispenser la formation professionnelle nécessaire.

Le contrat d’apprentissage doit donc permettre la formation d’un apprenti.

La Cour de Cassation est très sévère sur cette obligation à la charge de l’employeur.

Si l’apprenti n’est pas formé, alors elle considère que le contrat d’apprentissage a été détourné de son objet et elle requalifie le contrat de travail en contrat à durée indéterminée.

Dans une affaire devant la Chambre sociale du 12 février 2013 – n° 11-27.525, la Cour de Cassation a jugé de la situation d’un apprenti qui avait conclu avec une entreprise un contrat d’apprentissage au vu de la préparation d’un baccalauréat professionnel « Maintenance des systèmes mécaniques automatisés ».

Le salarié a saisi le Juge pour obtenir la requalification de son contrat en CDIen soutenant qu’il effectuait les mêmes tâches que les autres salariés à temps complet sans avoir la même rémunération et surtout sans avoir jamais bénéficié d’aucune formation dans l’entreprise.

La Cour de Cassation lui donne raison, elle retient que l‘apprenti qui devait réaliser le même travail que les autres salariés n’était pas en situation d’apprentissage mais qu’il exerçait des fonctions à part entière et qu’il était dans l’impossibilité matérielle de recevoir une formation professionnelle sérieuse et adéquate.

Si cette solution n’est pas novatrice, il est utile de la rappeler régulièrement afin que les droits de chacun soient respectés et équilibrés.

Signer une rupture conventionnelle, après avoir engagé une action en résiliation judiciaire

A priori, il paraît inique d’engager une résiliation judiciaire d’une part et d‘autre part de signer une rupture conventionnelle postérieurement.

C’est pourtant face à cette situation que la Cour de Cassation a rendu une décision le 10 avril 2013. (Cour de Cass. – Ch. Sociale 10 avril 2013, n° 11-15.651)

Dans cette affaire, un salarié s’estimant victime de harcèlement moral avait dans un premier temps saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat.

En cours de procédure, ledit salarié, visiblement usé par le harcèlement avait signé une rupture conventionnelle qui avait été homologuée par l’Administration.

De surcroit, le salarié, mal conseillé n’avait pas contesté immédiatement la signature de la rupture conventionnelle.

Mauvais choix ! 

La cour de Cassation considère que le salarié ne pouvait maintenir sa demande de résiliation judiciaire faute d’avoir soulevé dans le délai d’un an la nullité de la rupture conventionnelle signée.(Cour de Cass. – Ch. Sociale 10 avril 2013, n° 11-15.651)

Du terme du CDD conclu pour le remplacement d’un salarié absent

Très souvent lorsqu’un salarié est en congé maternité ou parental, l’employeur choisit d’établir pour son remplaçant ponctuel un contrat à durée déterminée sans terme précis mais limité à la durée de l’absence dudit salarié.

Il faut être prudent avec ce type de contrat à durée déterminée. 

En effet, il peut arriver que la durée de l’absence totale du salarié titulaire soit bien supérieure au congé maternité ou parental envisagé.

L’arrêt du 10 avril 2013 rendu par la Cour de Cassation en sa chambre Sociale, nous en donne un exemple. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 avril 2013, 12-13.282, Inédit )

Dans cette affaire, un employeur avait conclu un CDD pour remplacer une salariée partie en congé parental.

Le contrat prévoyait qu’il pouvait se poursuivre en tout état de cause jusqu’au retour de la salariée de son congé parental d’éducation.

La salariée absente, a sollicité un congé sabbatique au terme de son congé parental d’éducation, et n’est pas revenue au travail entre le congé parental et le congé sabbatique.

La Cour de Cassation considère qu’en aucun cas l’employeur ne pouvait mettre fin au contrat à durée déterminée à la fin du congé parental et qu’il devait attendre la fin du congé sabbatique.

Il faut donc être prudent dans la rédaction des contrats à durée déterminée et prévoir des termes précis, quitte à procéder à des prolongations de contrats en cas de nécessité.

Homosexualité à l’épreuve du droit du travail

Le code du travail prohibe toute discrimination en raison de l’orientation sexuelle (C. trav., art. L. 1132-1).

La Cour de Cassation dans les feux de l’actualité a rendu dernièrement une décision sanctionnant expressément cette discrimination(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 avril 2013, 11-15.204, Publié au bulletin)

Le législateur est allé au delà puisque la Loi 2013-404 du 17 mai 2013 ouvre désormais depuis le 19 mai 2013 le mariage aux couples de personnes de même sexe .

Cette loi prévoit un nouvel article 6-1 du code civil « le mariage et la filiation adoptive emportent les mêmes effets, droits et obligations reconnus par les lois, que les époux ou les parents soient de sexe différent ou de même sexe ».

Désormais, les employeurs devront accorder à tous les couples, sans discrimination, les éventuels droits conventionnels ou résultant d’un usage liés au mariage ou à l’adoption (ex. : primes de mariage, congés divers pour le mariage d’un salarié).

De même, les différents congés familiaux conventionnels ou légaux sont ouverts aux couples de même sexe.

Le code du travail compte déjà un nouvel article L. 1332-3-2 qui prévoit qu’ aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir refusé en raison de son orientation sexuelle une mutation géographique dans un État incriminant l’homosexualité (c. trav. art. nouveau).

D’autres modifications devraient suivre.

Des risques d’utiliser une messagerie internet à des fins personnelles sur son ordinateur professionnel

La jurisprudence de la Cour de Cassation est constante :  » les courriels adressés et reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels « .

La Cour de Cassation a déjà considéré qu’une clé USB personnelle mais branchée sur l’ordinateur de l’entreprise pouvait être consultée par l’employeur, hors la présence du salarié.

Elle vient de considérer que la messagerie électronique à laquelle il était possible d’accéder par la page d’accueil du site informatique de l’entreprise, n’est pas personnelle dans la mesure où les messages visualisés par l’huissier de justice provenaient de la messagerie électronique mise à la disposition du salarié par l’entreprise, et qu’ils n’étaient pas identifiés comme étant personnels(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 16 mai 2013, 12-11.866, Inédit ).

La prescription quinquennale en droit du travail va devenir une exception !

  • mis à jour 30/10/2017

La loi de sécurisation de l’emploi qui a été adoptée le 25 avril par l’Assemblée nationale et le 14 mai par le Sénat selon la procédure accélérée, a modifié les règles de prescriptions en droit du travail.

La prescription est passée de 5 ans à 2 ans 

Mais le nouvel article L1471-1 du code du travail a encore été changé en 2017. Il prévoit désormais une prescription de 12 mois pour les contestations relatives aux ruptures de contrat de travail.

Le nouvel article L1471-1 du code du travail, prévoit:

« 

Toute action portant sur l’exécution se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.

« 

Sont exclues de cette nouvelle prescription de deux ans :

– les actions en réparation d’un dommage corporel causé à l’occasion de l’exécution du contrat de travail qui sont soumises à une prescription de dix ans (article 2226 du code civil);

– les actions en paiement ou en répétition du salaire dont la prescription est de 3 ans (article L3245-1); 

– les actions en réparation des préjudices résultant de la discrimination , du harcèlement moral et du harcèlement sexuel (L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1) qui demeurent soumises à une prescription de 5 ans;

– la réparation de l’entier préjudice résultant de la discrimination pendant toute sa durée (L. 1134-5);

– les actions en contestation du solde de tout compte qui demeurent soumises à la prescription de 6 mois (L. 1234-20)