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Employeurs: il n’est pas possible de modifier unilatéralement le contrat de travail d’un salarié

  • (mis à jour le 29/04/11)

C’est une position classique de la Cour de Cassation qui vient d’être rappelée par un arrêt de sa chambre sociale du 6 avril 2011 N° de pourvoi: 09-66818

En l’espèce, un salarié avait été engagé en qualité d’ingénieur. 

Sept ans plus tard, son employeur a souhaité faire évoluer ses fonctions et ses attributions. 

Le salarié estimait qu’il s’agissait d’une rétrogradation de ses fonctions et constatait que lui étaient retirées ses fonctions d’encadrement et ses responsabilités au niveau de la planification et de l’organisation des ressources humaines et matérielles, du suivi de la fabrication, de la formation du personnel de production et de la maintenance générale. 

Il refusa donc la modification de son contrat. 

L’employeur crut à tort pouvoir le licencier pour faute grave, en arguant que son comportement n’était pas acceptable. 

Sans surprise, les Juridictions sanctionnent l’employeur : le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. 

La Cour de Cassation approuve la Cour d’appel qui avait retenu que le salarié n’avait pas été licencié à cause de son comportement mais en raison de son refus d’accepter la modification de son contrat de travail. 

Cet arrêt amène deux réflexions: 

– Le salarié avait, eu égard aux faits de l’espèce, la possibilité de solliciter la nullité de son licenciement en se fondant sur le harcèlement moral dont il était manifestement victime. 

En effet, L’article L1152-2 du Code du travail dispose que : 

« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. » 

L’article L 1152-3 du Code du travail dispose que : 

« Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul. » 

Cette solution aurait pu lui permettre de prétendre à des dommages et intérêts plus conséquents. 

 le refus du salarié d’accepter une modification de son contrat de travail peut être sanctionné par un licenciement …mais uniquement économique lorsque la modification sollicitée par l’employeur est justifiée économiquement. 

voir également 

Cour de cassation chambre sociale 30 mars 2011 N° de pourvoi: 09-71824« l’amoindrissement des missions de la salariée et de son niveau d’autonomieconstituait une modification unilatérale du contrat de travail qui ne pouvait lui être imposée «  

Le recours à une entreprise extérieure pour remplacer le salarié ne justifie pas un licenciement pour absence prolongée

  • (mis à jour le 28/04/11)

La Cour de Cassation par une décision d’Assemblée Plénière du 22 avril 2011 (09-43.334)rappelle comme la chambre sociale que les possibilités de licenciement pour l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié sont limitées aux seules hypothèses où l’engagement définitif d’un autre salarié est nécessaire. 

L’attendu de principe est le suivant : « Attendu que si l’article L. 1132-1 du code du travail fait interdiction de licencier un salarié, notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, ce texte ne s’oppose pas au licenciement motivé, non par l’état de santé du salarié, mais par la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; que celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l’employeur de procéder à son remplacement définitif par l’engagement d’un autre salarié. » 

Cet attendu fixe clairement les cas où l’employeur peut licencier son salarié pour absence prolongée ou absences répétées

Il faut : 

– que le lettre de licenciement ne motive pas la rupture par l’état de santé ou le handicap 

– que le licenciement soit motivé par la situation objective de l’entreprise dont lefonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié 

– les perturbations subies par l’entreprise l’obligent à remplacer définitivement le salarié 

– le remplacement doit être exclusivement compris comme l‘engagement d’un autre salarié et non le recours à une entreprise extérieure. 

Du refus d’exécuter une tâche.

Le salarié qui refuse d’exécuter une mission que lui confie son employeur ne commet pas toujours une faute grave.

C’est l’enseignement de l’arrêt de la Cour de cassation chambre sociale du 6 avril 2011 N° de pourvoi: 09-71908 qui rappelle qu’il faut vérifier que la tâche confiée au salarié entre dans ses fonctions telle que définies par son contrat de travail ou la convention collective avant de sanctionner le salarié.

Dans cette affaire, un serveur avait refusé de nettoyer des sanitaires et le mur extérieur.

