Les élus locaux salariés deviennent des salariés protégés

La loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice par les élus locaux de leur mandat créé un  statut protecteur à certains élus locaux, titulaires d’un contrat de travail .

Les articles L. 2123-9, L. 3123-7 et L. 4135-7 du code général des collectivités territoriales sont modifiés et prévoient que les élus sont considérés comme des salariés protégés au sens du code du travail.

Attention tous les élus locaux ne sont pas concernés, sont protégés seulement :
– les maires ;
– les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins ;
– les membres d’un conseil d’arrondissement des communes de Paris, Marseille et Lyon ;
– les présidents des conseils départementaux et régionaux ;
– les vice-présidents ayant délégation de l’exécutif du conseil départemental et du conseil régional.

Les « simples » conseillers municipaux, départementaux et régionaux ne sont pas visés par la protection.

Illustration de la prise des RTT en cours de contrat de travail

La Cour de Cassation vient de rendre une décision intéressante quant au choix de la date de prise des RTT des salariés. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 mars 2015, 13-19.206, Publié au bulletin)

IMG00176-20100722-1704La Haute juridiction était saisie de deux questions :

1-  l’employeur peut-il imposer les jours de RTT que le salarié doit prendre si un accord collectif prévoit que lesdits jours sont posés à l’initiative du salarié ?

2- De même les RTT affectés à un CET ( compte épargne temps) peuvent -ils faire l’objet d’une décision unilatérale de l’employeur imposant la date de leur utilisation ?

La Cour de Cassation a répondu négativement à ces deux questions.

Sur le premier point, la Cour de Cassation précise que l’accord collectif prévoyait que l’employeur ne pouvait utiliser les JRTT individuels qu’avec l’accord exprès des salariés concernés.

Il apparaît donc cohérent de condamner l’employeur à payer une somme correspondant aux jours de repos prélevés indûment sur les JRTT individuels.

Sur le deuxième point, la haute juridiction retient que les repos inscrits dans un CET ne sont pris qu’à l’initiative du salarié.

Voici sa motivation :

« s’il résulte des dispositions des articles L. 3121-24 et D. 3121-10 du code du travail que l’employeur peut, en l’absence de demande du salarié de prise de la contrepartie obligatoire en repos, imposer à ce salarié, dans le délai maximum d’un an, le ou les jours de prise effective de repos, ces dispositions ne sont pas applicables aux jours de repos compensateur de remplacement affectés à un compte épargne-temps ;

Et attendu que le conseil de prud’hommes, qui a constaté que l’employeur avait pris la décision d’utiliser, sans l’accord du salarié, les repos de remplacement portés préalablement au compte épargne-temps ouvert et alimenté par ce salarié, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision. »

 

Rupture conventionnelle et maternité

Une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.  (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 mars 2015, 14-10.149, Publié au bulletin).

Comme pendant la période de suspension pour arrêt maladie à la suite d’un accident de travail, la Cour de Cassation permet le recours à la rupture conventionnelle.

Cette solution est cependant limitée aux situations où le consentement du salarié est libre et éclairé.

En effet, la Cour de Cassation rappelle que la fraude et le vice du consentement rendent illicite la rupture conventionnelle.

RTT et rupture du contrat de travail

mis à jour 14 avril 2016

Lors de la rupture du contrat de travail du salarié, sauf en cas de faute lourde, l’employeur doit verser au salarié une indemnité équivalente aux congés payés non pris mais qu’en est-il des RTT non pris ?

IMG_20140506_101321La Cour de Cassation vient pour la première fois de répondre à cette question dans un arrêt du 18 mars 2015. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 mars 2015, 13-16.369, Publié au bulletin) confirmé par une décision Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 mars 2016, 14-29.326, Inédit)

Selon la haute juridiction, l’absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n’ouvre droit à une indemnité que :

– si cette situation est imputable à l’employeur,

ou si un accord collectif le prévoit.

Cette solution diffère de la solution retenue pour les congés payés dont l’indemnisation est assurée dans tous les cas lors de la rupture du contrat hors faute lourde (articles L. 3141-22 à L. 3141-25 du code du travail).

Il faut donc retenir qu’en l’absence d’accord collectif,  pour obtenir le paiement des RTT, non pris,  le salarié doit montrer que l’employeur ne l’a pas autorisé à les prendre mais qu’il en a fait la demande pendant l’exécution de son contrat.

Cela va surement être difficile et conduire à la « perte sèche » des RTT non pris pour le salarié.

Qui des RTT acquis pendant une période de dispense de préavis ? (sur l’acquisition : Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 avril 2009, 07-44.068, Publié au bulletin)

A mon sens, la dispense de préavis de l’employeur devrait permettre de considérer que les RTT acquis pendant le préavis doivent être indemnisés systématiquement car le salarié ne pouvait absolument pas les prendre.

 

 

Prise d’acte et harcèlement moral

Lorsque le salarié est victime de harcèlement moral, il peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur mais il doit être prudent.

IMG_20140923_122626Il faut que les manquements soient suffisamment graves et compromettent la relation contractuelle.

