Difficile de prouver une inégalité de traitement sans avoir la preuve des salaires des autres salariés.
Or il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération.
En France, la question du salaire reste encore tabou et ils sont encore très peu nombreux les salariés qui acceptent spontanément de transmettre leurs bulletins de salaires à leurs homologues.
Le salarié doit souvent s’adresser au juge pour obtenir cette information notamment par la voie de l’article 145 du CPC.
Avec le développement de la protection des données personnelles et la mise en place du RGPD, certains employeurs ont tenté de s’opposer à la communication des bulletins de paie des salariés.
La Cour de Cassation refuse cet argumentaire. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 mars 2023, 21-12.492, Publié au bulletin)
Elle admet que l’employeur puisse être condamné à communiquer sous astreinte les bulletins de paie de salariés, avec occultation de leurs données personnelles, à l’exception des noms et prénoms, de la classification conventionnelle, de la rémunération mensuelle détaillée et de la rémunération brute totale cumulée par année civile.
La Haute juridiction retient que :
- le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu ;
et que :
- il doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux en application du principe de proportionnalité (règlt UE 2016/679 du 27 avril 2016 dit RGPD, introduction, point 4).
Elle rappelle également que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.
Si les éléments demandés sont de nature à porter atteinte à la vie personnelle d’autres salariés, les juges doivent aussi vérifier quelles données sont indispensables à l’exercice du droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi et, au besoin, cantonner le périmètre de la production de pièces sollicitée.
Cette décision à propos d’inégalité salariale entre hommes et femmes est identique à celle rendue en matière de discrimination.