La Cour d’Appel avait considéré que  » les tâches de nettoyage des sanitaires et le mur extérieur du commerce, que M. X… avait refusé d’exécuter, n’étaient pas différentes, par essence, de celles de serveur » .

La Cour de Cassation censure cette position en reprochant à la Cour d’Appel de ne pas avoir justifié sa solution.

Attention à la fiscalité des indemnités de rupture

  • (mis à jour le 26/04/11)

Il ne faut pas oublier que les indemnités de rupture des contrats de travail des salariéset des fonctions des dirigeants et mandataires sociaux peuvent être soumises dans certaines conditions:

– à l’impot sur le revenu

– à charges sociales

– à contributions sociales

La loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2011a modifié nettement les conditions d’exonérations des indemnités de rupture notamment pour les transactions et les jugements dont les montants sont supérieurs au double du plafond de la sécurité sociale (à ce jour 106 056 euros.)

Soyons attentifs et informons nos clients.

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter la circulaire DSS/SD5B/2011/145 du 14 avril 2011 relative au régime social des indemnités de rupture .

Du vol en droit du travail

Le vol est une infraction pénale et justifie souvent un licenciement pour faute grave. 

Encore faut-il que le vol soit prouvé 

En pratique les employeurs qui sont confrontés à cette situation doivent prendre soin de déposer plainte concomitamment au licenciement du salarié et respecter les règles légales en cas de suspicion de vol. 

La Cour de Cassation en sa chambre sociale fait une interprétation au cas par cas des situations qui lui sont soumises. 

Ainsi par arrêt de sa Chambre Sociale du 6 avril 2011 N° de pourvoi: 10-15917elle a refusé de valider le licenciement d’un salarié à qui l’on reprochait un vol de marchandise au motif que l’employeur ne rapportait pas la preuve du vol mais exposait des « motifs hypothétiques ». 

La Haute Juridiction rappelle que tous les vols ne constituent pas forcément des fautes graves. 

Ainsi par arrêt de sa Chambre Sociale du 6 avril 2011 N° de pourvoi: 10-15286 , elle a considéré que l’acte isolé de vol du salarié ( vol de la recette de 2 pneus) qui justifiait d’une ancienneté de plus de dix années, n’était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise et que la faute grave n’était donc pas avérée. 

Il faut cependant noter que dans ce cas, le licenciement du salarié sera vraisemblablement validé mais requalifié pour cause réelle et sérieuse, lui permettant de percevoir une indemnité de licenciement et une indemnité de préavis. 

Prolongement de la période d’essai par mail

  • (mis à jour le 20/04/11)

Le Ministre du Travail a été interrogé sur la validité d’un renouvellement de la période d’essai du contrat à durée indéterminée par courriel.

Par réponse ministérielle N° : 88607 publiée au JO le : 01/03/2011, le Ministre du travail confirme la validité d’un tel renouvellement par email en s’appuyant sur la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique, le code civil reconnaît, comme élément de preuve écrite, tout message, quels qu’en soient le support et les modalités de transmission (article 1316 et suivants du code civil).

Il ajoute cependant que le renouvellement de la période d’essai doit recevoir l’accord exprès de la partie à laquelle il est proposé

En outre, il faut vérifier que les conventions collectives ou autre accord de branche ne prévoient pas un formalisme particulier pour le renouvellement de la période d’essai.

Cela suppose donc:

– l’information par mail du salarié par son employeur de son souhait de renouveler la période d’essai

– l’accord du salarié dans un mail retour en des termes précis et non équivoques

Le Ministre du Travail conclut que sous réserve des modalités spécifiques prévues par certaines conventions collectives, un message électronique est donc recevable au même titre qu’un courrier, dès lors que l’accord y est exprimé dans des termes clairs et non équivoques.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale par arrêt du 26 mai 2010 N° de pourvoi: 08-42893 avait déjà jugé qu’un avertissement pouvait être valablement donné par mail.

