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De la clause de dédit formation et de la rémunération pendant la formation

Toute action de formation suivie par un salarié pour assurer son adaptation au poste de travail constitue un temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien par l’entreprise de la rémunération.

Cependant ces actions de formation ont un coût supplémentaire pour l’entreprise qu’elle espère pouvoir amortir par le travail du salarié à son service pendant plusieurs années.

Il est donc fréquent que les contrats prévoient une clause de dédit formation.

On appelle une clause de dédit formation celle par laquelle le salarié s’engage à rester pendant une certaine durée au service de son employeur en contrepartie de la formation qui lui était dispensée. S‘il ne respecte pas cette clause le salarié peut avoir des dommages et intérêts à verser à son employeur.

Il existe une jurisprudence importante pour déterminer la validité de ce type de clause.

Il faut retenir que la clause doit mentionner la date, la durée de la formation et son coût réel pour l’employeur ainsi que le montant et les modalités de remboursement à la charge du salarié.

Le montant du remboursement doit être proportionnel aux frais engagés. 

Si l’employeur fixe un montant trop éloigné de la réalité de la dépense, le juge peut soit réduire le montant de l’indemnisation, soit déclarer nulle la clause de dédit-formation.(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 novembre 2013, 11-12.869 11-15.586, Inédit )

Que dire d’une clause stipulant le remboursement par le salarié des rémunérations qu’il avait perçues durant sa formation? 

La Cour de Cassation est formelle cette clause est nulle. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 octobre 2013, 11-16.032, Publié au bulletin).

Elle confirme sa position en rappelant que: « la prise d’acte de la rupture de la salariée produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ».(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 janvier 2012 N° de pourvoi: 10-15481 Publié au bulletin Cassation partielle )

Date de la prise d’acte et connaissance des fautes de l’employeur

Des fautes de l’employeur qui n’ont été connues par le salarié que postérieurement à la prise d’acte ne peuvent pas servir au fondement de la prise d’acte.

La Cour de Cassation vient de juger de cette situation dans un arrêt du 9 octobre 2013. ( Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 octobre 2013, 11-24.457, Publié au bulletin)

Dans cette affaire, un salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail pour divers raisons dont des problèmes de paiement des salaires.

Par la suite, il avait appris que son employeur l’avait fait suivre par un détective privé.

Le salarié avait alors ajouté le grief d’atteinte à la vie privée du salarié pour tenter d’obtenir la requalification de la rupture aux torts de l’employeur.

La Cour de Cassation refuse en arguant que le salarié ne peut invoquer devant le juge un manquement de l’employeur certes antérieur à la prise d’acte mais connu du salarié postérieurement à celle-ci. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 octobre 2013, 11-24.457, Publié au bulletin )

Le seul engagement d’une procédure disciplinaire qui n’a pas été menée à son terme ne constitue pas une faute de l’employeur

L’employeur a un pouvoir disciplinaire qui lui permet de prendre ou de ne pas prendre de décision de sanction à l’égard du salarié.

La Haute juridiction nous offre une illustration dans un arrêt du 25 septembre 2013.

Dans cette affaire, la salariée avait été engagée le 30 mars 1998 en qualité de gestionnaire.

Son employeur apprenant que son concubin et son frère avaient créé une entreprise directement concurrente, avait convoqué la salariée à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement au motif qu’elle n’avait pas l’informé.

Après cet entretien, l’employeur avait renoncé à toute sanction disciplinaire à l’égard de la salariée.

La salariée vexée a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.

Elle a eu tort.

La Cour de Cassation retient que le seul engagement d’une procédure disciplinaire qui n’a pas été menée à son terme ne constitue pas une faute de l’employeur.( Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 12-11.832, Publié au bulletin) 

Bien évidemment la solution aurait été différente si la salariée avait démontrée que la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire procédait d’une légèreté blâmable ou d’une intention malveillante de l’employeur.

A qui doit être adressée la prise d’acte de la rupture ?

mise à jour 26 septembre 2016.

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail n’est soumise à aucun formalisme.(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 septembre 2016, 15-18.189, Inédit).

Elle peut valablement être présentée par le conseil du salarié au nom de celui-ci.

Cependant il est impératif qu’elle soit adressée directement à l’employeur.

En effet, un courrier adressé au Conseil de Prud’hommes ne peut pas être requalifié en prise d’acte.

Par contre, il est tout à fait possible de considérer que le courrier adressé au Conseil de prud’hommes constitue une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 juin 2013, 12-20.973, Inédit )

Remettre en cause sa démission

  • (mis à jour le 12/03/13)

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Attention cependant, ce n’est pas toujours un acte définitif et sécure pour l’employeur.

En premier lieu, le salarié peut demander l’annulation de la démission pour vice du consentement (notamment la violence, dans les cas fréquents de harcèlement moral ou d’accusation de vol : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-20.797, Inédit ).

En second lieu, le salarié peut remettre en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur si il existe des griefs antérieurs ou contemporains à la date de démission.

Peu importe que le salarié n’ait pas mentionné dans sa lettre de démission les manquements de l’employeur.

Il peut tout à fait invoquer a posteriori que sa démission est une prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur, si il existe au moment de la rupture des vrais manquements de l’employeur. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-23.226, Inédit). 