Le harcèlement moral et le harcèlement sexuel sont des faits graves qui peuvent – au moment où le salarié les subit – justifier une telle prise d’acte.

Mais peuvent ils justifier une prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur plusieurs mois après ?

La Cour de Cassation a déjà jugé que des faits anciens ne peuvent pas en principe justifier la prise d’acte de la rupture. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 mars 2014, 12-23.634, Publié au bulletin)

Néanmoins, elle refuse de donner une position de principe sur la question et renvoie cette question à un problème de fond que doit trancher la Cour d’Appel.

Il faut donc retenir que lorsque le salarié a été victime d’un harcèlement moral et/ou sexuel dans l’entreprise, la Cour d’Appel doit apprécier si ce manquement a empêché la poursuite du contrat de travail au jour de la prise d’acte. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 mars 2015, 13-18.603, Publié au bulletin).

Tout est donc possible …

Il faudra donc être convaincant et habile pour prouver comment un harcèlement ayant conduit à un arrêt de travail peut, plusieurs mois après, justifier une prise d’acte…

 

 

 

Quand qualifier son employeur de  » balourd  » ne constitue pas une faute grave

Dire que de son employeur qu’il est « balourd » peut être considéré comme une insulte, voire une injure, mais ce n’est pas une faute grave si ces propos restent dans une sphère privée et amicale.

C’est la liberté d’opinion….

Que se passe-t-il si cette insulte sort de la sphère privée et qu’elle est prononcée devant son employeur ou devant des clients ou collègues de l’entreprise?

Très souvent, le salarié sera licencié pour faute grave même si les juridictions s’attachent à examiner le contexte général et l’ancienneté du salarié et peuvent parfois être clémentes.

Néanmoins, la Cour de Cassation peut ne pas retenir  la faute grave, si  le salarié n’avait pas l’intention de prononcer l’insulte dans la sphère professionnelle et que c’est par erreur qu’il l’a fait. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 28 janvier 2015, 14-10.853, Inédit).

Dans cette affaire,  le salarié pensait s’adresser par téléphone non à son supérieur hiérarchique mais à un ami.

Il avait expliqué avoir composé par erreur le numéro de son supérieur hiérarchique et avait dit : « Il ne sait pas encore s’il aura le camion mon balourd de patron ». 

Le salarié avait alors été licencié pour faute grave.

La cour d’appel avait validé ce licenciement, et jugé que même si le salarié n’avait pas eu l’intention d’insulter directement l’employeur, il avait l’intention de qualifier son patron auprès d’une autre personne par l’emploi d’un terme insultant.

L’arrêt est cassé.

Pour la Haute juridiction, les propos incriminés ne pouvaient constituer une insulte envers l’employeur du fait que le salarié croyait s’adresser à un ami et non à son employeur.

 

 

 

 

Taux d’intérêts 2015 ou comment compliquer la situation ….

mis à jour juillet 2015

Calculer les intérêts à partir de  2015 va être plus compliqué que les années précédentes.

IMG_2095Désormais, il n’y aura plus un taux par an mais deux taux par semestre.

Le calcul se fera donc : montant dû x taux annuel valable pour le semestre x jours de retard dans ce semestre / 365 jours.

Un arrêté du 23 décembre 2014 fixe les taux de l’intérêt légal pour le 1er semestre 2015 :

– 4,06 % (si le créancier est un particulier)

– 0,93 % (si le créancier est un professionnel ou un particulier agissant pour des besoins professionnels).

Un arrêté du 24 juin 2015 fixe  pour le second semestre 2015, :

– 4,29% (si le créancier est un particulier)

– 0,99 % (si le créancier est un professionnel ou un particulier agissant pour des besoins professionnels).

Bien …..

Je m’interroge sur un point néanmoins,  faut-il considérer des créances salariales comme des créances de particuliers pour des besoins professionnels ?????

En effet, le salarié reste bien un particulier qui travaille et qui perçoit un salaire résultant d’une relation professionnelle…

Si certains ont pu consulter les discussions préalables à la mise en place de l’arrêté, je serais intéressée de savoir si le législateur a discuté la question … (Arrêté du 23 décembre 2014 relatif à la fixation du taux de l’intérêt légal)

En attendant, je vais considérer que la notion de  » besoins professionnels » ne s’applique pas aux salariés car leur créance n’est pas un simple besoin professionnel mais une nécessité.  😉

 

Quand la discrimination en raison de l’état de grossesse conduit au harcèlement moral

Il est possible de sanctionner l’employeur qui discrimine une salariée en raison de son état de grossesse sur deux fondements :  la discrimination en raison de l’état de grossesse et le harcèlement moral.

IMG_20140506_101050La Cour de Cassation vient de le confirmer en sanctionnant lourdement  un employeur qui avait discriminé et harcelé moralement sa salariée en raison de son état de grossesse . (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 mars 2015, 13-23.521, Publié au bulletin).

C’est une décision courageuse qui mérite d’être publiée.

Dans cette affaire,  une salariée avait été engagée en 1986 en qualité de rédactrice stagiaire par la société Les Editions Y…, éditeur de magazines.