 

DROIT DU TRAVAIL : Liberté d’Expression et Divulgation à des tiers des informations confidentielles de l’entreprise

mise à jour 22 avril 2022

L’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 rappelle que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». 

Il s’agit d’une liberté fondamentale qui ne peut être limitée qu’en cas d’abus. 

L’article 10- 2°de la Convention européenne des droits de l’homme de 1950 est venu précisé dans quels cas, la liberté d’expression peut être restreinte 

« L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. » 

La Cour de cassation en sa chambre sociale 6 avril 2011 N° de pourvoi: 09-72520 nous donne un exemple pratique de l’application de ces textes en droit du travail dans une affaire où un salarié avait divulgué des informations confidentielles en dehors de l’entreprise : 

« Mais attendu que la cour d’appel relève que la démarche d’ordre privée entreprise par le salarié en faveur d’une personne réfugiée n’avait été possible qu’en divulguant à des tiers des informations confidentielles qu’il avait recueillies dans le cadre de ses fonctions et en agissant à l’insu de l’association qui l’employait tout en faisant état de sa qualité professionnelle ; qu’elle ajoute qu’il avait ce faisant outrepassé les limites des pouvoirs d’intervention de l’employeur, non habilité à prendre en charge les demandeurs d’asile après le rejet définitif de leur requête, que par ces seuls motifs, elle en a déduit à bon droit que les faits reprochés, qui constituaient des manquements graves à ses obligations professionnelles et ne relevaient pas de la liberté d’expression reconnue au salarié , justifiaient le licenciement intervenu ; que le moyen n’est pas fondé  » 

Cette solution s’applique également pour les partages sur Linkedin.

Dans un arrêt de 2022, la Cour de Cassation a dû traiter le cas d’un salarié qui avait publié des images sur son compte Linkedin .

La cour d’appel de Paris avait relevé que « les images publiées provenaient de documents internes qui n’étaient pas destinés à une publication sur un réseau social, et dont [le salarié] n’a pu avoir connaissance que dans l’exercice de ses fonctions ». Elle souligne aussi qu’il avait utilisé ces images « sans vérifier s’il pouvait le faire, au regard des règles de confidentialité internes auxquelles il était soumis. »

Pour les juges, le salarié a commis un « manquement avéré à son obligation de confidentialité et de respect du secret professionnel rappelée par la clause de son contrat de travail ». Ils valident son licenciement pour faute.

CA Paris du 23 février 2022, n° RG 19/07192 

De la résiliation judiciaire du contrat en cas de modification temporaire des fonctions

  • mis à jour le 19/04/11)

La Cour de Cassation vient d’apporter une précision à sa jurisprudence sur la résiliation judiciaire du contrat en cas de modification des fonctions du salarié.

Dans cette affaire, un salarié était directeur du service hébergement dans une association ayant pour activité l’accueil d’adultes handicapés.

Au cours du mois de mai 2007, le salarié avait divulgué des informations sur un dossier de restructuration interne à l’Association qui avait conduit son employeur à l’exclure temporairement de plusieurs réunions.

Trois mois après cette mesure, son employeur lui avait expressément précisé qu’il pouvait à nouveau assister aux réunions.

Quinze jours plus tard, invoquant notamment une modification unilatérale de son contrat de travail, le salarié avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

La Cour D’Appel de Rouen du 5 mai 2009 avait fait droit à sa demande en considérant que l’employeur avait supprimé des fonctions de direction au salarié.

La Cour de Cassation en sa chambre sociale 30 mars 2011N° de pourvoi: 09-42701 refuse de valider la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur en rappelant que le salarié avait recouvré l’intégralité de ses fonctions, de sorte que la modification de celles-ci n’avait été que temporaire.

La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur ne peut donc être prononcée qu’en cas de modification définitive et non temporaire des fonctions du salarié.

CDD et Salarié Protégé

  • (mis à jour le 19/04/11)

L’inspection du travail doit constater que le CDD est arrivé à son terme. 