 

Prise d’acte de la rupture pendant un arrêt pour accident de travail

Il est de jurisprudence constante que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur lorsqu’elle est justifiée équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il existe cependant des cas où la prise d’acte de la rupture peut produire les effets d’un licenciement nul.

C’est le cas :

– lorsqu’un salarié titulaire d’un mandat représentatif prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, 

– lorsque le salarié est victime de harcèlement

– lorsque le salarié est en arrêt de travail pour accident de travail

C’est cette dernière situation que vient d’examiner la Cour de Cassation dans un arrêt de sa Chambre sociale, 12 décembre 2012, 10-26.324, Publié au bulletin.

La Haute juridiction retient :

« Mais attendu, d’abord, qu’ayant constaté qu’à la suite d’un accident du travail, la salariée avait été en arrêt de travail du 9 juillet au 5 août 2007, soit pendant 28 jours, la cour d’appel a exactement retenu que celle-ci devait bénéficier du paiement de la totalité de son salaire pendant cette période conformément aux dispositions de l’article 17 bis de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport ;

Attendu, ensuite, qu’ayant estimé que l’employeur avait commis des manquements suffisamment graves, la cour d’appel en a exactement déduit que la prise d’acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail, intervenue pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à l’accident du travail, devait produire les effets d’un licenciement nul, peu important qu’elle ait ensuite travaillé pour le compte d’un autre employeur ; »

Le retour du salarié expatrié en France et l’obligation de réintégration de la société

Il appartient à l’employeur, à l’issue d’une période d’expatriation, de réintégrer le salarié dans l’entreprise en lui proposant un poste et un niveau de rémunération équivalents à ceux dont il bénéficiait auparavant.

Cela résulte de l’article L1231-5 du Code du travail « Lorsqu’un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d’une filiale étrangère et qu’un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l’importance de ses précédentes fonctions en son sein. Si la société mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables. Le temps passé par le salarié au service de la filiale est alors pris en compte pour le calcul du préavis et de l’indemnité de licenciement ».

Cela signifie que le salarié expatrié ayant fait l’objet d’une mesure de rapatriement en France doit :

 bénéficier d’une offre de réintégration sérieuse, précise et compatible avec l’importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère,

-donner un accord exprès sur ce nouveau poste . (et non tacite) 

Si l’employeur ne respecte pas cette obligation, le salarié peut tout à fait prendre acte de la rutpure aux torts de l’employeur. (Cour de Cassation Soc. 21 novembre 2012, n°10-17978, publié au bulletin)

De l’interdiction de modifier le salaire ( variable ou non) sans l’accord du salarié

mis à jour  30 juin 2016

Le mode de rémunération contractuel d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord.

Le fait que l’employeur démontre que le nouveau mode de rémunération est plus avantageux pour le salarié ne change absolument pas l’application de la règle(Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 31 octobre 2012 Non publié au bulletin Cassation N° de pourvoi: 11-18886 ;(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 juin 2016, 15-10.116, Inédit)

Cette solution n’est pas nouvelle. 

Elle permet au salarié soit de prendre acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur soit de solliciter la résolution judiciaire au tort de l’employeur.

La Cour de Cassation a rappelé cette solution récemment à propos du taux horaire contractuel.

Attention, il arrive fréquemment que le contrat de travail prévoit une rémunération variable d’un montant annuel fixe en cas d’atteinte d’objectifs déterminés unilatéralement par l’employeur dans le cadre de plans annuels de rémunération variable. 

Dans ce cas, la Cour de Cassation considére ( chambre sociale arrêt du 2 mars 2011 n° 08-44977) , que lorsque le salarié a accepté que la détermination des objectifs conditionne sa rémunération variable et qu’il a également accepté que la fixation de ses objectifs soit unilatéralement définie par l’employeur, le salarié n’a pas besoin de donner son accord lors de la modification des objectifs par son employeur 

 

Démission équivoque = prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur

  • (mis à jour le 04/03/13)

Une démission n’est pas toujours une démission….

Par un arrêt de sa chambre sociale du 11 juillet 2012 N° de pourvoi: 10-28497, la haute juridiction confirme la possibilité de requalifier une démission équivoque en prise d’acte de la rupture.

La Cour de Cassation rappelle:

– la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail

– que lorsque le salariésans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission,remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission 

Dans le cas d’espèce,la salariée avait, préalablement à sa démission, saisi la juridiction prud’homale d’une contestation, cela suffisait à rendre sa démission équivoque.

(voir également Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 février 2013, 11-23.226, Inédit)

Prise d’acte de la rupture par le Conseil du Salarié

  • (mis à jour le 14/06/12)

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail n’est soumise à aucun formalisme.

Elle peut valablement être présentée par le conseil du salarié au nom de celui-ci.

L’avocat peut donc parfaitement écrire à l’employeur afin de prendre acte de la rupture au nom de son client.

La seule condition nécessaire à la validité de la prise d’acte est qu’elle soit adressée directement à l’employeur(Cass.soc., 16 mai 2012, n°10-15238).

Le Conseil devra cependant être prudent et conserver par devers lui la preuve de l’accord éclairé de son client sur une telle démarche …..