Elle avait  bénéficié de trois congés maternité de juillet 1997 à août 1998, de septembre 2001 à février 2003 et de mars à septembre 2005.

Son retour dans l’entreprise s’était mal passé.

Elle n’avait pas retrouvé son poste antérieur et avait été  privée des avantages salariaux et de progression de carrière.

La salariée, fragilisée par cette situation, avait été en arrêt de travail à cause d’une dépression importante dès le mois d’octobre 2006.

Le 12 octobre 2009, le médecin du travail, au cours de l’unique visite de reprise en raison d’un danger immédiat, l’a déclarée «inapte à tout poste existant dans l’entreprise».

Elle a été licenciée par lettre du 3 décembre 2009.

Devant la Cour d’appel, la salariée a sollicité le paiement de diverses sommes au titre de la rupture du contrat, d’une discrimination, d’un harcèlement moral et d’une violation du principe d’égalité de traitement.

La Cour de Cassation a été interrogée sur la possibilité de cumuler ces trois demandes de dommages et intérêts (inégalité de traitement, discrimination et harcèlement moral).

Voici sa réponse :

–>  Peut-on cumuler dommages et intérêts pour inégalité de traitement et discrimination en raison de l’état de grossesse ?

La Cour de Cassation se prononce très clairement : « le préjudice subi par la salariée au titre de la violation du principe d’égalité de traitement est pris en compte dans l’octroi de dommages-intérêts au titre de la discrimination à raison de l’état de grossesse ». (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 mars 2015, 13-23.521, Publié au bulletin)

Il ne peut donc y avoir cumul entre dommages et intérêts pour inégalité de traitement et discrimination en raison de l’état de grossesse.

 

–> Peut-on cumuler dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination en raison de l’état de grossesse ?

La Cour de Cassation répond que les dommages-intérêts alloués au titre de la discrimination réparent les préjudices matériels et moraux résultant de la privation d’une partie des fonctions de l’intéressée après retour de ses congés maternité et non l’atteinte à la dignité et à la santé de la salariée, ayant conduit à un état d’inaptitude médicalement constaté, résultant du harcèlement moral dont elle a fait l’objet. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 mars 2015, 13-23.521, Publié au bulletin)

Il  peut donc y avoir cumul entre dommages et intérêts pour discrimination en raison de l’état de grossesse et dommages et intérêts résultant du harcèlement moral.

Des dommages et intérêts pour non-respect du repos quotidien

mis à jour 15/03/2022

Si le salarié ne bénéficie pas de son droit à repos quotidien d’au mois 11 heures, il peut obtenir des dommages et intérêts pour non-respect du repos quotidien, aussi appelé indemnité pour pour non-respect du repos quotidien.

IMG_20140506_101421Pour mémoire, ce droit à repos est prévu non seulement par le droit français mais également par le droit européen.

Il suffit que le salarié saisisse la juridiction prud’homale d’une demande de dommages et intérêts pour non-respect du repos quotidien pour que sa demande soit examinée.

L’employeur peut contester la demande du salarié.

Il faut noter que  le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation. (Cour de Cassation chambre sociale 26 janvier 2022, Pourvoi n° 20-21.636 )

Néanmoins, la Cour de Cassation rappelle  que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l’employeur. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, 13-19.606, Inédit ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, 13-19.605, InéditCour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 17 octobre 2012 N° de pourvoi: 10-17370 Publié au bulletin ; Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 septembre 2016, 14-15.604 14-29.215, Inédit ).

C’est un renversement de la charge de la preuve dont l’employeur ne peut absolument pas se défaire. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.015, Inédit)

Rappelons également que ce défaut de respect des règles relatives au repos quotidien de onze heures caractérise une atteinte aux intérêts collectifs de la profession et peut également donner lieu à l’allocation de dommages et intérêts aux syndicats. Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mai 2013, 12-13.015, Inédit).

Impossible de licencier pour motif économique un salarié en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail

Il n’est pas possible de licencier pour motif économique un salarié en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail sur ce seul motif. (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 février 2015, 13-21.820, Inédit).

Le salarié dont le contrat est suspendu à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est protégé contre le licenciement économique intempestif .

IMG_20140923_122328Dans l’affaire précitée, M. X… a été engagé le 17 janvier 2005 par la société M2I en qualité de directeur commercial.

Ce salarié a été licencié pour motif économique le 13 mars 2008, alors qu’il se trouvait en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail.

Son employeur a eu tort.

La Cour de Cassation rappelle les dispositions de l’article L1226-9 du code du travail qui prévoit : « Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut rompre ce dernier que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie. »

Or il est de jurisprudence constante que « l’existence d’un motif économique de licenciement ne caractérise pas, en lui-même, l’impossibilité de maintenir, pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie, le contrat de travail d’un salarié suspendu par l’arrêt de travail provoqué par un accident du travail ou une maladie professionnelle ».

Avocat à la Cour D'appel de Paris – droit du travail et droit des affaires – Expert SYNTEC- BETIC-CINOV