L’article L. 2412-1 rappelle que les salariés investis de l’un des mandats ci-dessous énumérés bénéficient de la protection en cas de rupture d’un contrat à durée déterminée : 

1° Délégué syndical ; 

2° Délégué du personnel ; 

3° Membre élu du comité d’entreprise ; 

4° Représentant syndical au comité d’entreprise ; 

5° Membre du groupe spécial de négociation et membre du comité d’entreprise européen ; 

6° Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société européenne ; 

6° bis Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société coopérative européenne ; 

6° ter Membre du groupe spécial de négociation et représentant au comité de la société issue de la fusion transfrontalière ; 

7° Représentant du personnel au comité d’hygiène et de sécurité des conditions de travail ; 

8° Représentant du personnel d’une entreprise extérieure, désigné au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail d’un établissement comprenant au moins une installation classée figurant sur la liste prévue au IV de l’article L. 515-8 du code de l’environnement ou mentionnée à l’article 3-1 du code minier ; 

9° Membre d’une commission paritaire d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail en agriculture prévue à l’article L. 717-7 du code rural et de la pêche maritime ; 

10° Salarié mandaté dans les conditions prévues à l’article L. 2232-24, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical ; 

11° Membre du conseil ou administrateur d’une caisse de sécurité sociale mentionné à l’article L. 231-11 du code de la sécurité sociale ; 

12° Représentant des salariés dans une chambre d’agriculture, mentionné à l’article L. 515-1 du code rural et de la pêche maritime ; 

13° Conseiller prud’homme. 

Cette protection oblige l’employeur à saisir l’inspection du travail pour qu’il constate l’arrivée du terme contractuel. 

La cessation du lien contractuel définitif n’intervient qu’après constatation par l’inspecteur du Travail de l’arrivée du terme. 

( Cour de cassation chambre sociale 5 avril 2011 N° de pourvoi: 10-10424 ) 

Cette obligation s’impose à l’employeur quelle que soit la durée du contrat à durée déterminée 

De la force probante d’un mail à l’escroquerie au jugement

  • (mis à jour le 20/04/11)

Pour pouvoir utiliser un mail à titre de preuve, il faut qu’il n’existe pas de doute sur:

– l’authenticité du mail (les noms et adresses IP des ordinateurs et serveurs de messagerie intervenus dans les échanges, la référence du logiciel utilisé pour recevoir le message et les identifiants uniques attribués aux échanges.)

– les auteurs et les destinataires dudit mail (l’adresse e-mail de l’expéditeur et l’adresse e-mail du destinataire)

– la date du mail

En outre, il faut que celui qui s’en prévaut puisse apporter la preuve de la régularité de son obtention c’est-à-dire :

– s’il est salarié soit en tant que destinataire (principal ou secondaire- notamment par transfert, copie ou remise – ) ou auteur, 

– s’il est employeur soit en tant que destinataire, auteur, ou encore dans des conditions loyales sans violation du secret des correspondances ( voir en ce sens mon article sur la question Jurisprudence Sociale Lamy Bimensuel de mars n°295 page 4 à 6)

En pratique , le mail est souvent une impression de la boite email de son destinataire et assez peu de mails sont contestés devant les juridictions de fond.

Peut-être à tort….car il est très facile de falsifier des mails.

La Cour de cassation vient de le confirmer en rejetant des mails douteux dans un arrêt récent de sa chambre sociale 22 mars 2011, Numéro de Pourvoi : 09-43307.

Dans l’espèce précitée, le salarié se prévalait de mails

– dont il ne pouvait pas justifier des conditions dans lesquelles il les avait obtenus 

– qui n’apparaissent pas dans la boîte mail de l’auteur présumé des emails

La Cour de cassation rappelle ainsi qu’il est possible de modifier un mail existant ou de créer de toutes pièces un mail anti-daté.

Je viens d’en avoir l’illustration dans un dossier où un « soit-disant mail » vient de m’être communiqué sur un document word.

Il n’est pas inutile de rappeler que la communication d’une pièce fausse, constituée pour les besoins de l’espèce, peut constituer le délit pénal d’escroquerie au Jugement(L’article 313-1 du Code pénal )

Soyons vigilants sur les pièces communiquées !